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Rencontre avec Vincent Macaigne – « Ce n’était pas un rôle à jouer, il fallait réussir à l’attraper pour de vrai »

Vincent Macaigne
©Thomas Soulet

À l’occasion de la sortie du film Médecin de nuit réalisé par Elie Wajeman ce mercredi 16 juin 2021, nous avons pu rencontrer Vincent Macaigne, rôle principal du film, au China Club.

Elie Wajeman nous convainc avec sa troisième réalisation Médecin de nuit. C’est avec un casting en or, constitué de Pio Marmai, Sara Giraudeau, Sarah Le Picard et Vincent Macaigne, que nous découvrons ce thriller palpitant. Mikaël, interprété par Vincent Macaigne, est un médecin de nuit submergé de choix difficiles. Il possède une nuit pour reprendre sa vie en main afin d’éviter le pire. Alors que tous les acteurs brillent et mettent leur pierre à l’édifice dans ce film, nous découvrons un Vincent Macaigne changé et époustouflant. Plus costaud, plus charmeur, plus viril. Habitué à le voir dans des films du type comédie dramatique ou romantique (Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait, La Loi de la jungle,  Deux automnes trois hivers), l’acteur nous éblouit dans ce rôle empli de décisions stressantes et fatidiques. De plus, la réalisation nocturne et bluffante de Elie Wajeman rivalise avec les grands thrillers américains.

Nous avons pu rencontrer en janvier Vincent Macaigne afin d’en savoir plus sur ce film saisissant et sur son rôle musclé et prenant. Nous y évoquons bien sûr le film et sa préparation, mais aussi les choix de la vie, l’impact de la ville sur l’humain, la drogue et les sentiments. Une rencontre éclair tel un uppercut.

Comment vous êtes-vous préparé pour le rôle de Mikaël ? Car il sort un peu de ce que vous avez l’habitude d’interpréter au cinéma.

Je me suis préparé sur plein de plans différents. Déjà avec Elie, on a organisé des visites avec des médecins de nuit. Ensuite il m’a demandé de passer mon permis car je ne l’avais pas et puis je sortais du film de Laurent Lafitte où j’étais un peu plus enrobé car pour Médecin de nuit j’ai dû perdre 20-30 kilos. J’ai dû faire pas mal d’activités sportives ce qui m’a mis dans une sorte de belle énergie de sport et d’effort.

De plus, on a beaucoup travaillé sur le scénario en relisant les scènes des enjeux, voir comment on pouvait les améliorer et nous permettre de mieux entrer dans le film. Car c’est quand même un film qui se passe en une nuit. Du coup, l’enjeu était aussi que le film soit tout le temps hyper haletant, que le héros soit un peu comme dans ce genre de personnage dans L’Impasse de Brian De Palma. C’est le type de film où les protagonistes sont pris en étau donc il fallait bien intégrer toute la dramaturgie et tous les enjeux. On a donc eu beaucoup de discussions.

Vous parliez de visites organisées avec des médecins de nuit, comment ce sont passées ces visites ?

C’est assez beau parce que c’est vraiment un travail qui est lié à l’écoute. Car il faut vite déterminer si on a affaire à quelqu’un qui a une crise d’angoisse ou quelqu’un qui est vraiment malade. On peut avoir des gens qui font des crises cardiaques dont les symptômes sont très similaires à une crise d’angoisse. Donc faut être à l’écoute, faut vite comprendre et prendre des bonnes décisions. C’est un travail hallucinant. Il y a un accès à des gens très différents avec des mots très différents.

Comment c’est passée cette collaboration avec le réalisateur Elie Wajeman ?

Très bien. Après on était sur un tournage de nuit. On était entrés dans une sorte de tunnel de tournages de nuit qui étaient très resserrés dans le temps. Par rapport à un tournage un peu normal, c’était assez brut. On était une petite équipe, on a privilégié ça en fait. Cette chose-là est un peu brutale. Du coup, ça m’a fait entrer dans le personnage et dans ce truc un peu tendu, un peu fatigué et en même temps aux abois. Un rôle qu’il ne fallait pas jouer mais qu‘il fallait réussir à attraper pour de vrai.

Le réalisateur Elie Wajeman a dit dans une interview que vous aviez envie d’embarquer avec lui dans cette tension et cette violence que l’on retrouve dans la grande ville, pourquoi cette envie ? Et en quoi la grande ville inspire la violence ?

Ça inspire aussi la solitude. La solitude qu’on peut voir aussi dans le film avec justement les patients que Mikael va visiter. Mais aussi ces solitudes perdues, cette violence que ça crée. C’est vrai en plus que la violence sociale qu’il peut y avoir aussi dans les villes, elle a un écho sur nous en fait et on le ressent.

Alors malheureusement, mais en même temps c’est une base très cinématographique, ce film me fait penser aux films du nouvel Hollywood et quelque part le New York ou ces villes-là, très brutales. Ce film-là touche quelque chose comme ça aussi parce que ça existe pour de vrai dans Paris. Donc évidemment le film va chercher ces choses-là. Le médecin de nuit ou ce qui est la vérité du médecin de nuit, il a accès à différentes personnes, différentes solitudes, à différents moments de vie avec gens très distincts, que ce soit des personnes riches, pas riches. Du coup, ça donne une ouverture, une sorte de cartographie de la ville et de l’être humain dans la ville qui est assez folle.

Vous pensez qu’elle est dû à quoi cette solitude amenée par la ville ?

C’est la brutalité de la ville. La brutalité sociale. Les loyers, le travail, la brutalité des rapports humains et les solitudes que ça crée. Après tout n’est pas noir. Il y a les lieux culturels, enfin pas en ce moment, les bars et la vie aussi. Il y a des choses biens et des choses pas biens. C’est pas forcément mieux d’être à la campagne non plus.

© Diaphana Distribution

Dans le film, votre personnage doit souvent choisir entre «  le bien et le mal  », comme sa femme et sa maitresse, aider des drogués ou vendre du subutex pour des dealers, ou encore votre personnage qui est parfois doux ou très violent par moment. Votre rôle est comme dans un dilemme permanent. Ça vous est déjà arrivé de devoir faire des choix aussi extrêmes ?

Non, pas aussi extrême évidemment. Je n’ai jamais dealé de subutex, ni de fentanyl. (rires) Ce que je trouve très attachant dans ce personnage c’est qu’il est très humain. En fait, il a beaucoup de nœuds, beaucoup de poids à porter mais il essaye de résoudre ces problèmes un à un. Du coup, c’est pour cela qu’on s’attache à lui car il ne perd pas pied. Il va jusqu’au bout de sa nuit, de sa vie on pourrait même dire. Afin de régler les problèmes qu’il a engendré. Ce qui est très beau c’est qu’il a engendré des problèmes et il en a conscience. Ça ne veut pas dire qu’il va trouver les solutions mais c’est toujours beau ce genre de personnage qui a conscience de l’endroit où il en est. Un peu comme dans L’Impasse encore une fois. C’est très humain et à interpréter c’est génial.

Nous restons dans cette histoire de choix. Sarah Le Picard et Sara Giraudeau sont un des choix les plus important pour votre personnage. Laquelle choisiriez-vous et pourquoi ?

C’est compliqué. En plus, dans les films les deux actrices sont formidables. Indépendamment bien sûr, on parle beaucoup de Sara Giraudeau mais Sarah Le Picard est remarquable dans le film. C’est aussi une des grandes qualités du film. Ce n’est pas une femme au foyer bête et méchante, non, c’est vraiment sa vie qui l’a construite contre une vie qui la détruit. L’actrice Sarah Le Picard amène quelque chose dans ce rôle là. Elle le grandit ce personnage.

Mais Sara Giraudeau aussi. Chaque acteur amène sa particularité, sa fantaisie. C’ est un film de genre avec aussi des symboles et des caractères qu’on connaît un peu mais qui sont différents. Du coup, il y a un effet de réel. En fait, on a beaucoup accès à la particularité de chaque comédien.

L’histoire de Mikaël est un peu comme un shoot d’héroïne, il veut s’arrêter mais il n’arrive pas à décrocher. Du coup, je me suis demandé si vous étiez une drogue vous seriez laquelle ?

Je pense que je serais quelque chose qui énerve, qui soit nerveux bizarrement. Il m’est arrivé de prendre pas mal de morphine pour des raisons médicales et c’est vrai que ça m’a beaucoup calmé. Mais je suis quelqu’un de très nerveux et très réveillé.

Pour finir, c’est un film qui tourne beaucoup autour des sentiments, de ce qu’ils engendrent. C’est même l’une des première phrase du film. Quand l’un des drogués que Mikaël soigne lui dit que plus ou moins une vie sans sentiments n’est pas une vie. Vous en pensez quoi de ça ?

Et bien c’est vrai. Enfin déjà, est-ce que ça existe vraiment une vie sans sentiments ?

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