MUSIQUE

Festival Les Femmes s’en mêlent – Et c’est essentiel

Du 14 au 26 novembre, le festival, à la programmation exclusivement féminine, a pris d’assaut la scène parisienne. Retour sur ces douze jours qui ont animé la capitale comme un torrent musical foudroyé par une myriade de talents, de découvertes et d’émotions.

Initié en 1997 par Stéphane Amiel en réponse à la sous-représentation des femmes sur la plupart des scènes, Les Femmes s’en mêlent continue de s’engager à valoriser une création éclectique, généreuse et inclassable. Depuis sa création, le festival a invité plus de 400 musiciennes. Il a permis de lancer les débuts de carrière d’artistes telles que Christine and the Queens, M.I.A, Yelle, ou encore Soko.

Pour cette 23e édition, Les Femmes s’en mêlent continue d’inscrire sa programmation à contre-courant des line-up habituelles, en s’axant plus que jamais vers une scène féminine indépendante et internationale, donnant l’opportunité à ces artistes à qui on cède rarement la priorité de résonner, enfin.

Renforcé depuis l’année dernière par le dispositif «  Les femmes s’engagent  », le festival propose, en parallèle de sa programmation musicale, des ateliers. L’objectif est d’encourager la création artistique féminine, de soutenir le développement des projets, d’augmenter la présence des femmes dans le live mais aussi prévenir et lutter contre les violences sexistes et sexuelles.

En somme, de permettre aux femmes d’être plus autonomes dans leur création, les poussant ainsi plus loin, plus vite. C’est au FGO Barbara, au Point Éphémère, à la Cité Audacieuse, ainsi qu’au Petit Bain que s’est donc tenu ce nouveau dispositif d’accompagnement, matérialisé par des ateliers d’écriture féministe, de beat making et de coach scénique.

En repensant ainsi le milieu de la musique, le festival, qui a été l’un des premiers à créer son identité autour de ses aspirations militantes, s’engage, une fois de plus, dans la lutte contre les disparités existantes dans les métiers de l’industrie musicale.

Côté scène, Les Femmes s’en mêlent continue d’affirmer son caractère éclectique et précurseur. Désireux d’offrir un large panorama culturel où le genre féminin n’est pas un, mais multiple, le festival a convié pour cette nouvelle édition Les Vulves Assassines, le folk-rock de Derya Yıldırım & Grup Şimşek, Stella Donnelly et l’électro-punk de Zombie Chang.

L’incontournable DJ et productrice Chloé a eu carte blanche pour faire vibrer le Trabendo le temps d’une nuit, aux côtés de LW2, Surgeons Girl, Sofia Kourtesis et Clara 3000. En outre, le festival a également convié Claire Days, Kety Fusco, Marta Del Grandi ou encore Black Sea Dahu. Maze vous propose une petite sélection d’artistes piochées dans cette programmation aussi riche qu’éclectique.

Aussi envoûtant qu’électrisant

C’est sur le bord des quais, dans le lieu pluridisciplinaire du Point Éphémère que nous retrouvons en double plateau Nadine Khouri et Marissa Nadler, pour un moment suspendu emprunt de gravité. Par son écriture évolutive abordant la métamorphose et l’amour comme le mysticisme et le meurtre, Nadler incarne, depuis plus d’une douzaine d’années, un goth-folk aux notes mineures enivrantes.

Marissa Nadler, Eva Duc

L’auteure-compositrice-interprète originaire de Boston évoque, en utilisant une palette sonore aux couleurs sombres, un passé lointain plein de fantômes, d’absences, de désirs, et d’objets inanimés sensibles. Avec douze albums à son actif, Marissa Nadler altère librement la frontière entre réalité et onirisme, évolue entre le passé et le présent, nous offrant ainsi une performance saisissante.

Dans la salle intimiste du Point éphémère, la voix profonde et lascive de la poétesse gothique à l’aura fantomatique nous enivre dans un folk calme et introspectif.

La rencontre avec la voix chaude et magnétique de Nadine Khouri s’avère être un palindrome musical réussi. Après avoir sorti The Salted Air en 2017, un opus feutré s’inscrivant hors du temps et des modes, la musicienne anglo-libannaise présente Another Life, son second album, paru en novembre 2022 chez Talitres. Khouri y raconte cette vie, où, poussée à l’exil par la guerre civile au Liban, passant par New York et Londres, elle fini par s’installer à Marseille, ville cosmopolite méditérranéenne pétrie par le soleil.

© Nadine Khouri au Point Éphémère, Eva Duc

Dans une béatitude lente, avec grâce et sens du détail, la voix chaude et magnétique de la chanteuse déploie son élégance sur un fond d’orchestrations idoines maniées avec habileté. Sur une douce et enveloppante mélancolie, ce chant suspendu et habité s’est étiré pour chanter l’exil, l’errance, la séparation, la joie, et le désir.

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