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Avignon 2017 : Mon Olympe et merveilles

Pourquoi j’ai honte quand je dis que je suis féministe ? Telle est la question matrice du spectacle, écrit par les talentueuses autrices Gabrielle Chalmont et Marie-Pierre Boutin, qui se joue du 7 au 30 juillet au théâtre des Corps Saints à Avignon, à 22h20. Une question qui en cache bien d’autres.

Cinq jeunes femmes étudiantes en sociologie discutent et disputent féminisme. Les comédiennes (Sarah Coulaud, Jeanne Ruff, Claire Bouanich, Maud Martel et Louise Fafa) prennent le sujet à cœur, et y mettent toutes leurs tripes, tant et si bien qu’on a envie de les rejoindre. Leur jeu est d’une grande qualité (et pour cause, elles sont toutes issues de l’école Claude Mathieu et ont toutes joué dans des long-métrages, comme Le Papillon ou Jeune et jolie). Leur énergie ne baissera pas durant l’heure et demie que dure le spectacle. Durée pendant laquelle elles tentent de dédiaboliser le féminisme (et aussi pendant laquelle elles twerkent. Ou elles bootyshakent. On ne sait plus. Allez voir la pièce pour de plus amples précisions sur la différence).

“Pourquoi le féminisme est devenu has been, choquant, ou même dangereux ?”

Et s’il fallait s’attaquer au monstrueux dossier : l’éducation ? (La réunion se passe dans un jardin d’enfant, comme un signe…) Et si c’était le harcèlement de rue le vrai problème ? Et si c’était un féminisme de bourgeoise blanche ? Et si nos mères avaient déjà tout fait ?

« Olympe de Gouges disait ”Femme, réveille-toi”, aujourd’hui mes copines et moi on dit que l’urgence est de ne pas s’endormir. »

Et s’il fallait davantage accueillir les hommes, être plus sociable ? “Je ne veux pas être sociable, je suis énervée !” rétorquera l’une d’entre elles. La colère décrédibilise leur cause, toutes s’accordent à le dire. Et pourtant, la pièce est un fabuleux pied de nez qui envoie valdinguer sans scrupules ceux qui ne rêvent que de petites filles sages. Au feu les a priori, les personnages sont souvent dingues, parfois agressives, toujours intelligentes. Elles présentent l’avantage d’être également très drôles. On est hilare face au tempérament fougueux de Lucie, on est bouleversé lorsqu’elle égrène les statistiques désastreuses de la situation actuelle des femmes : l’humour et le sérieux sont au rendez-vous. Mais elles sont surtout énervées et elles le crient bien fort. Chacune à leur manière. Peu à peu, des singularités se détachent au milieu du grand fourre-tout que peut être le féminisme aux yeux de la société. On en apprend un peu plus par le biais de jeux d’ombres et de lumières remarquablement bien amenés. L’alternance entre la discussion et ces passages symboliques individuels mais aussi parfois collectifs et parfois dansés rythme la pièce. La scène de la danse du feu est une pépite. La discussion quant à elle, présente l’avantage de ne pas ressembler à une leçon de morale sur une conception unique du féminisme. Bref, la mise en scène est donc une réussite. Mon Olympe est une tribune pour toutes les jeunes femmes de la vingtaine.

Bref : vivant, surprenant et intelligent, le spectacle  invite délicieusement à venir féminister avec la Compagnie des 1000 printemps ! Ça tombe bien, pour celleux qui ratent Avignon, le spectacle se rejoue à l’espace Icar à Issy-les-moulineaux en octobre 2017 et du 14 novembre au 3 décembre au théâtre Douze, à Paris.

Rédactrice Maze Magazine. Passée par Le Monde des Livres.

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