LITTÉRATURE

« Les filles bleues de l’été » – L’adolescence et ses peines

Les filles bleues de l'été
© Claudine Doury / Le Nouvel Attila

Texte poétique et mélancolique, Les filles bleues de l’été évoque, dans un langage à la prose gracile, l’amitié et les maux qui unissent deux adolescentes.

Elles s’appellent Chloé et Clara, sont amies depuis l’enfance, et personne ne peut mieux les comprendre qu’elles-mêmes. En réalité, personne ne parvient à les comprendre. « Je m’appelle Clara, je suis épuisée de chagrin », affirme l’une dès les premières pages. Les deux jeunes filles souffrent chacune de maux bien contemporains. Clara vit sous l’emprise d’un homme, tente de lui échapper, se fatigue d’amour, se sépare, recommence. Chloé, elle, ne parvient plus à se nourrir. Les autres autour d’elle, comme ses parents, parlent d’anorexie. Parfois, même, elle se scarifie.

Les deux amies prennent une décision radicale – à l’échelle de leurs vies, comprend-on – et décident de se couper du monde le temps d’un été, d’aller s’isoler dans une maison de vacances en pleine forêt, pour retrouver cet élan de vie qui leur manque. Elles tentent de guérir, d’être un peu moins inaptes à la vie. Ce sont l’amitié et l’amour qu’elles se portent l’une à l’autre qui les soutiennent.

«  Un soir de crise, j’ai délivré mon amie de ses angoisses. Nous avons respiré ensemble jusqu’au plus profond de l’adolescence. Nous avons respiré jusqu’au fond du regard des autres. Je l’ai vue renaître.  »

Les filles bleues de l’été, Mikella Nicol

L’Euphoria

Le roman alterne ainsi les voix des deux amies, qui, un chapitre sur deux, décrivent ce voyage à la fois extérieur et intérieur, sous-tendu par l’envie mutuelle et non avouée d’en finir avec la vie. Mikella Nicol flirte ainsi avec le mélo, en racontant la douleur de ces deux filles, pas tout à fait sorties de l’enfance, que rien ne semble consoler. Impossible de connaître l’origine de leur mal, ce qui compte c’est la grâce qui s’en dégage et la poésie que l’on peut en tirer, au risque de tomber parfois dans une forme de romantisme suranné.

C’est cet absolu de l’adolescence que l’autrice cherche à tout prix à exprimer, au risque de coller aux récits standardisés, qui vénèrent jusqu’à l’absurde les douleurs des ados, comme savent si bien en produire les séries, Skins et Euphoria en tête. L’écriture, somptueuse et lourde, parvient toutefois à donner de la chair à cette mélancolie inexplicable et parfois touchante.

Les filles bleues de l’été de Mikella Nicol, éditions Le Nouvel Attila/Seuil, 17 euros.

Journaliste

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