ACID – Présenté en ouverture de l’ACID, le deuxième film de Nicolas Peduzzi a des allures d’opéra crépusculaire. Se glissant dans une très mince frontière entre le documentaire et la fiction, Ghost song hypnotise par son montage enlevé. La caméra s’immisce auprès de trois personnages : OMB Bloodbath, William Folzenlogen et la ville de Houston.
La musique hante la ville de Houston et ses personnages. Du rap au folk, les protagonistes s’expriment par le chant et des logorrhées brutes. Comme un acte de résistance à un monde en perdition, la caméra de Nicolas Peduzzi, toujours en mouvement plonge dans les quartiers de Houston. Le cinéaste saisit des instants de vie ou plutôt de survie. Ses captations brisent la démarcation souvent appuyée entre le documentaire et la pure fiction – comme beaucoup de films sélectionnés par l’ACID. Un flou persiste entre le réel et l’écriture. Le montage et la musique semblent faire film des images prises dans un élan pour créer un tout menacé par l’arrivée proche d’un ouragan.
Dans les profondeurs humides de la ville, deux quartiers et deux milieux sociaux s’entrecroisent créant une forme de symphonie. Le réalisateur y dégage deux personnages étonnants. D’abord, personnage atypique, la rappeuse OMB Bloodbath, ex- cheffe de gang qui tente de se cacher depuis le décès récent d’un ami proche. Puis, William, issu d’un milieu aisé qui traine dans les rues consumé par ses addictions.
Tous.tes deux rôdent dans cette ambiance crépusculaire, ce Houston underground mélangeant sans le savoir leur différentes intimités. Comme la ville, le cadre les enferme, ilelles ne peuvent en partir et pourtant ilelles envahissent chaque plan d’élans de vie mêlés à une forme de mélancolie lancinante. Autour d’eux flotte un parfum apocalyptique où la musique apparait comme seule échappatoire.
Entre les coups de feux, les confessions intimes, la tendresse partagée avec les proches, les deux acteurs.rices se livrent à corps perdus à la caméra, se raconter pour survivre. Il y a dans Ghost song un parfum d’apocalypse et d’onirisme mêlé à la réalité âpre du Texas et d’une Amérique en naufrage que l’Ouragan vient achever. Le deuxième long-métrage de Nicolas Peduzzi s’empare de nous pour nous hanter longtemps après sa projection comme seuls les grands cinéastes en ont le pouvoir.