MUSIQUE

Last Train : “On aime vivre sur scène”

Quatre garçons qui décident à l’âge de onze ans de faire du rock, comme ça, pour le fun. Jean-Noël, Julien, Tim et Antoine forment Last Train, un groupe très rock n’ roll. Ils ont aujourd’hui la vingtaine, et ont enflammé le Club Loggia des Eurockéennes de Belfort. Inspirés par une musique extrêmement variée, le quatuor, originaire de l’est de la France, nous livre un son rock sans artifice. Maze a rencontré Tim, le bassiste et Julien, le guitariste du groupe. Nous avons parlé inspiration, musique et madeleine de Proust. 

Pourquoi avez-vous appelé votre groupe Last Train ?

Tim : Last train, c’est un nom qui a été choisi il y a bien longtemps. Parce qu’on fait de la musique ensemble depuis qu’on a 12-13 ans, donc ça fait dix ans. Et c’est un nom qui a été choisi… on avait 15 ans, quoi. Ça allait avec la musique qu’on faisait avant. On faisait déjà du rock, mais c’était un truc un peu plus fougueux que ce que l’on est maintenant, jeune. C’est des mecs qui ont 15 ans, qui font de la zic (sic). Et il fallait avoir un nom qui était efficace, qui bastonne direct, qui sonne bien, qui soit stylé. On chante en anglais, donc un nom anglais. Du coup Last Train a été trouvé à ce moment là. Il n’y a pas de signification particulière. Avec le temps, on a souvent hésité. On s’est dit « oh on pourrait changer de nom, c’est le moment ». En fait, on s’est rendu compte que Last train nous plaisait bien, parce que ça nous représente. Ça représente le fait qu’on joue depuis très longtemps ensemble.

Pouvez-vous nous parler de vos influences musicales et de vos inspirations ?

Tim : Quand tu fais de la musique, tu donnes tout ce que tu as, tu vis vraiment ta musique. Un truc que tu conçois, comme construire une maison. Tu le vis vraiment, tu donnes toute ton âme et ce qui t’inspires, c’est le monde qui t’entoure. C’est tout ce que tu fais dans la vie, tout ce que tu écoutes comme musique, tout ce que tu regardes comme films, quand tu voyages, quand tu rencontres des gens. C’est vraiment ce qui sort du profond de nous-mêmes. Ça s’exprime comme étant du rock’n’roll parce qu’on adore ça. On a toujours fait du rock’n’roll, c’était assez instinctif. Après, en musique, c’est le rock en général, et même la pop, et l’électro. Tout type de musique en fait. Certes on a beaucoup écouté les Stones, les Beatles, Led Zeppelin, Black Rebel. Beaucoup de groupes de rock forcément, mais là, aujourd’hui, dans le van par exemple, on écoute beaucoup de choses qui ne sont pas du rock. On écoute du hip hop, de l’électro, de la pop. Je pense que tout ça nous inspire.

C’est la première fois que vous êtes aux Eurockéennes. Comment trouvez-vous le festival ?

Tim : On le vit avec une énorme joie. On habite pas loin, on de la campagne entre Belfort et Mulhouse. Du coup ça fait des années que l’on vient aux eurockéennes en tant que festivaliers. Ça va faire six ou sept ans. On est à la maison, quoi. On connait tous les endroits.

Julien : On s’était rarement imaginé à un moment de notre vie venir jouer ici.

Tim : On l’a rêvé quoi.

Julien : On l’a rêvé. Et venir dans les travers, derrière les scènes. C’est marrant, avec Antoine, on se disait que quand on marche, on ne voit pas cette partie du festival. On s’est jamais imaginé qu’il y avait un tel endroit derrière les scènes. C’est fou ! Forcément quand on a des rêves, on a envie d’y croire. On s’était dit que peut-être dans dix ans, quand on aurait fait trois ou quatre albums, qu’on aurait fait mille concerts, peut-être qu’à un moment donné on jouerait aux Eurocks. Et c’est arrivé plus tôt que prévu.

Selon vous, comment est l’état du rock aujourd’hui ?

Julien : C’est une vaste question, mais c’est intéressant.

Tim : Il ne va pas si mal.

Julien : Oui, il va pas si mal. Le rock, c’est une chose, mais après, il faut se poser la question de la musique de manière générale. On ne se considère pas comme des grands défendeurs du rock qui pensent que c’est la meilleure chose qui soit. Comme on l’a dit, on écoute beaucoup de musique différentes. Après il faut se questionner sur est-ce que la musique va bien ? Parce qu’on voit qu’il y a beaucoup de festivals en France. Il se crée de nouveaux festivals, les artistes font beaucoup de concerts. Alors, certes, il y a cette grande hégémonie des artistes qui sont produits par des grands majors, comme Maître Gims. Nous, on n’est pas du tout comme ça. On peut comprendre que le grand public, qui écoute un peu moins de musique, s’intéresse plus facilement à cet artiste là, qui va être placardé dans tous les métros parisiens. Mais on aime bien toutes les petites choses qui se font à côté. Le rock, c’est pas ce qui ressort le plus. A côté, je sais pas s’il y a vraiment des bons groupes de rock, à part ceux qui ont un peu de bouteille. Mais dans les autres styles, il y a des choses qui ressortent. On est fans des Dø, on aime beaucoup Lilly Wood And The Prick. Il se passe quelque chose dans cette nouvelle scène. Il faut accepter aussi que ce ne soit pas spécialement du rock. Je parle en mon nom, parce que je ne sais pas si tout le monde est d’accord avec ça. C’est pas très grave si le rock n’est pas là en ce moment. Et c’est aussi grâce à ça que l’on sort du lot. Parce qu’on a un rock vachement brut, qui fait peut-être revenir des anciennes émotions aux gens.

Justement, dans ce style musical, comment vous situez-vous exactement ?

Julien : On fait du rock tout ce qui a de plus pur. On a deux guitares, une basse, une batterie. Si on devait vraiment définir notre style, on est influencé par Led Zeppelin, du son qui touche des fois presque aux stoners. Enfin, je sais pas, je saurais pas trop dire en fait.

Tim : C’est con de faire des barrières. Si on met garage rock, rock psyché, pop rock, on met des barrières. Alors que nous, on a juste envie de sortir quelque chose qui vient de nous. Parce que si on fait du garage rock et qu’après on a une chanson posée, ce ne sera plus du garage rock.

Julien : Et même quand on était plus jeunes, on avait envie de faire du rock psyché. Mais je pense qu’il faut juste jouer ce que l’on a envie de jouer avec ses potes et essayer de toucher le plus de monde avec ça. C’est marrant de voir qu’il y a beaucoup de personnes qui nous aiment alors qu’ils écoutent pas de rock a priori. Pour nous c’est un challenge réussi.

Tim : Challenge accepted.

Votre musique a-t-elle évoluée depuis vos débuts ?

Julien : Oui. On évolue en tant qu’être humain. Et la musique c’est pareil. Quand on fait de la musique, on donne tout ce que l’on a. Donc forcément la musique évolue avec nous. Comment on la joue, comment on la compose, comment on l’écrit, ça change. Je pense que dans ces deux dernières années, on a atteint une sorte de maturité musicale. On sait ce qu’on veut, on sait ce qu’on aime, on sait ce qui nous fait vibrer. Je pense qu’en tant que spectateur, c’est pareil. Je peux voir n’importe quel groupe, du reggae, de l’électro… Tant que c’est fait avec le cœur, tant que le mec est sur scène et qu’il joue sa vie, là c’est de la musique. Alors que celui qui fait son job sans rien, ça c’est chiant. On a vu les Insus, reformation de Téléphone, il y a deux jours. C’est cool parce qu’on est contents d’entendre les morceaux de Téléphone. D’un autre côté, c’est chiant parce qu’ils font ça pour le business. Mais j’ai quand même apprécié, parce qu’on voyait qu’ils étaient heureux. Ils jouaient comme il y a trente ans. Et ça c’est cool.

Julien : Si on parle de rock, les groupes de rock qui sont ressortis, c’est surtout parce qu’il y avait un truc et qu’il le vivait à fond. Les Sex Pistols, ils ne jouaient pas bien. Ils étaient mauvais. Mais finalement, il y a un contexte qui fait que c’est joué avec le cœur.

Et c’est pour ça que vous vous êtes lancé dans la musique ?

Julien : Maintenant c’est pour ça qu’on le fait, c’est sûr. Parce qu’à 21 ans, on a fait des études. On pourrait très bien faire autre chose.

Tim : Ouais, on serait même heureux, aussi.

Julien : Oui, trouver un travail, tout ça, ça nous plairait bien. Mais maintenant, je sais que l’on fait ça pour ça. Mais on ne peut pas dire que l’on a commencé à faire de la musique pour ça, parce qu’on a commencé à l’âge de 11 ans. On savait pas qu’on allait transmettre des émotions. On faisait juste de la musique entre potes. C’était un peu pourri. Au départ, on se concentre sur ses parties, on essaye de bien jouer, on n’y arrive pas trop. Mais après 200 concerts, à 19-20 ans, là il se passe des choses. Des choses avec les potes, des choses sur la route, en tournée, les nouveaux concerts… C’est ouf.

Et vous êtes autodidactes ?

Tim : Complètement. Là, on est les deux autodidactes du groupe.

Julien : Antoine et Jean-Noël, le batteur et le chanteur ont un peu plus de notions. Antoine a fait pas mal de cours de batterie, du solfège. Jean-Noël a fait du piano quand il était plus jeune. Mais ils ont vite arrêté. On se rend compte que quand on fait de la musique entre potes, c’est vraiment là que l’on progresse. Nous on est arrivé dans le groupe sans faire plein de musique. On a appris avec le groupe. Là, on commence à s’en sortir.

Tim : On commence, oui. C’est pas toujours évident. Des fois je suis là, genre « Oooooh, c’est dur ».

Vous avez des projets pour l’avenir ?

Julien : Là, on arrête (rires)

Tim : Mais non ! ! ! Ce serait à contre-courant de tout ce qu’on a fait.

Julien : Nos projets, c’est un peu toujours la même chose dans le sens où on aime toujours faire des concerts. C’est là qu’on va chercher le public. On aime vivre sur scène. Donc on va continuer à faire des concerts. Par contre en même temps, on est en train de continuer notre album très sérieusement. Parce que ça fait 1 an et demi – 2 ans qu’on tourne sans album. On va sortir notre premier album début d’année prochaine. Il sera sans doute précédé d’un EP de quatre titres, avec des nouveaux morceaux, que les gens connaissent pas. Pour apporter un peu de nouveauté et aussi pour que les gens puissent nous écouter quand ils …

Tim : Quand ils vivent en fait.

Julien : Dans le bus, dans la voiture…

Tim : On nous avait dit ça. Les gens ont envie de vivre un peu avec nous.

Julien : Dans le sens où on a toujours défendu le fait que les gens devaient venir nous voir sur scène. On leur promet 45 minutes de set. Et c’est à ce moment là qu’ils étaient avec nous. Quand ils repartaient chez eux, ils étaient toujours un peu avec nous. Ce qu’il y a d’intéressant avec un album, c’est que t’es un peu avec eux dans la vie de tous les jours.

Tim : Le mec, il va bosser le matin. Il est dans un moment peut-être un peu chiant. Et il écoute, il écoute et il se sent proche du groupe. Il revit ce qu’il a vu en concert le week-end dernier.

Julien : Parce que nous, on a la même chose. On a des musiques qu’on associe un peu à des moments de notre vie sans le vouloir. On a taffé au Quick, par exemple, et on écoutait Balthazar à fond, pendant huit mois. Maintenant, quand j’écoute Balthazar, ça me rappelle quand on travaillait là-bas. Finalement, c’est l’effet madeleine de Proust.

Tim : Petite anecdote un peu à la con : je me souviens quand j’étais au collège, et au lycée, et que je kiffais une meuf à fond, il y avait un morceau qui m’y faisais penser. Toujours maintenant, c’est toujours un peu ça. Mais ça n’avait aucun sens. C’était un morceau de Sum 41. Maintenant je l’écoute encore aujourd’hui et je pense un peu à cette nana. Le groupe t’accompagne dans ta vie, et c’est super beau ! Ça nous fait plaisir de sortir des morceaux, un jour un album. Qu’il y aient des personnes qui nous écoutent tranquille dans un bar, qu’il y aient des personnes qui jouent nos morceaux en faisant l’amour, des personnes qui les écoutent en allant au taf. Ça nous touche. Beaucoup. C’est ce qui est le plus beau dans la vie. C’est pas le but, mais c’est magnifique.

Grande voyageuse (en devenir). Passionnée par la littérature et les langues étrangères. Dévoreuse de chocolat. Amoureuse éperdue de la vie et de la bonne bouffe. "Don't let the seeds stop you from enjoying the watermelon"

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