CINÉMAFestival de Cannes

« Jeune femme » – Vers la liberté

Copyright Shellac

Le premier film de Leonor Séraille annonce un futur prometteur à sa réalisatrice. Sélectionné dans Un Certain Regard à l’occasion du 70e Festival de Cannes, Jeune femme est interprétée par Laetitia Dosch qui, on peut le dire, transperce l’écran par son jeu. Une agréable révélation et un délicieux portrait de femme, lauréate de la Caméra d’or 2017, qui récompense le meilleur premier film.

Paula était retenue en cage par son professeur avec qui elle vivait depuis environ 10 ans. De retour à Paris, celui-ci libère cet oiseau sauvage en la mettant à la porte. La jeune femme, qui était la muse de ses photographies, n’accepte pas cette rupture et se retrouve donc seule avec un chat dans un carton sous le bras. Elle est livrée à elle-même dans la jungle parisienne. Le film s’ouvre sur une scène puissante, le personnage de Paula est déconnecté de la réalité et ne cesse de brailler face à la caméra. Alors que toutes les portes se ferment sur son passage, Paula va se laisser porter au rythme de ses tribulations. Elle tente de renouer avec sa mère à qui elle ne parlait plus depuis plusieurs années. La trentenaire va devenir progressivement la femme qu’elle doit être grâce aux rencontres improbables qu’elle fait et aux responsabilités qui vont lui tomber dessus.

“Qu’est-ce que je peux faire ? J’sais pas quoi faire”

Cette célèbre citation de Pierrot Le Fou de Jean-Luc Godard, semble définir à elle seule le personnage qui n’a jamais rien fait de sa vie en dehors de poser pour son ex-compagnon. Mais contrairement à Anna Karina, le personnage incarné par Laetitia Dosch va au fil des événements et inconsciemment partir en quête d’elle-même en traversant tous les obstacles qui s’opposent à sa liberté. Elle traverse pourtant avec peine cette crise de la trentaine. Mais si elle est paumée, Paula n’a aucun filtre, elle ne ressemble à personne d’autre. Ça faisait longtemps que l’on n’avait pas vu – surtout dans un premier film – un personnage aussi unique en son genre, apporter une telle dynamique à lui seul, un véritable électron libre. Son énergie fougueuse et sa sensibilité se communiquent au spectateur qui prend plaisir à la voir gesticuler à l’écran. Et si le scénario, qui parfois tourne malheureusement un peu en rond, peint le portrait classique de cette femme en crise identitaire digne d’un roman d’apprentissage, c’est en réalité la représentation de toute une génération en crise qui vit dans la précarité que nous présente la jeune cinéaste.

Le regard authentique que pose Leonor Séraille sur Laetitia Dosch est fascinant car c’est surtout grâce à la performance incroyable de cette dernière que le film se démarque. Deux femmes à suivre.

J'entretiens une relation de polygamie culturelle avec le cinéma, le théâtre et la littérature classique.

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