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CANNES 2022 – « The Silent Twins »  : Soeurs tourmentées

The Silent Twins © Focus Features
The Silent Twins © Focus Features

SELECTION OFFICIELLE – UN CERTAIN REGARD Adapté du best-seller de Marjorie Wallace, The Silent Twins de Agnieszka Smoczyńska raconte la véritable histoire de sœurs silencieuses. Un récit délirant entre complicité et haine maladive, univers coloré et contemplatif. The Silent Twins est un véritable voyage des sensations.

Parmi les coups de coeur de la catégorie Un Certain Regard, il y a The Silent Twins de la cinéaste polonaise Agnieszka Smoczyńska. À travers un récit psychologique, coloré, inventif mais surtout réel, le duo joué par Eva-Arianna Baxter et Leah Mondesir Simmons (enfants) puis Letitia Wright et Tamara Lawrance rend hommage à la véritable histoire des soeurs June et Jennifer Gibbons. Récit insolite trouvant ses débuts dans les années 60, les deux sœurs avaient dès leur plus jeune âge fait le pacte de ne plus sortir un mot de leur bouche si ce n’est pour se parler entre elles. En raison aussi du harcèlement qu’elles subissaient car elles étaient les seules fillettes noires de leur école, elles ont rapidement développé un langage qui leur est propre, une forme de cryptophasie, phénomène de langues inventées, notamment des jumeaux.

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Focus Features

Mais la discrétion ne subsiste pas durant l’ensemble du film. Aux moments de silence s’ajoute un univers coloré et imaginaire provenant des récits qu’elles s’amusent à écrire et à élaborer dans leur chambre, leur petit paradis secret. La scène d’ouverture donne d’ailleurs une idée d’une certaine relation amie-ennemie qu’elles entretiennent notamment à travers l’émission de radio qu’elles s’amusent à enregistrer, laissant croire le spectateur pour qui le fait est inconnu, qu’il s’agira d’un récit léger, quand c’est tout l’inverse qui arrive. Car oui, il y’aura des moments qui laisseront le spectateur souffler, mais il y’aura surtout une descente aux enfers progressive. Le pacte de ces jeunes femmes va bien évidemment leur compliquer la vie. Aux sentiments d’incompréhension de leurs proches, s’ajoutent les scènes d’harcèlement à l’école et plus tard, leur intégration dans un établissement psychologique spécialisé.

Une réalisation colorée pour un monde fantasmé

Pour un film adapté d’une histoire vraie, Agnieszka Smoczyńska a su remplir sa mission. Elle détaille ainsi parfaitement l’opposition entre le quotidien sombre de ces femmes et l’univers inventif leur servant de catharsis. L’espace de quelques instants, la couleur et le contemplatif menés par des nuances claires pastel laissent penser que leur réalité aurait pu être tout autre, plus belle et plus douce.

En réalité, les soeurs Gibbons avaient créé ce monde pour échapper à leur quotidien ponctué d’incompréhension et de centres spécialisés. Elles s’étaient même mises à écrire des romans qu’elles n’hésitaient pas à envoyer à des maisons d’édition. L’une d’entre elles, June, a même vu son livre Pepsi-Cola Addict être publié. Le point commun de leurs histoires reste qu’elles sont toutes plus ou moins liées à la criminalité, poussant aussi la réalisatrice à représenter l’aspect dérangeant et décalé de leurs pensées. Une réalisation soignée, pensée au millimètre près et rendant hommage à un drame révélant plus que jamais les défaillances d’un système auprès de personnes atypiques.

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