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Rencontre avec Malik Djoudi : « C’est un album de plaisir et de libération »

Crédit : JULIEN MIGNOT

L’artiste installé à Paris nous inonde de mélodies joyeuses et amoureuses avec son nouvel album du plaisir intitulé Vivant. Sorti le vendredi 20 septembre, ce quatrième recueil est une ode à la libération.

Malik Djoudi s’est lancé dans la musique en solo assez tard. Trente-cinq ans. En 2017, nous découvrons la voix aiguë et solaire du chanteur compositeur avec son album UN. Puis la machine est lancé. Nous plongeons dans son deuxième album bleu nuit,Tempéraments, habité par des oiseaux nocturnes et la chaleur des corps qui se touchent. Reconnu par Daho, ils cèlent cette admiration réciproque en duo sur ce deuxième effort. Malik devient ce qu’il se fait de mieux dans la musique underground française. Le soleil se lève et Malik construit son cheval de Troie. Un album solaire et enivrant,Troie, aux rythmes toujours aussi sexy. Cependant, c’est avec ce dernier manifeste que le musicien se sent enfin vivant, « vivant comme je l’aime », tel qu’il le chante dans le titre éponyme de cet album de la libération.

Maze a donc voulu rencontrer Malik Djoudi afin d’en savoir plus sur ce nouvel album aux couleurs neuves. C’est dans la capitale où il réside que nous avons pu échanger de Vivant, son dernier album. Nous parlerons d’amour évidemment, d’amitié, de famille mais aussi de questionnement existentiel dans cette rencontre chaleureuse.

C’est souvent le premier album le plus difficile, mais je trouve que là, en fait, t’as un peu fini une certaine trilogie. Je me demandais si ce quatrième album avait été aussi dur que le premier ?

Alors, c’est marrant, mais ce quatrième album a comme la saveur d’un premier album.  Comme tu disais, c’est vrai que c’est un peu une trilogie mais je me suis toujours pris pas mal la tête sur la composition, sur l’authenticité des choses, les concessions. Sur cet album, j’ai arrêté de me prendre la tête et j’ai fait tout simplement ce que j’aimais faire. Encore une fois, avant la composition de ce disque, je suis bien tombé. J’étais assez fatigué de me poser des questions sur ma légitimité dans ce métier.

Je suis parti à la Villa Médicis où j’ai composé pendant un mois. Les deux premières semaines, vraiment, rien n’est sorti car j’avais toutes ces questions et cette fatigue qui était là. Au bout de ces deux semaines, à l’aurore, je vois un couple de dos qui se tient la main. Et, à partir de là, cette image m’a énormément inspirée. C’est un peu cliché (Rires). Elle m’a énormément inspiré et, après, je suis allé vers un truc très naturel. C’était très naturel. 

Je vois Tempérament comme un album de nuit, Troie plus comme un album de jour et celui-là, un peu comme un album du plaisir. Est-ce qu’il y a de ça ?

C’est ça, c’est un album de plaisir, un album de libération. Vraiment ! J’arrête de me prendre la tête. Je passe par plein d’étapes. Au départ, je me pose beaucoup de questions, rien ne sort et, après, c’est vraiment fluide. Je suis à Rome, c’est romantique. Il y a les sculptures que je peux y voir, les statues, c’est charmant. C’est beaucoup d’inspirations et d’odeurs différentes, les oiseaux qui chantent et des rencontres aussi.

@JULIEN MIGNOT

Est-ce que tu sais pourquoi tu as eu ce blocage ? Tu disais que ça avait été aussi dur que pour le premier album. Est-ce que tu sais d’où vient ce vide ? 

Oui, complètement. Je pense que ça vient beaucoup de la fatigue, de beaucoup de remises en question et de cette question de légitimité. Aussi, j’ai envie d’essayer de faire autre chose, de composer autrement. Ne serait-ce qu’avec de nouveaux accords. Et, en fait, j’ai beaucoup cherché et je n’arrivais pas du tout à trouver une couleur qui m’intéressait. Pourtant, ça ne m’a pas empêché de faire tomber des barrières et parfois même d’avoir des chansons plus joyeuses, plus difficiles à faire pour moi qu’une chanson mélancolique.

Quelle était la première chanson composée pour cet album ?

La première chanson c’est « Accord Magique ». C’est la dernière de l’album. C’est vraiment ce couple qui est de dos, main dans la main. J’entends les premières notes et ça accorde ma vie. 

Finalement, pourquoi l’avoir mise à la fin ?

Parce que je trouve que tu reviens à l’album.

L’album s’appelle Vivant et dès qu’on écoute la première chanson, le titre éponyme, on sait vers quoi on va. Il y a ce côté vraiment libérateur. Ce que j’adore de cette chanson, c’est que ça reste en tête. C’est une très belle mélodie. Qu’est-ce qui t’a fait te rendre compte que tu te sentais, comme tu le chantes, « enfin vivant, vivant comme je l’aime »  ?

Je crois que, toute ma vie, je me suis posé beaucoup de questions. Des questions qui parfois empêchent d’avancer. Tout simplement par exemple : qui suis-je ? Qu’est-ce que je fais ? Comment je peux aider à ma petite échelle ?

J’ai lu que quand tu as fini cette chanson, tu avais envie de pleurer et que tu as même pleuré.

Cette chanson, elle arrive quand je suis à la Villa Médicis, juste après un chagrin d’amour mais je reprends confiance en moi. Je découvre l’amour, enfin je rencontre l’amour, parce que ça arrive au bon moment. Je commence à me sentir de mieux en mieux. Je suis capable d’accueillir, de recevoir et de donner aussi. J’écoutais beaucoup Sault. J’adore le basse batterie, les lignes de basse, j’adore. J’aimerais beaucoup trouver un truc comme ça, bien entraînant, avec une basse un peu transe. En plus, à côté de ça, je tombe amoureux – j’aime bien cette chose de « tomber » – et, un jour, j’entre dans le studio et j’ai cette ligne de basse. (Ndr : joue la ligne de basse avec sa bouche). Je mets des accords, le mellotron. C’est cool. Je mets une batterie et voilà. 

Les premiers mots c’est « je suis enfin vivant, vivant comme je l’aime. Vivant comme je l’attendais » ; parce que je suis à un moment où je me pose moins de questions, j’avance, je fais les choses et, en plus, je suis amoureux donc c’est plus facile. J’écris les paroles et je passe deux, trois heures, peut-être quatre à pleurer derrière mon micro parce que j’écris ce que je ressens et, en plus, je suis vraiment bien. Je ne pensais pas arriver à un endroit comme celui-là. C’est important de me dire que ça faisait longtemps que je me sentais mélancolique et que je cherchais à trouver ma place. C’est peut-être un moment où je commence à la trouver. 

Et pourquoi avoir choisi la Villa de Médicis ? Qu’est-ce qu’elle représente pour toi ? 

Elle représente l’art en général, l’art pluridisciplinaire. C’est Rome, c’est romantique, un peu de dolce vita. Puis je rencontre Sam Stourdzé, le directeur de la Villa Médicis à ce moment là. Il fallait que je m’isole pour me concentrer. 

Tu parlais du fait de tomber amoureux et tu as écrit cette chanson qui s’intitule «  Viens on prend le temps  ». Est ce que pour toi le temps est nécessaire dans une relation amoureuse ?

Complètement. Parfois on a moins de temps à donner à l’un ou à l’autre, aux uns ou aux autres. Le temps est essentiel même dans une relation amicale ou familiale. « Viens on prend le temps » c’est un peu une ode qui invite à prendre le temps mais aussi à faire des choses simples. C’est prendre le temps avec les gens qu’on aime, prendre le temps de se balader… Je me suis rendu compte que le bonheur je le trouvais dans les choses simples donc, je prends de plus en plus de temps à apprécier le temps et les choses simples.

Tu parles d’amis aussi. Il y a deux chansons en hommage à ta mère et à tes amis. Est-ce que c’était important pour toi de les mettre en musique ? 

Je ne me suis pas dit « tiens, je vais faire une chanson sur mes amis ». La chanson « Maman » commence par ces accords de guitare qui m’inspirent un air ; « Mes ami(e)s » par des accords de clavier et ça m’inspire aussi. Cette chanson sur maman, ce sont des choses que je n’ai jamais réussi à dire à ma mère. Je suis très content de l’avoir écrite, je pense que ça change notre relation.

Elle l’a déjà entendue ?

Oui, elle l’a déjà entendue et ça l’a fait pleurer je crois. Ma mère m’a eu très jeune. Elle s’est toujours excusée de ne pas m’avoir donné l’éducation qu’elle aurait aimé me donner. Cette chanson est un peu une façon de lui répondre « tu n’as pas besoin de me dire pardon, parce que cette enfance, je l’ai adorée ». Et, pour mes amis, j’ai la chance d’avoir de merveilleux amis. Heureusement qu’ils sont là. Ils sont vraiment une épaule. La chanson l’explique bien je pense.

Oui, complètement. Je me demandais justement ce que représente l’amitié pour toi ? 

L’amitié pour moi c’est une autre famille. L’amitié, c’est la confiance, c’est l’intimité, c’est la fête, la célébration. C’est une famille qu’on choisit. 

En parlant d’amitié, on pense à tes duos. Je me demandais pourquoi sur celui-là il n’y en avait pas ? Est-ce que ça ne s’est pas présenté ?

Oui, mais c’était aussi se dire, « tiens, c’est mon disque, je vais l’assurer tout seul ». J’avais vraiment envie d’affirmer cette chose là : « je suis Malik Djoudi, je fais ce disque ».

Selon moi, « 2MN » est une chanson qui sort un peu du lot. C’est une chanson où on t’entend plus dans les voix basses et qui fait parfois hip-hop. Est-ce que tu peux m’en parler ?

Alors, après le troisième album, j’ai eu une période où je ne composais pas trop. Je jouais, je tournais, je faisais des concerts, je ne composais pas. Et cette chanson est arrivée alors qu’on faisait la fête dans un studio. Il y avait un joli piano. Je me suis mis au piano et j’ai trouvé cette chanson. Elle m’a ouvert l’esprit. J’aime beaucoup sa couleur.

Et puis tu essaies de nouvelles choses avec cette chanson. 

Oui, j’essaie de nouvelles choses et, surtout, c’était une demande de trouver l’amour. 

Tu écris beaucoup de chansons sexy. Je pense à « Point Sensible » ou « Excite » et « Dernier Cri ». Quel est ton secret pour écrire ces chansons ? 

Merci pour cette question. C’est la peau qui m’inspire, le contact, le côté charnel et aussi la retenue de la vulgarité.

Et, ma dernière question est la suivante : si tu pouvais être une émotion ou un sentiment, tu serais quoi ? 

Si je pouvais être une émotion, un sentiment ? Amoureux. Je serais amoureux.

Malik Djoudi sera en concert à La Cigale le 3 décembre 2024 (Sold Out) et en tournée dans toute la France à partir du 8 novembre prochain.

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