ART

Quand les artistes envahissent l’espace urbain montréalais

Des petits chapiteaux blancs longent chaque côté de la rue Sainte-Catherine devenue piétonne le temps de la saison estivale. Qu’importe le manque de clémence de la météo ce jour-là, les exposants étaient bien au rendez-vous en ce 1er juillet, également synonyme de fête nationale du Canada. Durant cinq jours, 160 artistes et performeurs ont occupé l’espace rue Saint-Catherine, dans le cadre du festival Mtl en Arts. Entre les croisements St-Hubert et Papineau, retour sur un événement inspiré et inspirant.

Mtl en Arts a vu le jour au courant de l’année 2000 avec une motivation précise : aider les artistes en leur apportant davantage de visibilité. Un but honorable alors que visibilité est synonyme de difficulté, souvent due à un manque de contacts et de moyens. Mtl en Arts permet ainsi de découvrir de nombreuses œuvres, alors exposées dans l’un des lieux les plus fréquentés de la ville. L’occasion pour les exposants et performeurs venus du monde entier de parler de leur travail, se faire connaître, raconter leurs parcours et parfois même vendre quelques œuvres. Ces quelques jours d’exposition à ciel ouvert permettent au public de se sensibiliser à l’art, de découvrir des artistes émergents ou plus connus. Le genre d’événement qui permet une démocratisation de la création artistique, en somme. Les œuvres sont ainsi accessibles, le temps d’une balade, sur la rue commerçante la plus importante de Montréal. Le public, qu’il soit averti ou pas, découvre ainsi les peintures, sculptures, graffitis, photographies et performances, ainsi que les artistes eux-mêmes. En effet, ces cinq jours de festival sont l’occasion idéale d’aller à leur rencontre, les exposants étant toujours disponibles et ravis de parler de leur travail, d’expliquer leur démarche artistique.

Parmi les coups de cœur de cette 16ème édition, Jimmy Baptiste, artiste montréalais, dont les influences proviennent des milieux urbains où il a développé une grande passion pour le graffiti. Il puise également son inspiration dans le vaste monde du tatouage et des bandes dessinées. Un univers palpable à travers ses œuvres, en noir et blanc ou très colorées et dont les contours tracés vacillent entre force et délicatesse. Une passion pour la création artistique que l’artiste, qui confie avoir le « rêve de graffer les murs d’une galerie un jour », s’efforce d’ailleurs de transmettre aux jeunes générations à travers le Programme Graffiti.

Voisin de Jimmy Baptiste durant cette exposition à ciel ouvert, le second coup de cœur de cette édition est le travail du Canadien Tony Taylor. Originaire d’Uxbridge en Ontario, cet artiste engagé a beaucoup voyagé, notamment en Europe, où il a puisé une grande inspiration pour son travail. Durant ses voyages, son intérêt se porte sur la façon dont les sujets majeurs de l’actualité politique, tels que les élections à Dublin, l’économie à Berlin ou encore la corruption à Athènes, sont traités par les artistes. Dans son travail, il traite ces sujets en peintures, inspiré par les images diffusées par les médias lors d’événements politiques majeurs, qui réunissent les têtes des plus grandes puissances mondiales. Ces têtes justement, deviennent ici têtes animales, symboles de cette « jungle » qu’est la réunion politique. Le choix des animaux pour chaque personnalité politique est réalisé selon plusieurs critères, tels que le symbole représentatif d’un pays, où le caractère respectif de ces leaders politiques. Il interroge ainsi les langages du corps de ces individus, leurs attitudes, alors qu’ils sont en situation de communication, d’interaction, et sous les feux des projecteurs du monde entier.

Des têtes d’animaux et des corps humains, mais dans un style et une démarche complètement différente avec le travail de l’artiste Marie-Hélène Pierre, qui interroge la relation entre la nature et l’être humain. L’artiste peint, fait des collages sur panneaux de bois, avec une passion équivoque à un engagement pour la cause des espèces animales menacées. Elle explore cette relation de plus en plus complexe que l’on entretient avec la faune. Les animaux sont êtres humains, les êtres humains sont animaux. Un lien finement tissé entre nature et humanité, haut en couleur, composé de mélanges de matières et de textures. Les animaux représentés sont souvent ceux qui sont actuellement en danger d’extinction, à l’exemple du tigre et du panda, et leur attitude humaine dans ces œuvres ne laisse pas indifférent.

Un dernier coup de cœur, et non des moindres, pour le travail de Félix Girard. Cet artiste, qui use des matériaux traditionnels tels que les pinceaux, l’aquarelle et la peinture acrylique, a découvert le dessin et la peinture dès son enfance. Il puise alors ses premières inspirations dans l’atelier de ses parents, également artistes peintres, puis dans les bandes dessinées et dans la forêt. Ses œuvres se situent dans un entre-deux, entre réalisme et simulacre. Son attraction pour les branches, l’automne et les personnages tortueux emporte le spectateur dans une dimension lointaine, dans un univers magique par lequel on se laisse volontairement absorber…

Amoureuse de photographie, curieuse, passionnée par l'infinité du monde de l'art et aussi très intriguée par la complexité du monde politique.

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