CINÉMA

Annabelle – Une poupée, un raté

“Mais qui diable voudrait offrir une telle poupée ? !” C’est ce genre de question pas sérieuse qui nous habite avant même d’avoir vu le film. Insipide, faux, raté : voici les quelques adjectifs que j’utiliserai en premier lieu pour qualifier ce film qui surfe littéralement sur le succès qu’avait connu The Conjuring en 2013. En quelques mots, le film raconte l’histoire de John et Mia, deux jeunes mariés qui attendent un bébé. John offre à Mia une poupée que celle-ci adore plus que tout. Mais après avoir été agressée par une secte satanique, la vie paisible de ces jeunes gens prend un autre tournant et “l’adorable” poupée devient encore moins sympathique qu’avant ! Et à part l’évocation de ceux-ci, les personnages d’Ed et Laurraine Warren ne sont pas présents.

Le scénario lui même pose déjà problème : il correspond parfaitement à un schéma vu et revu qui commence sérieusement à s’essouffler. Mais ce n’est absolument pas de la faute des scénaristes puisque figurez-vous qu’une fois de plus c’est tiré d’une histoire vraie ! Tremblez mesdames et messieurs devant une horreur authentique et véritable ! Ça aussi c’est une formule qui s’essouffle ou du moins qui ne peut pas se suffire à elle-même : un film ne peut pas fonctionner uniquement sous prétexte que son histoire est “vraie”. Ici, la jauge d’originalité du film est très basse, le scénario nous fait croire que nous avons déjà vu ce film à tel point il est commun. Le découpage du film est lui aussi très moyen. Ici, en plus du fait que l’histoire même est prévisible, les plans et les actions des personnages sont téléphonés au plus haut point. Peut être sommes nous trop contaminés par les codes horrifiques modernes ? La plupart des gens vont voir un tel film pour avoir peur, pour se faire peur. Evidemment vous allez à plusieurs reprises sursauter, mais cela est tellement toujours amené de façon évidente que nous sommes perpétuellement dans une phase d’attente d’une image grotesque, surgissant rapidement accompagnée de violons stridents ! Cela fonctionne à 99 % du temps : un plan général décrivant une pièce, ce plan dure et permet au spectateur d’ausculter la pièce sous toutes ses coutures jusqu’à qu’une porte s’ouvre toute seule pour laisser surgir l’iconique figure de la petite fille flippante ! Et vous êtes bien sûr aidés par la musique qui sert à la montée en tension. Encore une fois, un film ne peut pas compter que là dessus. En fait, on a plus l’impression d’être face à une attraction que face à un film.

Mais tout cela fonctionne à merveille ! Vous n’allez peut être pas avoir peur, mais le sursaut est au rendez vous. Il y a néanmoins quelques séquences plus travaillées que d’autres ou du moins plus réussies comme par exemple la scène de l’ascenseur. Mais honnêtement rien de marquant ou de véritablement original.

Courtesy of Warner Bros. Picture - Droits Réservés

Annabelle/Courtesy of Warner Bros. Picture – Droits Réservés

Là où le film est un peu audacieux c’est dans le fait de nous montrer clairement la figure du démon. Habituellement, tout ce qui est monstre, alien, fantôme, démon, n’est pas montré dans son entièreté à l’écran pour permettre au spectateur d’y croire plus facilement car c’est son imagination qui reconstruit la partie manquante de la créature. Et cela semble assez logique qu’il soit difficile de montrer quelque chose qui n’existe pas. Evidemment, certains films ne fonctionnent pas comme cela, comme par exemple District 9 qui nous montre entièrement les extraterrestres, mais c’est, dans ces cas ci, la force du film. Au contraire, dans Alien, le monstre est terrifiant car nous ne le voyons pas ou très peu (sauf à la fin, ce qui d’ailleurs casse le procédé). Dans les films d’horreur, maintenant, le démon est souvent montré comme une ombre. C’est d’ailleurs la formule qui est utilisée dans The Conjuring. Mais dans Annabelle donc, le démon nous apparaît effectivement clairement  à l’image. Et c’est sans doute un point fort car c’est inattendu et peu commun (actuellement). Reste à savoir si ça marche… D’autre part, le réalisateur, John R. Leonetti, explique aussi dans une interview qu’il pense que la poupée d’Annabelle fait beaucoup plus peur que Chucky dans Chucky 3, film dans lequel il était à la photographie. Annabelle fonctionnerait mieux, grâce au fait qu’elle est statique et que donc elle existe mieux, elle est plus réelle. Peut-être ; en tout cas une poupée fonctionne de toute façon assez bien car elle fait partie de ces objets rapidement inquiétants naturellement.

Un film donc très décevant et qui ne ressemble en rien à du cinéma. C’est une attraction à but purement lucrative et la fin du film semble d’ailleurs nous annoncer un probable troisième volet de la série. Il n’est en tout cas pas étonnant de voir que le film n’est pas signé James Wan mais John R. Leonetti qui ne nous a pas franchement marqué pour l’instant avec ses précédents films.

 

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