MUSIQUE

Les deux concerts qu’il ne fallait pas rater à Bordeaux en novembre

Deux dates, deux fins de tournées remarquables. Bordeaux accueillait à une semaine d’intervalle les rockeurs parisiens de Feu ! Chatterton et les enfants rappeurs du pays, Odezenne.


Feu ! Chatterton – C’était la mort dans la pinède au Pin Galant

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Télérama, “Feu ! Chatterton : l’élégance pop made in France”

Le jeudi 17 novembre 2016, la scène du Pin Galant de Mérignac ouvrait ses portes pour accueillir un public électrisé d’avance. Feu ! Chatterton, c’est la relève assurée de la chanson française, voire une des figures de proue de son renouveau. Portées par cinq jeunes garçons, les paroles ne sont pas sans rappeler celles de Bashung ou même Gainsbourg. Dès le début du concert les sièges rouges de la grande salle n’ont pas été longtemps occupés, car après la première chanson, une jeune fille crie au chanteur « Mets-nous debout ! ». Qu’il en soit ainsi. À partir de là, le chanteur Arthur Teboul n’a cessé de remercier un public dont l’enthousiasme n’a pas faibli de toute la soirée.

La plupart des titres interprétés étaient ceux de leur dernier album Ici le jour (a tout enseveli), leur seul pour l’instant. La Malinche, chanson emblématique du groupe sur la femme qui a guidé Cortès lors de la conquête des Amériques, a même été jouée deux fois. Une première version acoustique et intime a eu lieu, pendant laquelle le guitariste Clément Doumic a pu faire entendre le son du charango, instrument andin traditionnel. La deuxième a été électrique, voire électronique : plus de synthé, un rythme marqué et très dansant.

Bernard Lavilliers et Bertrand Cantat sont venus sur scène pour offrir un moment intime et inoubliable.

Après plus d’une heure de show, le moment a été prolongé avec la venue d’invités surprise. Bernard Lavilliers est venu le premier sur scène, les poings enfoncés dans son manteau. Avec Arthur, ils ont répondu à la question « Est-ce ainsi que les hommes vivent ? », un monument de poésie qui nous vient de Louis Aragon et chanté par Léo Ferré. Trois générations de la chanson française ont alors fusionné sous les yeux ébahis du public.

Puis Bertrand Cantat, le bordelais qui a porté Noir Désir, est arrivé. À Bordeaux, les présentations ne sont pas nécessaires, ce visage est connu et admiré. Et encore une fois, les artistes ont offert un moment de beauté en reprenant Je t’ai toujours aimée, une chanson de Polyphonic Size que Feu ! Chatterton se plaît à reprendre lors de ses concerts. Dans leur version, pas de synthé ostentatoire, mais un accompagnement équilibré qui vient porter les voix complémentaires des deux chanteurs. On pouvait alors voir quelques larmes couler discrètement dans le noir.

Les cinq parisiens ont offert un live brillant et suave ce soir-là, prouvant bien qu’ils savent s’adapter en toutes circonstances. Après être passés devant la foule immense des Francofolies de la Rochelle en juillet, le groupe ne montre pas de signe de fatigue et a même tout donné pour cette ultime soirée. La fête a continué jusqu’au petit matin au Quartier Libre, bar de monsieur Cantat dans le quartier St Michel de Bordeaux, où le groupe s’est montré joyeux et ouvert à la discussion.

Odezenne – Maryvonne Festival à la Rock School Barbey

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Odezenne – Festival Art Rock 2017, St Brieuc

Les 25 et 26 novembre 2016, Odezenne a voulu marquer le coup en créant un festival pour ces deux dernières dates de tournée. OAD, Odezenne à la demande, c’est la manière dont la tournée du groupe s’est en partie organisée. Le public s’inscrit sur un groupe Facebook d’une ville qui souhaite accueillir un concert d’Odezenne et quand la barre des 3 000 est dépassée, une date se crée. Ils sont allés partout en France, et ont poussé jusqu’à Londres. Trois dates sont en cours d’OAD pour les villes de New York, Montréal et Berlin.

Le 26 novembre était la date retenue pour Bordeaux, mais l’engouement était tel dans la ville d’origine du groupe qu’une autre date est venu réconforter ceux laissés sans billet. C’est finalement un festival Maryvonne qui a été créé pour faire durer le plaisir sur deux jours. L’appellation qui vient de leur professeur de maths du collège, de même que le nom du groupe est son nom de famille.

Sur Facebook, Odezenne a donné des invitations de dernière minute sous l’identité de Maryvonne Odezenne, une figure devenue emblématique du groupe.

Alix, Mattia et Jaco ont gâté leur public. Les dizaines d’invitations distribuées à la dernière minute sur leur page Facebook ont fait de nombreux heureux. La programmation surprise, dévoilée elle aussi au dernier moment a presque achevé la foule impatiente. Le vendredi soir a vu passer JC Satan et Salut c’est cool, le samedi a accueilli Équipe de Foot et Djedjotronic. En bref, une programmation survoltée. Le premier soir, Maryvonne Odezenne en personne, figure devenue emblématique du groupe, a ouvert le festival.

Les garçons ont offert leurs morceaux les plus attendus, piochant autant dans leur dernier album Dolziger St. que dans leurs autres productions (OVNI, Rien, Sans Chantilly). Dans la salle quasiment tout le monde connaissait les paroles par cœur, les couplets ont été gravés à l’encre indélébile pendant que la renommée du groupe faisait son chemin. Le sérieux des paroles de Novembre a côtoyé l’énergie de la chanson Bûche, un titre délirant, tout en passant par Petit Abricot, une instrumentale originale et délicieuse.

Odezenne a surtout clôturé sa tournée formidable par deux soirées inoubliables. Le Dour Festival doit encore se souvenir des poupées gonflables qui surfaient sur la foule l’été dernier. Garorock a aussi vu passer le groupe sous une chaleur étouffante, mais jamais il n’a faibli. C’est aussi une vague de clips qui a submergé Youtube dernièrement. Novembre, Boubouche, Cabriolet ou encore le très poétique Matin ont été mis en images. Leur esthétique de l’étrange et du marginal s’affirme, tout comme une teinte politique qui point parfois. Bref, cette tournée qui s’achève semble avoir gardé une énergie constante et le groupe a marqué les esprits en retournant les salles et les foules à chacun de leur passage.

À Bordeaux ces deux concerts ont marqué des temps forts de la vie nocturne, en rassemblant un public jeune et motivé. Mais ce genre d’évènement n’est pas rare. Les 2 et 3 décembre derniers la ville a accueilli Étienne de Crécy et Crystal Castles pour deux concerts très attendus par les amateurs d’électro.

Rédactrice en chef de la rubrique musique et étudiante en master numérique à Bordeaux. Passionnée de musique et de photo.

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