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« Peut-être pas » – Le cabaret des possibles

©François Passerini

Partant du chef-d’œuvre du théâtre classique Hamlet, Peut-être pas vire vite à une succession de scènes comiques mêlant les époques, les genres et les lieux. Présenté comme un cabaret existentiel, il pose question sur nos vies et sur le théâtre.

Sébastien Bournac, metteur en scène, présente Peut-être pas après une résidence au théâtre Sorano (à Toulouse) dont il est directeur. Né de discussions autour de bon vin et de mets entre Sébastien Bournac et Pascal Sangla (comédien, chanteur et danseur), ce spectacle s’inspire de textes mais est essentiellement créé à partir d’écriture de plateau.

Du reste, l’histoire ne peut se résumer, la dramaturgie n’a ni chronologie, ni queue, ni tête. Le spectacle expérimente l’absurdité sous différentes formes, jouant avec le jeu. Entre divertissement, électrochocs existentiels et humour absurde, le public se laisse ballotter en différents lieux et différentes atmosphères.

Expérimenter le théâtre

Paradoxalement, c’est dans un chaos ludique que Sébastien Bournac et Pascal Sangla tentent de (re)trouver un sens au théâtre. Après cette période d’épidémie mondiale et de confinement, tout a été remis en question notamment dans le domaine de la culture. Ils testent le théâtre comme un endroit de liberté, où l’illusion théâtrale crée un champ des possibles.

De ces libertés découle celle de jeu, entre illusion dérisoire et réalité. Partant de ces deux principes fondamentaux souvent opposés du théâtre, Peut-être pas mise sur un va-et-vient incessant entre réalisme et illusion brisée. Le cabaret divertit par son aspect burlesque et ses danses et chants, mais les adresses directes aux spectateur·ices nous ramènent à nos existences.

De grands moyens employés

Ils ne prennent pas part dans cette dualité, ils jonglent avec les deux et se moquent parfois d’une illusion trop injustifiée. Le but étant de prendre tous les moyens matériels comme techniques que le théâtre permet, à l’instar de l’utilisation de fumée et grosses machineries, d’effets visuels et sonores vite brisés par l’acteur·ice et les moyens dévoilés. De ce fait, l’illusion a ses limites, les moyens techniques cassent finalement l’imaginaire du public.

La grande part laissée à l’écriture de plateau favorise la liberté dans la dramaturgie. À l’image de Dieu, le théâtre accède au droit de vie, de mort et de résurrection. Les concepteurs du spectacle ridiculisent le théâtre classique shakespearien en un western sanglant mais irréaliste. De cette manière-là, ils attestent des possibilités infinies de la scène.

L’espace scénique offre un terrain des possibles. Noir et dégagé, il invite l’imaginaire du public. L’accaparation tant verticale qu’horizontale de l’espace scénique prouve une envie d’embrasser le théâtre et ses potentialités, le vide étant un outil des possibles. À côté de ces frivolités, nous assistons à des moments simples et réalistes dans lesquels les techniciens sont au plateau. D’autres où les comédiens cuisinent auprès d’un véritable cuisinier. L’émission télé culinaire reproduite sur scène lie la fausseté de ce genre de programme à celle du théâtre.

Le spectacle est régi par le partage et la bonne humeur, sûrement en guise de revanche à la crise de la COVID 19 qui nous a arraché ces instants. Alternant entre moments présents et un théâtre ironisé sur une base de clichés, le non-sens est pleinement assumé. L’envie même de réfléchir à un sens n’est pas présente. Ce spectacle pose question sans laisser de réponse.

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