CINÉMAFestival de Cannes

Cannes 2018 – « Gueule d’ange » : révélations

Pour son premier long-métrage, Vanessa Filho se penche sur un sujet complexe : la survie d’une petite fille abandonnée par sa mère. N’évitant pas l’inégalité inhérente à un premier essai, le film révèle un duo très touchant entre le comédien Alban Lenoir et la très jeune Ayline Aksoy-Etaix.

Dès les premières minutes du film, on comprend que Marion Cotillard y incarne une mère alcoolique, volage, au physique de cagole. Après une soirée en boîte de nuit, elle va suivre un inconnu et abandonner sa fille Elli, livrée à elle-même. Bien qu’elle gémisse beaucoup, l’actrice excelle (comme souvent) dans ce rôle étonnant. Cependant, le film prend davantage d’ampleur quand son personnage disparaît du cadre. Car la vraie révélation c’est l’extraordinaire Ayline Aksoy-Etaix. Seule et en manque d’amour, la petite fille va se prendre au jeu de l’imitation et commencer à enchaîner les verres. Vanessa Filho a l’audace d’aborder frontalement l’alcoolisme enfantin. Moquée par ses petits camarades d’école à cause de ses frasques, Elli tente de survivre en jouant à l’adulte. Elle rencontre un ancien plongeur solitaire campé par le lumineux Alban Lenoir auquel elle va s’attacher comme à un père de substitution. La réalisatrice nous offre alors des scènes de ce bouleversant tandem d’êtres esseulés.

Vanessa Filho s’attarde sur ses acteurs offrant de jolis gros plans détaillant les corps. Si il n’y a rien à redire des dialogues co-écrits avec l’écrivain Diastème, Gueule d’ange possède les défauts et les fragilités d’un premier long métrage. Après une première partie très réaliste, la réalisatrice fait le choix d’une mise en scène fantasmagorique qui peinent à convaincre. Par cette esthétique artificielle, parfois trop contemplative, le sujet du film perd de sa pertinence et glisse parfois vers un certain pathétisme mélodramatique. L’écriture du film insiste maladroitement sur des instants de vie répétitifs pour nous faire comprendre la psychologie de ces personnages. La réalisatrice tourne en rond autour de son récit sans parvenir à rester au coeur de sa substance. Tout compte fait, il ne finit par rester que ces moments de grâce où Ayline Aksoy-Etaix crève l’écran.

J'entretiens une relation de polygamie culturelle avec le cinéma, le théâtre et la littérature classique.

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