Chaque mois, la rédaction littérature vous offre un petit résumé de quelques nouveautés BD fraîchement parues. Pour le mois de mai, des récits de guerre, celles du passé et celle en Ukraine, celles que les hommes font aux femmes et celle que chacun mène contre sa propre solitude.
Vent debout – Grégory Jarry, Lucie Castel et Nicole Augereau
Une famille en voyage en Asie du Sud-Est fait la rencontre d’un vieux routard, qu’ils ne tardent pas à retrouver effondré devant son café. Il a appris qu’un couple de navigateurs avait été assassiné par des pirates liés à l’État Islamiste. Avec ses bulles colorées et son trait de crayon brut, Vent Debout présente une galerie de personnage attachants, inspirés par la vie des marins allemands Jurgen Kantner et Sabine Merz.

Vent debout, par Grégory Jarry, Lucie Castel et Nicole Augereau aux éditions Delcourt, 29€95
Emma Poesy
Mauvaises filles – Ancco
Corée, années 90. Pour son entourage, Jin-joo est clairement une « mauvaise fille ». À 16 ans, elle fait les quatre cent coups, fume et découche. Mais le prix de sa liberté est de se faire violemment « corriger » par les adultes autour d’elle (ses professeur·es, son père et ses voisins). Après sa rencontre avec Jung-ae, une « mauvaise fille » comme elle, elles décident de fuir ensemble vers le seul horizon qui s’offre à elle : les bars à hôtesses. On comprend entre les lignes que la vie de Jin-joo est fortement inspirée de celle de l’autrice. Avec son trait très sombre et son sujet atypique dans le paysage culturel coréen, Mauvaises filles fait partie du cercle très restreint de la bande dessinée indépendante du « pays du matin calme ».



Mauvaises filles, par Ancco aux éditions Cornélius, 23€50
Anaïs Dinarque
The Neighbors – Laurent Cilluffo et Jeff Gomez
C’est jaune, c’est minimaliste, et c’est réjouissant. Dans un dessin expérimental qui approche les zones grises de l’art contemporain, Laurent Cilluffo et Jeff Gomez racontent le quotidien d’un homme, récemment installé à New-York grâce à un couple d’amis retourné vivre en France. Intrigué par les bruits du voisinage, ce dernier se met en tête de rencontrer ses voisins. Une belle fable minimaliste sur la vie dans les grandes villes et l’immense solitude qu’elle charrie.



The Neighbors, par Laurent Cilluffo et Jeff Gomez aux éditions de l’Association , 23€
Emma Poesy
Poutine – Daryl Cunningham
L’invasion de l’Ukraine par la Russie a fait de Vladimir Poutine le dictateur le plus central des dernières semaines. À un moment où il est crucial de comprendre les mentalités d’un pays et d’un dirigeant va-t-en guerre pour mieux comprendre l’ampleur de cette crise géopolitique, Darryl Cuningham propose un portrait éclairé du maître du Kremlin, depuis son enfance à Leningrad jusqu’à son ascension rapide au sein du KGB. Une bande-dessinée moins axée sur la forme que sur le fond, qui aide à comprendre l’immense crise que nous traversons.



Poutine, par Daryl Cunningham aux éditions Delcourt, 19€99
Emma Poesy
N’en parlons plus – Weng Pixin
L’artiste d’origine Singapourienne Weng Pixin a d’abord publié en 2020 Sweet Time qui mélangeait fiction et autobiographie. Avec N’en parlons plus, elle reprend la même combinaison en distillant des éléments de sa vie dans de la fiction. En superposant cinq générations de jeunes filles d’une même famille, Weng Pixin trace une ligne généalogique entre le passé et le futur, entre 1908 et 2032. Elle part de son arrière-grand-mère, Kuān, et termine avec Rita, sa fille de papier qui vit en 2032. Toutes les cinq devront affronter des situations difficiles dans un monde sans pitié, entre famine et sexisme. Les peintures ultra vives de l’artiste subliment ces cinq portraits.



N’en parlons plus, par Weng Pixin aux éditions Motus, 17€
Anaïs Dinarque
Tant que nous sommes vivants – Frédéric Bihel
Presque dix ans après la sortie du roman Tant que nous sommes vivants (2014), Frédéric Bihel adapte en roman graphique le texte d’Anne-Laure Bondoux. Il parvient avec brio à adapter l’histoire imaginée par l’autrice de La Princetta et du Capitaine. Hama et Bo fuient la guerre et se réfugient en forêt. Bientôt, Hama donne naissance à une enfant, Tsell. La petite famille est alors accueillie par un peuple souterrain dans un petit dédale de galerie appelée le Bas. Les dessins servent l’histoire originale grâce à un beau jeu de lumière et des détails foisonnants. Une belle réussite qui permet de donner une seconde vie à ce beau texte.



Tant que nous sommes vivants, par Frédéric Bihel aux éditions Futuropolis, 24€
Anaïs Dinarque