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La fashion story du gilet jaune

Depuis plusieurs mois, le mouvement des gilets jaunes a envahi l’espace – géographique et médiatique – en France. Hier “gilet à haute visibilité”, aujourd’hui symbole de la contestation populaire, le célèbre chasuble n’en reste pas moins un vêtement. Petit historique de la yellow vest.

Une campagne de sécurité routière met Karl Lagerfeld en scène en 2007. Le directeur artistique de Chanel pose alors pour la bonne cause, bien loin d’imaginer la valeur symbolique que revêtira le chasuble quelque onze ans plus tard.

En 2011, le gilet jaune réapparait dans le Yellow Art Work, à l’initiative d’Alison Vonthron et de Pauline Heude, diplômées de l’Institut d’étude Supérieure des Arts (IESA). Elles rassemblent un collectif de 65 artistes et créateurs de mode, qui détournent ledit gilet afin de le rendre plus intéressant stylistiquement. Surtout, ils organisent une vente aux enchères dont les bénéfices sont reversés à l’association Prévention Routière.

Finalement la première marque qui détourne le gilet, le sortant complétement de son contexte, est la marque britannique Ashish, lors de sa collection Automne/Hiver 2013. Ashish Gupta, le directeur artistique, voit dans les vêtements de chantier un potentiel  :  résistance protection et robustesse. Ils ont juste besoin d’une touche de glamour.

Les gilets jaunes et le monde de la mode, deux univers parallèles

Depuis cette collection, silence radio. Le gilet jaune n’a pas refait d’apparition sur les podiums. Les fashion week de Paris en janvier (l’homme et la haute couture) étaient les premières depuis le début du mouvement. Aucun clin d’oeil ou hommage – ou presque – au chasuble n’a été aperçu.

Pour rappel, les semaines de la mode, en plus d’être des événements médiatiques importants, sont les moments clés de l’industrie. Les différentes maisons présentent à leurs meilleurs clients (c’est-à-dire à ceux qui dépensent le plus) les prochaines collections. La clientèle des défilés est internationale et pour ceux qui ont entendu parler du mouvement des “yellow vests” – ce qui n’est pas le cas de tous -, les revendications et le mouvement en lui-même demeurent une sorte de mystère. Chaque marque a redouté l’apparition de collectifs lors des défilés : les profits du secteur n’ont jamais été aussi élevés et les accompagnateurs des VIC (very important client) sont prêts à remuer ciel et terre pour que l’escapade parisienne de leurs clients se déroule dans un Paris fantasmé.

Quelques irréductibles ?

Bella Hadid dans une veste Louis Vuitton homme, collection printemps été 2019.

Finalement, les seuls à s’être emparés du mouvement sont des étrangers. Bella Hadid a assisté à la soirée Louis Vuitton, vêtue d’une veste créée par Virgil Abloh, directeur artistique homme de la maison-même. L’Américain vit à Paris depuis sa prise de poste il y a moins d’un an. S’agissait-il d’un lien avec le mouvement social ? Personne ne le sait, mais si on se fie à la personnalité revendicatrice et observatrice du créateur d’Off-white, le doute est permis.

Dans un autre registre, un homme est apparu à la dernière fashion week vêtu d’un énorme gilet jaune. Repéré par l’émission de TMC Quotidien, l’inconnu explique son fashion statement en répétant simplement “’cause gilet jaune“. Quand la journaliste lui demande son avis sur Emmanuel Macron, il avoue ne pas connaître cet homme. Pour l’engagement politique, on repassera.

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