Franz Ferdinand, auteurs du tube rock « Take Me Out », sont de retour avec un nouvel album.The Human Fear revient aux sources de leur succès. Une oeuvre hypnotique qui combat les peurs.
Comment oublier le riff légendaire de « Take Me Out », tube rock mythique de Franz Ferdinand sorti en 2004 lors de la parution de leur premier album éponyme. Un tube qui traversera les générations et qui surtout marquera cette époque aux côtés d’autres tubes monstrueux des Strokes, Arctic Monkeys ou encore The Kooks et Razorlight. Une époque rock, bien lointaine aujourd’hui mais, qui n’empêche pas la formation d’Alex Kapranos d’être toujours au goût du jour.
Le groupe originaire de Glasgow, entame 2025 avec un sixième album nerveux et dansant qui ravira les fans de la première heure. Après Hits to the Head, un best of sorti en 2022 rempli de leurs tubes, la nouvelle formation du groupe nous présente The Human Fear. Cet album mélange beaucoup de styles pour en faire une oeuvre à part entière et délirante. Nous avons rencontré Bob Hardy et Alex Kapranos pour parler de ce nouveau bijou. Nous discuterons de santé mentale avec le départ de leur batteur Paul Thomson, de peurs humaines et des manières de les combattre (grand thème de l’album), des racines grecques d’Alex. Une rencontre enivrante et passionnante.

Cela fait maintenant plus de 20 ans que vous vous connaissez. Vous avez beaucoup travaillé ensemble mais avez aussi construit une belle amitié. Après tout ce temps, que pensez-vous l’un de l’autre aujourd’hui par rapport à il y a 20 ans ?
Alex : Je vais commencer. Je pense que Bob est toujours le même mais différent. Tu comprends ? Bob était un très jeune garçon quand je l’ai rencontré et maintenant il est légèrement moins jeune.
Bob : Je suis toujours jeune à l’intérieur.
Alex : Il y a certaines choses qui sont toujours les mêmes. Son sens de l’humour, sa perception de la vie. Cependant, je pense qu’il se concentre aujourd’hui sur tout ça avec une approche différente que lorsqu’il était plus jeune. Il y a aussi des choses évidentes qui ont changé. Par exemple, avant, c’était un ivrogne carnivore (rires) et maintenant il ne boit plus vraiment et il est devenu vegan.
Bob : Pour moi, Alex n’a pas beaucoup changé non plus. Il est toujours aussi intéressé par les gens et les cultures étrangères qui tournent autour de lui. Et c’est toujours d’actualité. Nous avons perpétuellement des discussions sur des films et je découvre sans cesse de nouvelles choses grâce à lui, ce qui est évidemment une bonne chose à recevoir d’un ami. Aussi, je dirais qu’il a toujours la même passion pour créer de la musique que lorsqu’on s’est rencontré la première fois.
Vous avez toujours une amitié très forte ?
Alex : Je dirais qu’elle est encore plus forte aujourd’hui qu’à certains moments du passé.
Presque sept ans se sont écoulés entre votre dernier album et ce nouveau chapitre. Qu’est-ce qui a impulsé The Human Fear ?
Alex : Au début, il fallait évidement écrire des chansons mais ce processus ne s’est jamais vraiment arrêté depuis le dernier album. Il y a des chansons qui ont été écrites pendant la période de Always Ascending comme « Night or Day », « Bar Lonely » ou encore « Built It Up ». Puis, il y a des titres qui ont été écrits pour cet album mais qui seront sur le prochain donc c’est un processus continu. Cependant, nous avions en tête d’enregistrer un nouvel album en 2018-2019.
En 2019, on s’est dit : « Faisons d’abord une compile de tous nos tubes, puis on enregistrera » mais la COVID est arrivée. La compile a été reculée de deux ans. On enregistre des morceaux pour le best of avec la tournée qui suit donc si on y réfléchit bien ça fait un moment qu’on voulait enregistrer cet album. Mais je suis content qu’on ait eu ce temps en plus car beaucoup de chansons ont eu le temps d‘évoluer et devenir ce qu’elles sont aujourd’hui.
C’est un album un peu inhabituel, avec des titres très variés aux styles divers, qui maintient une cohésion. Je pense que cette cohésion et ses variations ne seraient pas arrivées si le temps nécessaire n’avait pas été accordé pour permettre cette évolution.
Certains membres du groupe sont partis. Je pense à votre batteur Paul Thomson. Vous avez parlé, dans quelques interviews, de sa santé mentale – sujet qui prend de l’importance en ce moment dans l’industrie musicale. Quel est votre point de vue sur ce sujet
Bob : Je pense que les gens sont de plus en plus tenus au courant. J’espère que les labels feront plus attention avec les jeunes artistes car ça peut être très désorientant en étant jeune (ou pas d’ailleurs) d’être envoyé en tournée. C’est un environnement d’aliens où il est possible d’avoir accès à beaucoup de choses. L’alcool coule à flot dans l’industrie musicale. Ça peut être très fun mais aussi très dangereux car ça reste fatidiquement nuisible pour la santé mentale.
Je pense que les jeunes groupes sont mieux briefés aujourd’hui. Je ne l’étais pas à l’époque. J’avais 23 ans. Je voyais juste « plus d’alcool gratuit ». Je croyais qu’il y a plus de prévention à ce sujet de nos jours. Peut-être que ça ne vient pas tant des anciennes générations que des nouvelles qui prennent soin d’eux-mêmes. Qu’est ce que tu en penses ?
Alex : C’est intéressant. Je me demande si on aurait dû avoir quelqu’un pour nous dire : « Ne bois pas autant, ne sors pas trop, ne prends pas de drogue… ». Je crois que je leur aurais dit : « Va te faire voir, je suis dans un putain de groupe de rock’n’roll » (rires). Je me souviens de Paul qui nous parlait de sa santé mentale mais je pense que si quelqu’un lui avait dit ce genre de chose à l’époque, il aurait donné la même réponse. C’est quelque chose de compliqué à gérer.
Bob : Il faut trouver son propre chemin j’imagine mais il semble heureux aujourd’hui. Il n’appréciait plus les tournées, il voulait être avec sa famille. C’est difficile d’être loin de sa famille, et on ne voulait pas qu’un de nos amis proches subisse cette situation en étant malheureux. C’était donc pour le mieux qu’il parte et fasse sa propre route.
Alex : Je pense que c’était difficile pour Paul d’être dans un groupe de musique tourné vers la guitare. Des amis à lui disaient que ce n’était pas vraiment cool d’être dans ce genre de groupe et je pense que ça le faisait souffrir de penser et d’entendre ça. Je me sentais vraiment mal pour lui à ce sujet.
Ça me fait rebondir sur le nom de votre album, The Human Fear. Pourquoi l’avoir intitulé ainsi ?
Alex : Le titre vient de la chanson « Hooked ». Elle commence avec la phrase « I’ve got the fear, I’ve got the human fear ». Ça a été l’une des dernière phrases écrites de l’album. Je l’ai réalisé après coup car je me suis mis en retrait pour voir les thèmes de l’album. Je me suis rendu compte que beaucoup parlaient de la peur et de comment les surpasser. Ces peurs sont des peurs universelles tant la peur de s’engager dans une relation, la peur de sortir dehors ou encore la peur de partir de son travail. Ce sont des peurs communes mais les réactions, elles, ne le sont pas. Nous répondons tous de manières différentes à ces peurs. C’est comme ça que nous montrons nos personnalités et la manière de trouver qui nous sommes. C’est comme ça que le titre est venu.
Bob : C’est aussi l’idée que nous sommes très humain. Les peurs humaines, c’est tout d’abord être humain. C’est en expérimentant ces peurs dans votre vie que vous vous rappelez que vous êtes vivants. Si vous créez une vie où vous ne dépassez jamais les situations où vous ressentez de la nervosité ou de l’inquiétude à propos de ce que vous allez entreprendre, alors vous devez avoir une vie plutôt ennuyeuse. On peut voir cela comme une opportunité à saisir : la palette entière d’émotions que la vie peut nous offrir.
Pour la première fois vous avez travaillé l’album avec Dino Bardot et Audrey Tait, pas seulement sur la scène. Comment s’est passé la collaboration et qu’ont-ils apporté de nouveau ?
Bob : C’était fantastique. Ils ont apporté de l’énergie. Audrey est une batteuse incroyable. On a tourné avec cette formation pour l’album best of Hits to the Head donc on s’était déjà solidifié musicalement. Puis, nous sommes descendus de scène. Fini la tournée ! Bien excités par tout ça et avec tous les tubes de notre carrière dans la tête, une envie profonde d’aller en studio s’est révélée. On a vraiment pris du plaisir à être avec eux.
Dino a une excellente oreille. Il a une bonne habileté critique. On peut lui faire confiance. Quand il était excité par quelque chose, je l’étais encore plus parce qu’il aimait ce qu’il se passait. C’est pareil avec Audrey. Elle est tellement enthousiaste, relax et décontractée ; elle m’horripile car elle est l’une des personnes les plus confiantes que je connaisse. Elle a une aisance à parler avec n’importe qui et à aller à droite à gauche tout en restant elle-même. C’était vraiment une belle expérience.
Tout à l’heure, vous avez parlé du morceau « Hooked » comme l’un des derniers titres que vous avez composé pour cet album. Pourtant il sonne comme Always Ascending avec côté très dansant et électronique du précédent album.
Alex : Ça sonne plus brut dans le monde des synthétiseurs.
Exactement. Est-ce que vous pouvez me parler de cette chanson et du sens qu’elle a pour vous ?
Alex : Bien sûr. D’abord parlons du son. Le riff est joué sur une guitare. Elle passe à travers un synthétiseur, un vieux Korg qui s’appelait le X911 où il y avait une entrée pour y brancher sa guitare. C’est ce qui donne ce genre de son étrange et craquelé qui vous donne un sentiment d’accrochage. Aussi, quand vous jouez de la guitare, vous jouez différemment que sur un clavier. J’essayais de créer un gros riff de métal à la Black Sabbath de ce genre (ndlr : il imite le riff de guitares du morceau). Donc c’est un peu un monde de contradiction qui s’opère.
On a enregistré le morceau avec le groupe en entier et j’ai enlevé beaucoup de pistes live de la guitare. Il y a toujours un peu de Dino mais toute ma partie guitare a été retirée. C’est surtout la voix qui est restée et pour la batterie d’Audrey, ce n’est pas une machine, c’est bien elle qui joue mais on a simplifié les arrangements au maximum.
Pour ce qui est du thème de la chanson, c’est marrant car toutes les autres chansons parlent spécifiquement de peurs humaines. Celle-là parle du fait que, pendant que vous traversez ces peurs existentielles, il arrive un certain moment où vous découvrez un type d’amour qui fait que toutes ces peurs deviennent banales et sans conséquences. Vous arrêtez de vous inquiéter à propos d’elles parce que vous êtes préoccupé par cet amour.
As-tu trouvé cet amour ?
Alex : Oui et c’est très bon quand vous le trouvez.
Une autre chanson m’intrigue car elle sonne différemment de votre univers musical. C’est la chanson « Tell Me I Should Stay ». Elle a un côté The Clash et ska sur les couplets et le refrain a une énergie très The Beatles. Alex vous aviez un groupe de Ska, The Amphetamines, avant de commencer Franz Ferdinand. Est-ce que c’est un souvenir de jeunesse ce titre ?
Alex : C’était plus comme une ligne de basse de dub ou quelque chose comme ça. C’est joué un peu plus rapidement (ndlr : il imite la ligne de basse). C’est une ligne que j’ai écrite pour ce fameux groupe il y a des années, quelque part au milieu des années 90 mais que je n’ai jamais utilisée. C’est marrant que tu aies remarqué ça. Mais, peut être que j’ai déjà utilisé cette ligne sur une chanson qui s’appelle « Speed Fever ». Il faudra que je vérifie
Quand tu jouais dans ce groupe vous vous connaissiez déjà ?
Bob : J’ai dû voir Alex vers la fin de sa carrière avec The Amphetamines, et je pense qu’on s’est rencontré pour la première fois pendant un concert de Toots and The Maytals. Mais je l’ai vu joué plusieurs fois.
Alex : Je me souviens de te voir au Byres Road Festival.
Bob : Probablement.
Alex : On avait joué dans un camion.
Bob : Vraiment ? Wow. Je pense que je me souviendrais de ça.
Alex : Ça devait être un des derniers concerts du groupe d’ailleurs. Et ce festival n’existe plus, c’est dommage.
Bob : C’était un bon festival.
Parlons de votre pochette d’album. Elle a été inspirée par The Seven Twists de l’artiste bulgare Dora Maurer. Comment avez-vous découvert son art et pourquoi avoir choisi cette image ?
Bob : Nous connaissons son œuvre car il y a eu une grande rétrospective au Tate Modern à Londres mais aucun de nous deux n’a pu y aller je crois.
Alex : Je n’ai pas pu y aller. On était en tournée à ce moment-là.
Bob : J’ai donc appris son existence puis nous avons vu cette oeuvre d’art et ça semblait parfait pour nous. Ça représentait un peu visuellement ce qu’on essayait de faire avec la musique. Quelque chose de simple au premier regard et qui, plus vous la regardez, plus elle se complique. On peut toujours revenir dessus.
Alex : Il y a une certaine profondeur qui semblait vraiment parfaite pour nous. Et j’aimais le fait que ce soit des autoportraits d’elle avec différentes versions d’elle-même. Parce qu’on est cinq dans le groupe donc c’était une belle opportunité pour qu’on soit tous dessus. J’aime bien le fait qu’on se tienne tous les uns les autres, c’est comme ce qui se passe vraiment dans un groupe, tout le monde se supporte. Nous sommes comme une équipe qui travaille ensemble. Ça nous a vraiment fait écho.
Comme avec quelques unes de mes oeuvres préférées, j’ai l’impression qu’on peut apprécier l’exécution de l’oeuvre mais que c’est surtout le concept qui est l’élément le plus important. C’est véritable dans le travail de Dora. J’aime l’idée qu’on puisse créer différentes réalisations du même concept et que ça ait un impact tout aussi puissant. Ici, c’est notre interprétation du l’œuvre de Dora. C’est comme avec un compositeur qui voit sa chanson être reprise. Tu peux le faire et y amener une autre perception voire même l’emmener ailleurs.

L’art de l’image est-il aussi importante que la musique pour vous ?
Bob : Oui je pense que l’aspect visuel du groupe a toujours été important pour nous. On a parlé de l’idée d’un groupe avant même d’avoir joué ensemble ou que je touche moi-même un instrument ou qu’on parle de la musique qu’on allait faire. C’était le concept d’avoir un groupe à 360 degrés : en allant des clips musicaux à la pochette en passant par la scénographie. C’est quelque chose qui nous intéresse énormément et on voit ça comme faisant partie du format.
Nous sommes tous les deux obsédés par l’idée de créer un groupe avec un univers. Tous nos groupes préférés ont fait ça. On choisit d’être impliqués dans tout ce qui touche au groupe. Nous avons choisi pour la première fois la photographe française Fiona Torre qui est une amie à nous. Nous choisissons les gens avec minutie car nous pensons qu’ils peuvent s’intégrer à notre monde, comprendre ce qu’on est en train d’essayer de faire.
Alex : On s’intéresse beaucoup tous les deux à la photographie. Bob est aussi peintre. Il a fait des études d’art sur la peinture.
Quel genre de peinture fais-tu ?
Bob : Je vais dire en majorité des paysages. C’est ce qui m’intéresse.
Alex : Son travail en école d’art était beaucoup plus conceptuel et c’est probablement ce pour quoi ça a marché entre nous. Bob peut très facilement transférer ce monde avec celui de Franz Ferdinand car c’est un groupe concept. C’était un groupe avant même d’avoir fait de la musique. Une fois que tu as cette idée, c’est tout de suite plus facile de créer la musique.
Bob : C’est drôle parce que je pense à ce dont on parlait au début et je viens de réaliser que « Audacious » est la réalisation d’une conversation que nous avons eue 24 ans plus tôt.
Alex : C’est un projet à long terme (rires).
Bob : Je me rappelle écouter les pistes dans le studio et me dire « C’est ça notre groupe. C’est ce que j’ai toujours voulu ».
Il y a une autre chanson qui m’intrigue, « Black Eyelashes », qui a une énergie très grecque. Est-ce que tu peux nous en parler ?
Alex : Mon père est grec donc j’ai grandi en écoutant beaucoup de musique grecque. J’imagine que j’ai toujours utilisé cette musique afin de trouver mon identité grecque. Je me sens plus grec quand j’écoute cette musique, je ressens une connexion. Ce que parfois je ne ressens plus du tout quand je vais en Grèce parce que quand je vais là-bas je ne ressemble pas à un grec.
Les cils noirs, les sourcils noirs. Les cils noirs sont d’ailleurs un thème récurrent dans les chansons grecques. Et quand je parle de « trouver mes cils noirs », je parle de mes racines. L’ironie dans tout ça c’est que j’ai les yeux bleus. Quand je vais en Grèce, les gens disent : « tu ne ressembles pas un grec » et je leur réponds : « Non, non, mais je suis bien grec », puis ils disent : « mais tu ne parles pas grec ». C’est ce dont je parle dans la section où je chante en grec dans la chanson.
Est-ce que parfois vous aimeriez créer un nouveau « Take Me Out » ?
Alex : Tu sais quand on a écrit « Take Me Out » ce n’était pas encore notre chanson la plus populaire sur Spotify. Il est clair qu’aujourd’hui elle a le double de lectures que toutes nos autres chansons mais on ne s’est pas assis en se disant qu’on allait faire un carton avec. On a juste écrit une chanson qu’on aimait et c’est ce qu’on a fait avec toutes nos chansons. On ne fait pas partie de ces artistes pop qui sont programmés à écrire des chansons à succès commercial. On en écrit qu’on aime et qui ont du succès et d’autres pas du tout. C’est aussi pareil dans nos goûts musicaux, il y a des chansons d’autres groupes que j’adore qui sont des méga tubes et d’autres morceaux que j’aime autant qui sont complètement inconnus.
Bob : On veut faire de la musique qu’on aime.
Dernière question en rapport avec le titre de votre album The Human Fear. Quelle est votre peur préférée ?
Alex : Ma préférée ? Bonne question. J’aime la peur face à un bon film d’horreur, un film d’horreur italien des années 70, ce genre de chose. À la Argento avec par exemple, Les Frissons de L’Angoisse (1975). Je trouve ça très cool et j’aime l’esthétique, le sexe est sympa mais je préfère le sentiment de suspense et de malaise. Je recherche souvent ça.
Bob : Moi, j’aime le sentiment de peur avant de monter sur scène sur une grosse date. Surtout si on joue de nouvelles chansons, ça amène un stress en plus. J’aime secrètement ça. Le concert arrive vers toi et cela crée cette sensation entre excitation et nervosité dans ton estomac. Puis, après coup, il y a ce lâcher-prise où tu ne ressens plus rien du tout. C’est comme avant un live TV, j’ai comme cette norme boule au ventre où je suis monosyllabique puis après le show j’ai cette exaltation absolue. Je suis comme drogué.
Alex : J’ai eu ce sentiment récemment. J’ai fait une chanson avec le groupe Louise Attaque, tu connais ?
Oui, bien sûr.
Alex : J’ai fait une chanson avec eux pour Taratata à Bercy et j’ai dû chanter une chanson live mais en français. Gaetan est un grand compositeur mais son français est tellement rapide, et pour des gens qui ne parlent pas français c’est assez difficile à comprendre. Il était vraiment gentil avec moi mais, avant d’aller jouer ce morceau, je me disais « putain je dois jouer cette putain de chanson en putain de français » (rires). Mais ça a été incroyable et c’était vraiment épanouissant car après j’ai flotté pendant des heures.
Bob : ll s’est passé la même chose quand j’ai fait l’émission de radio Le Chris Evans Breakfast Show. C’est un grand DJ au Royaume-Uni et il a l’émission matinale la plus écoutée sur la BBC. J’ai grandi en l’écoutant en allant à l’école quand il était sur Radio One. Donc on devait faire une reprise de Madness. On était à Londres, on avait un jour off avant l’émission. Je me souviens de tourner en rond et de penser que j’étais condamné en me demandant comment j’allais pouvoir réussir à faire ça.
Puis on y est allé, c’était une expérience surréaliste. Il y avait les Jackson 5 et cet énorme acteur qui joue un super-héros Marvel aujourd’hui, je ne sais plus son nom. Finalement, ça a été incroyable et après, j’étais complètement shooté. Je suis allé voir Chris Evans pour le remercier de nous avoir eus alors que je ne pouvais pas dire un mot avant. Quelle super façon de se sentir vivant. Et c’est la clé. J’ai vaincu ma peur et je me suis senti vivant comme jamais auparavant.
Alex : Ça me rappelle ce festival qu’on a fait au Chili. Cet étrange festival. On ne savait pas que c’était une compétition, et on ne savait pas à l’époque que c’était regardé par 500 000 personnes.
Bob : 18 millions.
Alex : Quoi ?
Bob : 18 millions. C’était l’équivalent de l’Eurovision de chez nous pour eux mais en plus sympa. Je ne sais pas comment on s’est retrouvé là (rires). On pensait qu’on faisait juste un festival.
Alex : Et le thème du festival était : surpasser le monstre de la peur. Ce monstre était cette chose imaginaire qu’on doit conquérir pour performer dans ce cadre particulier et j’ai adoré l’idée suivante : une fois le monstre conquis, tu es victorieux. On a toujours le prix d’ailleurs. On a gagné car on a massacré le monstre de la peur.