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Skateboard : du sport à l’art de vivre

Autrefois destiné à rester en marge de la société, le skate s’est imposé comme un sport à part entière, voire un style de vie. Présent dans la musique ou la mode, il opère un retour en force marqué de nouveaux codes et enjeux.

Des chansons du rappeur Lomepal aux nouvelles tendances vestimentaires, le skateboard envahit chaque jour un peu plus nos vies. A Lyon, un musée dédié à la planche va ouvrir ses portes. La place de la République à Paris est un spot incontournable. Ce sport, quelque peu fermé en apparence, semble opérer un retour en force ces dernières années. Plus encore, il tend à gagner en importance et à s’institutionnaliser, rompant alors avec sa logique marginale initiale. Depuis 2016, le skateboard est un sport olympique, mais au-delà de cette décision, il demeure un vecteur d’identité et porte une culture unique.

 

Né loin des arènes olympiques

Le skateboard naît à la fin des années 1950 aux Etats-Unis, en Californie. Initialement intitulé « roll-surf », il s’inspire, comme son nom l’indique, de son cousin, déjà bien implanté sur la côte ouest. L’idée était de trouver les mêmes sensations de glisse sur le sol que sur l’eau. Ainsi a été foulé le bitume, à l’aide de roues en métal et d’une planche en bois. De fil en aiguille, le skate devient sport et fait l’objet d’un premier contest dans les années 1960, en Californie (ça ne s’invente pas). Car oui, s’il y a bien une chose qui est restée depuis sa création, c’est la terminologie anglo-saxonne qui inonde cet univers. Autant de tricks comme le ollie avec une board n’auraient pu prendre telle ampleur sans le langage universel qu’est l’anglais. Puis, comme tout autre art ou sport, le matériel s’améliore, la technique s’aiguise et les performances explosent. Ainsi naissent certaines figures telles que le ollie ou le flip, et deviennent modèles des skateurs tels que Tony Alva et Tony Hawk.

L’ascension du sport ne s’arrête pas là. Le skate, qui exprime une volonté rebelle de défier les lois de la gravité et les codes de la société, a depuis quelques années changé de camp, du moins pour certains. Devenu sport olympique en 2016, il fera son entrée dans la cour des grands aux Jeux olympiques de Tokyo en 2020, avec son lot de nouveaux codes. Et l’évènement divise. Certains peuvent y voir une reconnaissance du skate comme un sport à part entière tandis que d’autres peuvent regretter la liberté du skate comme mode de vie, tenant tête à tout autre dogme. Les sponsors et autres financements, également, font grandir le skate mais entravent l’esprit libertaire qui y est lié.

Crédit : French Fred.

L’habit ne fait plus le moine

Au-delà des performances et des tricks, le skate se revendique comme un véritable way of life (mode de vie) comme on dit en Californie. C’est être différent des autres que de skater, aller plus vite, slalomer et imposer un style. Un style vestimentaire pour commencer. Entre confort et identité, les codes sont assez universels. Et au-delà de la pratique du skate, ils sont devenus une mode, qui revient en force de nos jours. La traditionnelle paire de Vans, usée par la planche des skateurs, est aujourd’hui à nouveau sur tous les pieds. Les sweat-shirts Thrasher, du magazine du même nom, se portent comme un must have, à l’instar des chaussettes de sport, portées le plus haut possible aux chevilles. Ces vêtements, autrefois marqueurs de l’identité des skateurs, sont devenus tendance chez les jeunes générations. Mais au-delà de l’habit, ce pouvoir d’expansion s’avère parfois politique et ce style de vie , souvent moqué peut s’avérer utile.

Éduquer par la ride

C’est le cas de l’organisation non-gouvernementale Skateistan, autrement dit le lieu du skate, qui a vocation à améliorer l’éducation de jeunes à travers la pratique du skate. Pour les enfants défavorisés ou handicapés, sont mises en place des heures de discussion en classe autour des droits de l’Homme, de l’environnement et dans le but de développer l’esprit critique et la confiance en soi. Ajoutées à cela, des heures d’entraînement en skateboard, pour « s’exprimer » et pour leur « développement personnel ». Le projet est né en Afghanistan, à Kaboul, loin des bords de plages de Californie. Il s’étend désormais au Cambodge et à l’Afrique du Sud.

Le skate prouve aujourd’hui qu’il n’est pas devenu démodé de porter des Vans ou d’avoir pour idole Tony Hawk. Cet art de rue s’installe chaque jour un peu plus dans les institutions sportives ou artistiques. Art ou sport ? Difficile de juger. Cependant, le skate demeure vecteur d’un état d’esprit unique dont la dynamique n’a pas fini de nous surprendre.

Crédit photo : French Fred.

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