CINÉMA

« En toute liberté – une radio pour la paix » : Un film qui donne la voix à qui n’en a pas  

« En toute liberté – une radio pour la paix ».
© L'atelier d'images

Second volet d’une trilogie, ce documentaire de Xavier de Lauzanne suit sept journalistes bien décidé·e·s à donner la parole à celleux qui, chaque jour, se battent pour la paix. Retour sur un film qui, au milieu des ruines, se focalise sur l’espoir.

Quand les médias nationaux présentent un Irak dans l’impasse, où la violence laisse appréhender un retour à la guerre civile, Xavier de Lauzanne braque sa caméra sur sept journalistes pour Radio Al-Salam bien décidé·e·s à faire entendre celleux que l’on n’entend plus. Celleux qui veulent la paix. En toute liberté – une radio pour la paix, suit des reporters musulman·e·s, chrétien·ne·s et yézidi·e·s, qui partent à la rencontre d’habitant·e·s et de réfugié·e·s de toutes confessions, aux parcours différents et complexes. Rescapés de la torture, jeunes filles orphelines, réfugiés dans le camp de Qushtapa (région d’Erbil), etc. Sur les ondes de l’antenne affranchie d’influences religieuses et politiques, les Irakien·ne·s témoignent, à cœur ouvert. Tous·tes prônent le vivre-ensemble, au lendemain de l’occupation de Mossoul par Daech, en juin 2014. A l’antenne, les journalistes s’expriment en trois langues : le kurde, l’assyrien et surtout l’arabe. Radio Al-Salam s’adresse à, écoute et entend tout le monde.

L’espoir sur écoute

C’est la deuxième fois que Xavier de Lauzanne se met au défi de mettre en lumière la reconstruction du lien social en Irak et en Syrie, après 9 jours à Raqqa (2021), et avant le dernier volet de sa trilogie. Et il le fait bien. La caméra est discrète, et la parole donnée aux Irakien·ne·s. Pour de vrai. Montrer cette réalité lui tient à cœur, ni pour servir sa cause, ni pour dorer son image. Mais pour de vrai.

A travers En toute liberté – une radio pour la paix, Xavier de Lauzanne sort des stéréotypes et fait le point sur le lien social et l’espoir. Force est de constater que là est l’essence des protagonistes. « Les journalistes à l’écran sont de jeunes Irakiens et Syriens. Ils ont vécu le conflit ainsi que des traumatismes dans leurs propres familles. Ce ne sont pas de doux rêveurs, et pourtant ils aspirent à la paix et à la reconnexion des communautés. » a-t-il confié au micro du CNC, le 10 mars dernier. Malgré les cicatrices de l’histoire, la volonté des journalistes et de celleux qui témoignent, est de recréer du lien, de vivre-ensemble. Ce lien, que tous·tes semblent vouloir retrouver, ce sont les partis politiques qui l’ont rompu. C’est ce qu’expliquent les témoins : « C’est eux qui ont construit le communautarisme entre nous ! ».

Conscient·e·s de ces coulisses, les Irakien·ne·s croient en une forme d’humanité, entre elleux. Iels impressionnent par leur détermination à vouloir bâtir un demain meilleur, ensemble. Comme cet homme d’une cinquantaine d’années, de confession musulmane, en train de faire reconstruire sa maison, au milieu des ruines de Mossoul. Une tâche de couleur au milieu du chaos. Il appelle ses anciens voisins à faire comme lui, à revenir habiter leurs maisons, reprendre leurs boutiques. “C’est une nouvelle page qui se tourne“. Une leçon d’espoir donnée par cet homme revenu de loin.

Un road-movie engagé

L’humanité pourrait être le maître mot de ce documentaire. Naveen Simogy, l’une des journalistes pour Radio Al-Salam, est devenue correspondante depuis Dohouk, au nord d’Erbil, après avoir fui Sinjar à l’arrivée de Daech. Dans le camp d’orphelines, elle échange avec l’une des jeunes filles, qui se met à pleurer. Hors micro, Naveen la prend dans ses bras sans réfléchir, et la réconforte, avec une bienveillance sincère et spontanée. 1h30 de leçon de bonté.

Xavier de Lauzanne nous présente donc les coulisses de la Radio Al-Salam et donne à l’Irak une image que l’occident n’a pas l’habitude de voir. Le message est passé. Seul bémol : la construction, qui laisse quelque peu perplexe. Tout va un peu trop vite (voire dans tous les sens), quand on a envie de prendre notre temps. De plans longs. De s’épancher sur les ressentis des journalistes, sur le terrain. C’est dommage, mais pardonnable.

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