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« Be Here now » – Un formidable Millepied de nez au ballet classique

L.A. Dance project
© Théâtre du Châtelet - Thomas Amouroux

Le chorégraphe délaisse les codes surannés du ballet pour une performance hybride, entre classique et hip-hop, portée par un casting remarquable et plus mixte qu’à l’Opéra de Paris. Un spectacle réjouissant.

Donner corps à Los Angeles. C’est avec ce projet un brin ambitieux que l’ancien danseur du ballet de New York Benjamin Millepied s’invite sur les planches du théâtre du Chatêlet, à Paris. La troupe du L.A. Dance Project, qui fête ses dix ans cette année, s’assemble sur scène, face à la salle bondée. Quatre danseuse d’abord, shorts noirs et hauts blancs, entament des mouvements de danse classique, héritage direct de Millepied, qui a été danseur classique avant de diriger l’Opéra de Paris. Les quatre jeunes femmes sont rejointes par d’autres danseurs, hommes, vêtus pareillement – rupture discrète avec les codes en vigueur à l’Opéra, qui continue de séparer ses danseurs en fonction de leur genre.

Le silence laisse place à des percussions. Le pas lourd des danseurs continue de tonner et de faire craquer le parquet de la scène, que l’on entend depuis le public. Les mouvements de danse classique, entrechats et autres chorégraphies qui ne laissent aucun espace aux danseurs en tant qu’individus sont progressivement remplacés par le fracas de mouvements proches du hip-hop. Les corps s’adaptent au rythme puissant des percussions et des cuivres, que l’on entend sans les voir – les musiciens sont nichés de l’autre côté de la scène.

Millepied laisse tomber les décors. De grands messages s’affichent sur les pans de murs de la scène, tandis que ses danseurs, aussi cosmopolites que peut l’être le Los Angeles de 2022, interprètent des partitions dans lesquels ils sont plus libres. Les airs de hip-hop se mélangent au classique. Be Here Now se divise en une multitude de séquences, parfois trop courtes et enchaînées de manière un peu artificielles.

Un duo, un quatuor ou un solo investit la scène, danse sa chorégraphie, toujours hybride, à la limite entre deux types de danses que Millepied prend plaisir à hybrider. L’occasion de donner à chacun·e la possibilité de briller, d’exister individuellement. C’est inventif, c’est vivant. Les références aux codes du ballet classique, nombreuses, sont évidentes et sont savamment détournées pour donner à Be Here Now l’allure d’un spectacle de son temps. S’éloigner de l’Opéra a du bon.

Journaliste

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