ART

Jimi Nowas, le graffeur rebelle devenu raisonnable

A la Maison pour tous André-Chamson de Montpellier, Jimi Nowas expose ses toiles. Une manière de poursuivre son art autrement, en plus de ses graffitis dans les rues montpelliéraines. Pour sa première édition, le festival « Art 2 rue » fait la part belle aux cultures urbaines. L’artiste partage le lieu avec un public scolaire, d’à peine son âge lorsqu’il a commencé.

A 35 ans, Jimi Nowas a 25 ans de carrière derrière lui. « Déjà au collège, je faisais des lettrages sur mon cahier de texte », sourit-il. Sous l’influence de ses aînés, élèves de troisième, ses esquisses deviennent des graffitis. Les pages de ses cahiers deviennent soudainement trop étroites. Il choisit alors de s’exporter sur les murs de la ville. C’est la naissance de HONK.

Il est âgé de 12 ans lorsqu’il trouve son pseudonyme. A cette époque, il est inspiré par des auteurs de bande dessinée comme Bilal, Vaughn Bodé ou Manara. Il part alors à la recherche de « son trait ». La pochette d’album de Bad de Michael Jackson et le magazine 1tox, dédié aux cultures de la rue, sont autant d’influence pour le jeune artiste.

Mais le temps passe et HONK se lasse. Il devient plus sérieux et souhaite « vivre bien dans la société ». Il décide de laisser les peintures illégales à ses confrères pour se tourner vers « un travail plus mature ». Fort de ses relations dans le milieu, notamment des artistes locaux (Spleen), il entame des collaborations avec des rappeurs américains (Inspectah Deck des Wu Tang) et réalise leurs pochettes d’album. C’est la renaissance pour Jimi Nowas.

Désormais père de famille, il préfère les toiles aux murs. Toujours à la recherche de nouveauté, il évoque aujourd’hui son projet de bande dessinée, « et chaque tome serait associé à de la musique ». Si l’aspect Comics le séduit, il reste terre-à-terre. Pour lui, pas question de créer des univers fantastiques ! « Je veux des histoires vraies, urbaines ».

Le trait au gré des rues

Jimi Nowas a évolué au rythme de l’évolution de sa ville. Cité du rock’n’roll, Montpellier a été bercée par une influence punk contestataire. Dans les années 1980, elle subit l’influence d’un mouvement hip-hop qui inspirera les nouvelles générations. Cet esprit contestataire underground sera à l’origine d’une ébullition artistique dans les rues de Montpellier. Il se souvient de certains moments dangereux, passés à tagguer dans le Verdanson : « Il valait mieux avoir une batte sur soi ».

Témoin de la métamorphose de Montpellier ces trente dernières années, Jimi Nowas a pu voir le rôle du graffeur évoluer dans la société. Les artistes de rue se retrouvent aujourd’hui dans deux catégories distinctes unies par la volonté de faire passer un message. « Il y a les graffeurs de rue et les street-artistes, plus rangés ». S’il a mis de côté sa personnalité d’artiste rebelle, il avoue « avoir le cul entre deux chaises ». « Je n’oublie pas d’où je viens », ajoute-t-il.

« Une ville sans tag ni rébellion est une ville muette »

Entre la façon de faire des graffeurs des années 1980 et ceux du XXIe, la différence est visible. « A mon époque, une bombe aérosol était précieuse. On ne l’utilisait pas n’importe comment ». Il regrette la surconsommation des bombes vidées à outrance, telles des armes artistiques, disponibles à profusion. Pour l’artiste montpelliérain, ce qui pose parfois problème aujourd’hui dans ce milieu artistique, c’est le manque d’authenticité. « Quand j’ai commencé, les gens respectaient les tags des artistes, raconte-t-il. Aujourd’hui, leur durée de vie est plus courte. Même quand ce sont ceux des grands artistes, ils finissent par disparaître ou par être recouverts. »

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