MUSIQUE

Hell yes ! Hellfest saison 11

La ville de Clisson a accueilli du 17 au 19 juin la 11e édition du Hellfest, un des festivals de métal et de hard rock les plus importants du continent européen, et si la tête d’affiche était pleine de promesses avec des groupes tels que Black Sabbath ou Rammstein, la programmation toute entière était emplie de (re)découvertes musicales  et de surprises qui ont su ravir les quelques 150 000 festivaliers présents durant le week-end. Maze s’y est rendu pour vous ; retour sur un week-end dans les flammes de l’Enfer entre les bières et les cheveux qui tournent dans le vent.

Le groupe danois Volbeat a investi une des deux mainstage et nous a présenté leur gamme de chansons variées, à la frontière entre différents styles musicaux, puisque le groupe s’essaie aussi bien au rock’n’roll qu’à la country, avec par exemple leur titre Sad Man’s Tongue. Si tous leurs albums ont été plébiscités par le public danois, puisqu’ils sont tous disques d’or dans leur pays d’origine, ils semblent également avoir convaincu les festivaliers, même si leur style peut paraitre un poil gentillet pour un métalleux endurci. C’est également devant le public du Hellfest qu’ils ont présenté en live leur dernier album Seal The Deal & Let’s Boogie sorti en juin 2016, avec des titres clés comme For evigt ou encore Seal the Deal.

Au-delà de leurs jongles entre différents styles musicaux, un de leur point fort reste incontestablement la voix unique et puissante de Michael Poulsen, chanteur et guitariste du groupe, qui constitue le liant de toutes les musiques, et qui s’équilibre à merveille avec les solos de guitare et de batterie. Le groupe présente ainsi un ensemble musical diversifié et original avec une touche de mélancolie, parfait pour entamer la soirée et accompagner le coucher du soleil.

For evigt – Volbeat

Dropkick Murphys a directement enchainé et a transporté le public sur un style plus celtique, aux influences irlandaises. Leur arrivée enflammée sur The Boys Are Back est un curieux mélange de punk et de cornemuse qui annonce la couleur : le groupe propose une performance capable d’enchanter même les plus récalcitrants au métal et de faire taper du pied au rythme de leur musique n’importe quel type de public. Ce groupe originaire de Boston est un précurseur du punk celtique et reprend de nombreux airs traditionnels irlandais et importent les sonorités celtiques sur leurs propres compositions. Si leur musique vous rappelle quelque chose, c’est surement grâce à leur titre I’m Shipping Up to Boston, que Martin Scorsese a utilisé pour la bande originale de son film Les Infiltrés en 2006. Le groupe s’affirme donc aussi bien sur la scène traditionnelle que commerciale. Dropkick Murphys envoie une belle énergie à son public, marquée par la volonté de se faire la voix de la classe ouvrière, de laquelle ils sont principalement issus, à travers des musiques telles que Worker’s Song qui commence par « Yeh, this one’s for the workers who toil night and day, by hand and by brain to earn your pay » ou encore 10 Years of Service. Une performance entrainante et rythmée, aux thèmes forts et dont la technique vocale et musicale est impressionnante.

Rose Tattoo – Dropkick Murphys

Rammstein, maître des ténèbres

Le groupe allemand Rammstein s’est saisi de la nuit pour plonger le public dans un véritable spectacle visuel et sonore, avec une scénographie, des costumes et une mise en scène impressionnante –aspect qui manquait un peu dans les groupes précédents. Décompte avant leur arrivée sur la scène, descente des guitaristes sur des plateformes coulissantes et feux d’artifices en rythme avec la batterie, Rammstein était vraiment là pour nous en mettre plein la vue. Ils ouvrent le show avec Ramm 4, un titre extrait de leur prochain album, suivi de Reise Reise et Du Riechst So Gut, et réussissent à maintenir la foule de festivaliers dans une sorte de frénésie “rammsteinienne” d’une heure et demie. Les changements de costume sont nombreux, les mouvements quasiment chorégraphiés et les coups de théâtre sont aussi au rendez-vous ; ils alternent lumières chaudes et lumières froides, ne lésinent pas sur les jets de flammes et de feux d’artifices. A un moment, le chanteur du groupe apparait avec une ceinture d’explosifs à la taille et à la reprise de la batterie se fait péter au milieu de la scène, provoquant un bouquet de flammes, régalant les yeux et les oreilles de chacun dans un véritable show chorégraphié. Pianotant sur toute la gamme de leur répertoire, Rammstein a rejoué les morceaux de ses premiers albums, en passant par les plus connus, tels que Du Hast ou encore Amerika et en présentant également quelques titres de son album à venir. Un groupe à voir en concert sans hésitation !

Du Hast – Rammstein

 

Un samedi de découvertes

Une des découvertes de cette saison 2016 était le groupe Fleshgod Apocalypse, apparu sur la scène du Temple tels des barons du death metal italien. Éblouissants dans leurs grands manteaux de velours, le groupe fascine par la technique impeccablement maîtrisée du son qu’ils proposent, ainsi que la technique vocale, alliant le très grave au très aigu et offrant un panel de sonorités impressionnantes et envoûtantes.

Gravity – Fleshgod Apocalypse

Fleshgod Apocalypse servait un métal cru, non dilué qui contrastait énormément avec ce que produisait Foreigner sur la scène principale en même temps. En effet, le groupe anglo-américain a présenté –entre autres- son fameux titre I Want to Know What Love Is, paru en 1987, toujours avec autant d’émotion dans le public ou encore Hot Blooded. Ce changement de registre prouve en ce sens l’extrême diversité au sein de la programmation du Hellfest, qui réunit à la fois des groupes de styles musicaux très différents mais également de toutes les générations.

I wanna know what love is – Foreigner

Un des incontournables de la journée était Joe Satriani, le guitariste légendaire avec quinze albums solos au compteur. En contraste avec ce qui avait été proposé jusque là, il a transporté les festivaliers pendant quasiment une heure avec sa performance technique pleine de fluidité et de virtuosité, qui a permis de recentrer également l’attention sur l’aspect instrumental pur et dur de la musique rock.

Surfing the Alien – Satriani

La deuxième grande découverte de ce Hellfest était surement le groupe d’origine britannique The Toy Dolls. Même si ce groupe punk a connu de nombreux remaniements depuis sa création, les trois membres du groupe aux cheveux colorés et lunettes teintées, dotés d’une énergie hors du commun presque enfantine, ont su enflammer la scène de la Warzone. En rupture avec le punk traditionnel, ils s’éloignent des thèmes historiques contestataires pour s’adonner davantage à l’aspect festif, joyeux et quasiment espiègle du genre musical. Les titres qu’ils ont joué représentent bien l’atmosphère de légèreté et d’allégresse qui régnait pendant le concert, par exemple Nellie the Elephant, Dougy Giro ou encore Harry Cross, dont la plupart sont en réalité la reprise et l’adaptation de comptines pour enfants. La magie opérait largement sur les festivaliers qui se sont alors transformés en grands enfants et ont lancé les copeaux de bois qui recouvraient le sol pour recréer une sorte de feu d’artifice géant sur l’ensemble de la Warzone.

Dougy Giro – Toy Dolls

Le show de la soirée du samedi était assuré par les Twisted Sister, groupe de heavy metal américain, légendes vivantes puisque le groupe nait en 1972. Les sœurs tordues se sont décidées à faire leurs adieux à la scène sur celle du Hellfest et pour leur dernier concert elles ont tout donné. Dee Snider, le charismatique chanteur du groupe s’est transformé en véritable showman pour enflammer la scène principale et entrainer tout le public sur leurs chansons, en passant de What You Don’t Know, à You Can’t Stop Rock’n’roll, mais encore We’re not gonna take it avec un mot d’hommage aux victimes des attentas récents. Avec une énergie de folie, le groupe a charmé le public qui chantait, tapait dans ses mains tous les airs entrainants qu’il produisait à tel point que Dee Snider a été capable de tenir 15 minutes avec une seule et même chanson, I Wanna Rock, pour le plus grand plaisir des festivaliers.

I wanna rock – Twisted Sister

Une édition en homage à Lemmy

C’est également Dee Snider qui a accueilli, non sans émotion, Phil Campbell, le guitariste de Motörhead, invité d’honneur de cette édition du Hellfest en hommage à la disparition de Lemmy Kilmister. Ensemble ils ont chanté Shoot ‘Em Down, un titre clé qui remet à l’honneur le lien qui unissait Twisted Sister à Motörhead puisque le groupe de Lemmy Kilmister avait interpreté ce titre dans l’album Twisted Forever, un album hommage au groupe des Twisted Sister qui reprenait les musiques, puis toutes les lumières se sont éteintes. Un immense feu d’artifice a éclaté, illuminant tout le site du Hellfest et des vidéos en hommage à Lemmy Kilmister ont défilé sur les écrans géants, notamment celles de ses passages aux éditions précédentes du Hellfest. Cette  séquence émotion qui a duré près d’une heure, laisse un souvenir ancré dans les esprits des festivaliers, dont certains ont même lâché une larme.

Shoot Em’ Down – Motörhead

Un dimanche sans la messe

Tarja Turunen était l’une des figures les plus étonnantes du Hellfest. Une des rares femmes à s’imposer sur la scène principale accompagnée de ses musiciens, cette soprano de metal symphonique a proposé une gamme de chansons pour le moins originale. Et si ses compositions ne plaisent pas à tout le monde, elle a au moins le mérite de proposer un type de son différent qui mélange les sonorités du métal à celles de l’opéra. Elle assure son show avec une présence incontestable et la montée en puissance de sa voix envoûte le public qui répondait avec ferveur dès qu’elle haranguait la foule.

A découvrir !

Innocence– Tarja Turunen

Gojira s’impose ensuite sur la scène principale et présente quelques sons de son dernier album Magma fraichement paru, notamment Stranded. Ce groupe français de death metal enflamme l’ambiance en pleine après midi et prend aux tripes tout son public qui ne cesse de pogoter et de slamer. Leurs textes écrits en anglais leur on permis de s’assurer une certaine popularité à travers le monde et notamment aux Etats-Unis et comportent généralement une certaine profondeur autour des thèmes de la vie et de la mort, le corps ou la nature, leur technique musicale parfaitement maitrisée permet de donner à entendre leur chanson comme un cri qui touche le public au cœur. C’est donc au son de Flying Whales ou encore de The heaviest matter of the universe que le groupe a fait vivre son public, retraçant une vision d’ensemble de leur carrière.

Stranded – Gojira 

Des hommes barbus aux cheveux longs, une voix rauque et puissante, des têtes de dragons qui crachent du feu et un hommage à la bière avant Raise Your Horns, le groupe Amon Amarth nous transportait tout droit au pays des vikings. Avec une scénographie et des décors sans cesse en mouvement et pour le moins surprenant, ce groupe de death metal suédois s’est révélé dynamique, impressionnant et très charismatique par leurs choix et leur image assumée de vikings mal léchés. Le chanteur du groupe, Johan Hegg interprète d’ailleurs le rôle d’un viking surnommé Valli dans le film Northmen : Les Derniers Vikings sorti en 2014. Un style musical qui peut paraître agressif aux premiers abords mais que les vocalises de Johan Hegg viennent envouter d’un esprit celtique que les instruments amplifient et entrainent même les festivaliers les plus réticents.

First Kill – Amon Amarth

Le plus grand show du Hellfest revient surement – en compétition avec celui de Rammstein – au groupe sataniste Ghost d’origine suédoise. Complètement masqués, les musiciens, surnommés “Les Ghouls sans nom”, sont dirigés par Papa Emeritus, un pape sataniste qui prône le vice à la vertu et dont l’identité des membres est toujours inconnue. Leurs chansons aux paroles satanistes ne cessent d’adorer Satan et de lui rendre hommage, comme par exemple le titre Year Zero dont le refrain énonce les différents surnoms de Satan. Leur mise en scène tient également de la pure provocation  à l’encontre de la religion : sur Body and Blood Papa Emeritus fait entrer une quinzaine de nones plus sexy que chastes qui distribuent hosties et préservatifs au public. Mais la provocation passe également par la présence d’un chœur composé d’enfants sur le titre Monstrance clock, qui amplifie la dimension malsaine et vicieuse de la musique en elle même. Un groupe qui ferait criser la tête de liste FN aux régionales de 2015 Pascal Gannat, qui souhaitait remettre en cause les subventions de la région au festival à cause de ses “errements” qui consistaient à inviter des “groupes de rock faisant clairement l’apologie de la christianophobie”. De quoi faire sourire Papa Emeritus qui assume l’image de son groupe jusqu’au bout et a même envoyé au public des brassées d’un pseudo dollar à son effigie comportant le chiffre 666 en guise de souvenir. Ce groupe aux influences pop a donc transporté son public dans les flammes de l’enfer, avec des changements de costumes nombreux et des musiques entraînantes desquelles on ne se lasse pas.

From the Pinnacle to the Pit – Ghost

Les flammes de l’Enfer en deviendraient presque attirantes

Le Hellfest se révèle aussi surprenant que palpitant ; le partage et convivialité sont mots d’ordre des trois jours de festival et le travail colossal des organisateurs permet une ambiance détendue et festive. Le Hellfest c’est aussi des tas d’activités sont mises en place à côté des scènes : une immense tyrolienne tendue au dessus des deux scènes principales, une grande roue, un barbershop prêt à ratiboiser barbe et cheveux à toute heure de la journée gratuitement. C’est tout d’abord un parc de festival entièrement designé par des plasticiens, au décors exceptionnel qui donnent l’impression de déambuler dans une petite ville hors du temps, un genre de Disneyland version dark.

Ces trois jours de festival ont eu le mérite de remplir nos oreilles de sons démoniaques, et de nous faire découvrir le métal sous un autre angle puisque tous les groupes présents au Hellfest ont le mérite d’être doués d’une technique musicale irréprochable et impressionnante et d’une grande capacité vocale. Cette reprise de la chanson Sound of Silence de Simon & Garfunkel par le chanteur du groupe Disturbed démontre bien l’immense potentiel de sa voix à s’étendre à différents registres.

Sound of Silence – Disturbed 

C’est grâce à toutes ces qualités que le Hellfest est devenu très rapidement un des festival de metal les plus fameux d’Europe, pour lequel les festivaliers des quatre coins du monde se pressent. Et même si tous les pass trois jours vendus sur places sont déjà épuisés, restez attentifs la vente des billets arrive bientôt et s’écoule à la vitesse lumière. La seule alternative reste le site Zepass pour acheter des billets d’occasion tout en évitant les risques du marché noir.

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