ART

Les mamies graffeuses de Lisbonne

Qu’ils aient 65 ans (l’âge légal du départ à la retraite au Portugal) ou 100 ans, tant qu’ils le peuvent encore ces retraités arpentent les rues de Lisbonne, une bombe de peinture à la main, à la recherche du meilleur spot à graffer. Ce gang de seniors, les « Lata 65 », est une initiative de Lara Seixo Rodrigues et Fernando Mendes qui tentent de rompre la solitude et l’isolement dont est victime un retraité sur quatre au Portugal et de mettre de la couleur dans leurs vies en proposant plusieurs ateliers de Street Art.

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© LATA 65 / Rui Gaiola

Lara Seixo Rodrigues, à l’origine du projet, nous répond.

Comment le projet a-t-il commencé ?

L’idée est venue en 2012 d’une manière curieuse et assez rapide lorsque nous étions assis autour d’un café avec Fernando Mendes près du LXFactory (centre d’art à Lisbonne).

Il a toujours été un adepte de l’œuvre de WOOL – Covilhã Urban Art Festival (né en 2011) où nous avons été plusieurs fois et où le « public » a passé beaucoup de temps à suivre notre travail, ici et dans plusieurs villes comme Covilhã, Coimbra, Figueira da Foz, Abrantes … Nous avons remarqué que les personnes du public les plus curieuses, celles qui voulaient connaître tous les détails sur les peintures, étaient principalement les personnes âgées.

C’est dans ce café qu’il m’a défiée de faire un atelier pour eux et ma réponse affirmative a été immédiate. En 15 jours, nous avons créé le premier atelier d’art urbain pour personnes âgées.

À ce moment, personne n’y croyait ni ne comprenait le projet et notre désir de le faire, nous avions juste des intentions (plus que des objectifs) pour prouver l’importance de concepts tels que le vieillissement actif et la solidarité intergénérationnelle. Nous voulions démontrer que l’art urbain a le pouvoir de fomenter, de promouvoir et de valoriser la démocratisation de l’accès à l’art contemporain. Nous voulions rapprocher les moins jeunes d’une forme d’expression artistique généralement associée aux plus jeunes : nous voulions démontrer que l’âge n’est qu’un nombre…

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© Rafael Marchante

Que pensez-vous de ce genre d’art en général ?

Je pense que l’art de la rue est un puissant instrument de démocratisation de l’art et de changement économique, culturel et social des villes et des communautés (ma part d’architecte parlant et observant). On voit chaque jour des dizaines d’exemples de choses que l’on peut observer dans la rue, des petits projets, actions, qui nous parlent. C’est ce que cette forme art me fait ressentir.

Comment quelqu’un peut-il joindre le projet ?

LATA 65 est un atelier, pas un crew. Nous avons tendance à travailler avec des personnes différentes à chaque fois que nous faisons l’atelier. Parfois certains de nos « étudiants » de leur côté, juste pour le plaisir. La seule condition est d’avoir plus de 65 ans et donc d’être à la retraite.

Que signifie « Lata65 » ?

« Lata » veut dire « bombe de peinture » en portugais et 65 et l’âge minimal de nos participants.

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© Rafael Marchante

Où taguez-vous ?

Nous choisissons des rues, des murs, mais nous devons demander la permission avant de pratiquer.

Comment voyez-vous l’avenir de « Lata 65 » ?

Mon plus grand espoir (même si cela me causerait du chagrin d’un autre côté) est que les villes, les familles, les gouvernements, les gens en général, tous … regardent et réfléchissent au problème du vieillissement et tous les problèmes qui s’y rattachent et que les ateliers ne soient plus « nécessaires ». En attendant nous devons prendre soin de ces personnes le plus possible.

Depuis son lancement en 2012, “Lata 65” a déjà formé plus de 250 artistes de rue du troisième âge à Lisbonne et à travers tout le pays.

Et vous, que comptez-vous faire après la retraite ?

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