Toutes les deux semaines, les journalistes de Maze vous proposent un tour d’horizon des albums et EP qui ont fait l’actualité musicale.
JeanJass – Doudoune en été
Le rappeur belge JeanJass nous dévoile son deuxième album solo Doudoune en été. Des instrus posées et une ambiance intimiste qui donnent un rendu chill façon Népal. La voix grave et blasée du rappeur nous berce autant qu’elle nous transporte, tandis que la présence de Youssoupha et de Jazzy Bazz en featuring vient rééquilibrer le tout en apportant du tonus à l’album. Lyriquement, JeanJass surprend positivement avec des rimes percutantes et des punchlines subtiles et engagées comme dans Truman Show. On n’en retrouve pas moins le JeanJass enjoué de Bae (2018) avec un refrain chantant plutôt réussi dans Roberto Baggio.
Mention spéciale pour le titre Je glisse avec son envoûtante instru jazzy et ses paroles sagaces. Doudoune en été est une invitation à se repencher plus sérieusement sur la discographie solo de JeanJass qui est principalement connu pour le duo musical qu’il forme avec Caballero.
Sorti le 16 juin 2022.
Coups de coeur : Je glisse, Inconvénients
Marion Bauer
Snoop Dogg – Snoop Dogg Presents Death Row Summer 2022
Death Row Records est le label fondé par Dr. Dre ayant propulsé la carrière musicale de Snoop Dogg dans les années 90. Mais saviez-vous que le rappeur originaire de L.A. venait tout juste de racheter ladite marque en février 2022 ? Après avoir sorti son album solo Bacc On Death Row le lendemain du rachat du label pour marquer l’occasion, Snoop Dogg déroule le tapis rouge à ses nouveaux talents dans un album iconoclaste.
Nous y retrouvons les vétérans du hip-hop californien et les amis de longue route tels que le groupe Tha Eastsidaz et la chanteuse Latoiya Williams tout en découvrant les nouveaux protégés du Doggfather avec le chanteur soul October London et le prometteur duo r’nb 84faces pour ne citer qu’eux. Le Death Row Summer de Snoop Dogg se place sous le signe de l’exploration et de la vitalité avec pour passagers à bord non seulement le Rap West Coast mais aussi la soul et le funk.
Sorti le 17 juin 2022.
Coups de coeur : Touch away, Mulholland Drive, Higher Power, Bad
Marion Bauer
Foals – Life Is Yours
La barre était haute après Everything Not Save Will Be Lost. Sorti en 2019, le dyptique d’albums était pour certains les meilleurs opus du groupe, pour d’autres trop fouillis et débordant de fioritures. Mais le 17 juin 2022, Foals dévoile son 7ème album, Life Is Yours. S’ouvrant sur l’éponyme et lumineux Life is Yours, l’album annonce directement la couleur et enchaîne les morceaux diablement efficaces, jusqu’à l’interlude instrumental (summer sky). Jusqu’ici tout va bien, on ne voit pas passer la première moitié de l’album.
Alors qu’on aurait attendu un virage plus agressif et brut, Life Is Yours continue sur sa lancée, quitte à décevoir. Loin d’être foncièrement mauvais, l’album ne surprend pas mais joue la facilité d’un disque ensoleillé sorti au début de l’été. On ne prend pas de claque, on écoute d’une oreille. On troque les pogos et guitares saturées pour un groove léger et disco. Paradoxalement mais qu’on peut mettre au crédit de Life Is Yours, plus on écoute l’album, plus on l’apprécie. C’est déjà ça.
Sortie le 17 juin 2022.
Coups de coeur : 2am, Crest of the Wave, 2001
Basile Hervé
MUNA – MUNA
Yee-haw ! Le trio américain revient avec un album flamboyant, le premier sous le label Saddest Factory. Tout en continuant de tisser une pop dansante et nostalgique, le disque laisse apparaître un autre fil rouge : la country. Nichées au coeur de l’album, les ballades marquent l’écoute.
Kind Of Girl —proche des plus belles créations de The Chicks — ralentit la cadence et entre en terrain inconnu, loin des ajouts électroniques de Taken, tiré de leur opus précédent. Un freinage nécessaire après l’enchaînement des énergiques Silk Chiffon (partagé avec leur nouvelle boss, Phoebe Bridgers), What I Want et Runner’s High. Trois titres, preuve de la versatilité du groupe, qui oscillent entre guitares, synthés suaves et tendances techno. Cette dernière livraison célèbre l’identité et la liberté du trio, sans concessions et tout en franchise. « I wanna dance in the middle of a gay bar », entend-on sur la deuxième piste. Une nouvelle métamorphose pour le groupe, qui compte trois caméléons pour le prix d’un.
Sorti le 24 juin 2022.
Coups de coeur : Kind Of Girl, What I Want, Anything But Me, Runner’s High, Home By Now, Handle Me
Robin Schmidt
Drake – Honestly, Nevermind
Inaugurant le retour sur le devant de la scène de la house, la hitmachine canadienne fait un virage à 360 degrés. Résultat ? Un disque inattendu — décevant par moments — qui évite partiellement les formules habituelles du rappeur. Plus qu’un son signature, il a une emprunte musicale : prenez un beat lambda, quelques samples bien choisis parmi les grandes figures féminines du r’n’b américain et surtout, une bonne dose d’égo-trip.
Parfois ridicule, parfois génial, il ne laisse personne indifférent. Ici, on pencherait plutôt pour le premier, jusqu’à ce que Massive se lance et que l’on comprenne que la formule n’a rien perdu de son efficacité. Un son house à la Calvin Harris, circa 2014, et du Drake pur aux paroles. Ça sent l’été, ça sent l’insouciance, et l’époque rappelée est beaucoup trop proche pour que l’on appelle ça de la nostalgie. Mais ça fonctionne. L’écoute se poursuit, et Overdrive titille l’oreille. Le beat se coupe, et une guitare électrique occupe l’espace et clos la piste. De ces 14 titres, on ne s’en souviendra pas de beaucoup, mais ceux qui resteront marqueront les soirées d’été de beaucoup d’entre nous.
Sorti le 16 juin 2022.
Coups de coeur : Overdrive
Robin Schmidt
Yaya Bey – Remember Your North Star
C’est à coups d’instrus jazzy, house, soul, afrobeat ou encore reggae que Yaya Bey sort un premier album parfait, séduisant et captivant. Remember Your North Star nous emmène dans les pensées et la vie d’une femme noire au États-Unis subissant racisme et misogynie dans l’industrie, principalement masculine, de la musique mais pas que. Les sentiments de l’américaine guident aussi ce premier opus avec des chansons à la poésie urbaine flirtant avec ses désirs et ses insouciances romantiques.
La remise en question de sa propre existence sur alright montre que se reconstruire est rempli d’embuches, et ici la vie est sublimée par la prose de Yaya et la trompette douce qui porte ses mots comme avec le morceau reprise. Puis elle se la joue crooneuse avec rolling stoner balade jazz à la Billie Holliday qui se transforme en rn’b poignant pour enchainer sur le titre rageur don’t fucking call me à la basse saturée et groovy. La chanteuse américaine captive par ses engagements et joue avec les codes en mélangeant les styles avec grandeur et finesse pour 35 minutes (bien trop courtes) de pure extase sonore.
Sortie le 17 juin 2022.
Coups de coeur : Tout l’album.
Thomas Soulet
