ACID – Martin Jauvat est un très jeune réalisateur dont l’imagination débordante est imprégnée de récits de science-fiction. Avec Grand Paris, son premier long, il propose un véritable roadtrip circulaire francilien. Embarquez avec lui au sein du réseau RATP : les banlieues sont, aussi, terre de (science) fictions !
Ils, ce sont eux : Leslie (Mahamadou Sangaré) et Renard (Martin Jauvat). Deux jeunes banlieusards un peu désabusés, qui se retrouvent dans une combine foireuse à Saint-Rémy-lès-Chevreuse, terminus sud du RER B. Bienvenue en Seine-et-Marne ! Ses forêts mais aussi ses chantiers du projet du Grand Paris Express (GPE), Martin Jauvat les connait bien. Le 77 c’est son terrain, celui où il vit depuis toujours.
Avec Grand Paris, le jeune réalisateur s’empare de territoires peu investit par le cinéma français. Car les aventures de Leslie et Renard vont les mener aux quatre coins de l’Ile-de-France. Après avoir trouvé un artefact qu’ils pensent d’origine égyptienne, les deux comparses s’élancent dans une aventure nocturne complètement barrée.
Le premier long métrage de Martin Jauvat ne s’interdit rien. Et il est le bienvenu dans un paysage cinématographique français qui semble considérer que les territoires extérieurs à Paris ne peuvent exister qu’au singulier, dans une uniformité qui ne vaut pas le détour. Le réalisateur s’inscrit à rebours de cette morne représentation.
Poésie francilienne
Saint-Rémy-lès-Chevreuse, La Hacquinière, Cergy-Pontoise… c’est une topographie inédite et multiple de l’Ile-de-France que trace la caméra de Martin Jauvat. Leslie et Renard voyagent d’un bout à l’autre de ce vaste espace comme si les contraintes spatiales et temporelles liées à la centralisation parisienne des transports en commun n’existaient plus. C’est que, pour Martin Jauvat, la banlieue n’existe pas. Les territoires d’Ile-de-France doivent se penser au pluriel et ils sont dignes de fiction.
Les banlieues résidentielles sont certes des lieux où ennui et désillusions coexistent. Mais elles sont aussi le cadre de sentiments plus réjouissants. En optant pour le genre de la comédie, Martin Jauvat n’impose aucune limite à son imagination foisonnante. L’intrigue avance dans un grand n’importe quoi réjouissant. Et ces divagations inattendues imposent au spectateur un sourire qui perdure au-delà de la projection.
Car Grand Paris est aussi un buddy movie dont la tendresse maladroite de ses protagonistes saborde les codes de la virilité des amitiés masculines. L’hypersensibilité du réalisateur-acteur imprègne son film d’une grande légèreté aussi touchante que drôle. Légèreté qui paraît aussi liée aux conditions de tournage, tant les images semblent toujours capturées à la dérobée.
Et c’est ce qui fait tout le charme de Grand Paris. Un film dont les coutures saillantes de l’imagination de son auteur font tenir ensemble un ici et un ailleurs que l’on désespérait de voir enfin réunis au cinéma.