SOCIÉTÉ

Procès DSK, les menottes aux femmes

Pour DSK, le procès est terminé. Il en sort indemne. Il échappe aux peines, mais l’opinion publique a vécu de plus ou moins loin ce procès sur-médiatisé.

S’il y a bien une chose que l’on peut concéder à DSK, c’est que ce procès était aussi (et peut-être surtout) un procès moral. On a jugé autant ses possibles crimes que ses moeurs scandaleuses pour l’opinion. C’est une erreur, car nous n’avons pas à juger la sexualité d’un individu, même si c’est un homme publique. Cela relève de sa vie privée et ne nous concerne pas. De même que nous ne devons pas juger une personnalité politique pour son homosexualité, on ne doit pas juger un homme politique pour son libertinage.
Le problème chez DSK, c’est que cela semblait bien peu légal. Mais grâce aux gros billets et à des avocats surpuissants, on peut visiblement s’en sortir. Tout va bien dans le monde de la justice.

De l’importance des médias

Un autre procès d’intention peut-être fait, aux médias cette fois. Ils ont une fois de plus sur-médiatisé un événement qui ne méritait pas une telle couverture. Sexualité et sensationnalisme, ça marche toujours. Mais il est inquiétant de voir que les médias ont très peu cherché à aller plus loin que l’exposition des mœurs de DSK. Le président du tribunal avait pourtant rappelé que « le tribunal n’est pas le gardien de l’ordre moral », les médias l’ont vite oublié. Pire, par cette couverture médiatique exceptionnelle, les médias nous ont transformés en voyeurs.

Pourtant, il aurait surtout fallu parler du rapport entre sexualité et politique et surtout de la domination de l’homme politique sur la femme. On a à peine entendu parler de Jade, cette prostituée qui a répondu à des annonces en recherche « d’hôtesses » et qui a mis un pied, à reculons, dans la prostitution pour survivre.

Et le féminisme dans tout ça ?

Si ça n’avait pas sa place au procès, les médias se devaient d’évoquer le problème de la prostitution, des raisons qui poussent à y sombrer et des violences qui peuvent être infligées aux femmes. Parce que oui, les femmes sont les grandes oubliées de ce procès. Ce sont elles qui souffrent et non pas un sexagénaire bedonnant à la sexualité Rocco-Siffredienne qui a loupé la présidence à quelques passes près. C’est des victimes, en l’occurrence des femmes, dont on devait parler. C’est de la place de la femme dans la société dont on devait parler. C’est des inégalités, des abus de pouvoir dont on devait parler si on voulait vraiment élargir le débat. On devait aussi revenir, une fois de plus, sur la question de la prostitution. On a vu des FEMEN intervenir, en se jetant sur la voiture de DSK. C’est la preuve que le féminisme était engagé dans ce procès. Féminisme oui, car c’est bel et bien des femmes qui sont les victimes et plus souvent soumises à la prostitution.

Pendant ce procès, on nous a fait croire qu’un homme qui a été ministre, directeur du FMI et qui s’apprêtait à briguer la présidence ne savait pas que les femmes qui venaient à ses soirées libertines étaient des prostituées. On nous a fait croire que ce même homme ne savait rien alors que certaines prostituées lui ont dit et le rappellent dans leurs témoignages. Alors d’accord, il n’organisait peut-être pas cela, il ne payait peut-être pas lui même, mais il en a profité. Cela mérite une peine.

En prononçant la relaxe pour DSK, le tribunal a mis les menottes aux femmes. En voulant éviter à tout prix de tomber dans le procès de mœurs, le tribunal a oublié les véritables victimes.

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