Deux fois par mois, la rédaction se dédie entièrement au « petit écran » et revient sur une série pour la partager avec vous. Toutes époques et toutes nationalités confondues, ce format pourra vous permettre de retrouver vos séries fétiches… ou de découvrir des pépites. Aujourd’hui, c’est au tour de la série télévisée américaine New Girl.
Créée par Elizabeth Meriwether et originellement diffusée sur la chaîne américaine Fox de 2011 à 2018, New Girl arrive en France en 2012. Sitcom en 7 saisons, elle est d’abord diffusée par TF6, avant de basculer sur M6. La série s’achève en 2018 avec une septième saison réduite, ne comportant que huit épisodes, plutôt que les traditionnels vingt-cinq des autres saisons.
La série s’ouvre sur un loft dans lequel Jessica Day, dite « Jess » (Zooey Deschanel), fait face à ses trois nouveaux colocataires. Récemment séparée, la jeune femme cherche un nouvel appartement lorsqu’elle tombe sur l’annonce postée par Nick (Jake Johnson), Schmidt (Max Greenfield) et Coach (Dwayne Johnson Jr). Si ce dernier part après l’épisode pilote, il est immédiatement remplacé par un autre colocataire, Winston (Lamorne Morris), et les quatre protagonistes entament une tranche de vie longue de sept saisons ensemble.
Un scénario léger et rafraîchissant
L’originalité de New Girl réside dans son scénario décalé et divertissant. En racontant des scènes de la vie quotidienne à travers le prisme de l’absurde et du comique, il en fait un bon exutoire. Idéal pour qui souhaite se distraire et s’éviter de trop réfléchir.
La série invite à suivre les aventures de Jess, Nick, Winston, Schmidt, Coach et Cece (Hannah Simone). L’histoire agit comme un calendrier s’étalant sur plusieurs années, suivant de manière relativement fidèle le cours du temps. On retrouve ainsi des épisodes similaires au fil des saisons. Cela permet de se situer dans la vie des personnages, et de se remémorer les saisons précédentes en fonction des évènements récurrents. C’est notamment le cas pour le jour de Thanksgiving de Noël ou encore d’Halloween.
Ce respect de la ligne temporelle invite le spectateur à participer à la vie des protagonistes, presque comme s’il observait des voisins par une fenêtre. Leurs préoccupations sont banales, réalistes, et pourraient facilement s’observer au-delà du petit écran. Elles sont néanmoins exagérées, teintées d’absurdité, afin de permettre cette fenêtre de surréalisme qui caractérise la fiction. Le format des épisodes – vingt minutes – permet d’appréhender chaque sketch comme un instant où l’on se laisse porter. Cependant, ce sont les personnages, et la manière dont ils sont écrits, qui constituent le cœur de la série.
L’amitié, la vraie, au coeur de l’histoire
L’action de la série tourne intégralement autour des personnages, leurs vies professionnelles et amoureuses et leur manière de les gérer. Tous possèdent des caractéristiques contribuant à l’intérêt du scénario, Jess en tête. L’ institutrice interprétée par Zooey Deschanel, maintes fois saluée pour ce rôle, vit en complet décalage avec le monde actuel. Éternelle optimiste, naïve compulsive, Jess est de ces gens intimement persuadés de la nécessité de faire du bien autour de soi, quoi qu’il en coûte. Profondément gentille, son caractère se heurte à la rugosité du monde et des autres. Mais elle présente des convictions et un enthousiasme indéfectibles.
Elle constitue ainsi le personnage principal idéal en ce qu’elle est un modèle pour chacun, tout en se trouvant parfois dans des situations improbables. Elle peut évidemment paraître détestable à certains moments. Mais il est impossible de la haïr : elle est l’incarnation de ce que l’on appelle « quelqu’un de bien ».
Son alter ego, sa meilleure amie Cece, habille l’autre côté de la vie avec brio. Mannequin depuis son adolescence, d’une beauté renversante, la jeune femme enchaîne les histoires désastreuses et se cherche encore, alors même qu’elle a dépassé la trentaine. Tout le contraire de Jess, institutrice passionnée depuis le premier jour, Cece incarne cette personne un peu moins parfaite dans laquelle on se reconnaît un peu plus. Elle apprend la mesure et, si elle mène la vie dure à Jess, les deux amies représentent une des amitiés les plus équilibrées qui a été donnée à voir dans une série télévisée.
Une coloc aux multiples nuances
Ces deux protagonistes féminins forts contrebalancent les hommes qui les entourent. La coloc n’est en effet pas seulement animée par l’enthousiasme débordant de Jess. Coach (remplacé jusqu’à la saison quatre pour cause d’un enchaînement de tournages de son interprète) est un homme, « un vrai », dans toute la splendeur de ses stéréotypes. Il aime le sport, c’est un tombeur et il refuse de devenir « copain » avec une fille. Au fil des saisons, il se révèle pourtant sensible et attentionné. La découverte d’une partie de son passé achève de convaincre sur son bon fond.
Winston, qui arrive pour remplacer Coach, est unanimement le personnage le plus absurde de la série. Brillamment interprété par Lamorne Morris, il incarne toutes les contradictions humaines possibles et imaginables. Joueur de basket professionnel en Laponie. Obsédé par les chats. Nounou à ses heures perdues. Il est en fait impossible à décrire. Il meuble ainsi chaque épisode par ses élucubrations d’homme lunatique tentant de se tracer un chemin à peu près stable, ce qui donne un résultat souvent hilarant.
Des personnages insupportables, mais si attachants
L’ami d’enfance de Winston, Nick, est le pilier de la colocation. Barman reconverti après un passage foireux à l’école de droit, il se rêve écrivain de romans de zombies. Nick ne croit ni aux banques, ni aux téléphones portables. Il appelle les tortues des « castors à carapace », et se voit un jour camionneur sur Mars. Ni les dinosaures, ni l’alunissage n’ont, selon lui, existé : que des complots. Au fil de la série, on se demande constamment comment il a réussi à atteindre les trente ans. À le voir, il nous vient soit l’envie de le secouer, soit de nous taper la tête contre le mur. Et pourtant, il a ce charme indicible, et ce fond profondément bon, qui lui permettent de s’en sortir, malgré tout.
Le dernier colocataire, Schmidt, divise l’audience. Ancien enfant obèse, juif des banlieues de New York, il a tout fait pour s’extirper de ce carcan. Sportif et boulimique, il est désormais directeur marketing dans une entreprise de publicité entièrement peuplée de femmes. Conscient de son nouveau corps, il a alors incarné le tombeur, enchaînant les conquêtes comme une sorte de record personnel. Caractérisé par une peur maladive de l’abandon, il est extrêmement attaché à Nick, son meilleur ami, qu’il partage de mauvaise grâce avec Winston. Schmidt est proprement détestable mais, comme Coach, il séduit par son passé d’enfant blessé, et son besoin profond d’amour.
« La coloc’ » est un cercle de misfits, de personnes complètement perdues aux manies plus ou moins étranges et attendrissantes. C’est en cela qu’elle séduit, qu’elle touche, et qu’elle fascine.
Une vie comme toutes les autres
Il peut paraître absurde d’être aussi attaché à de simples tranches de vie, mais là est la magie de New Girl : elle nous fait aimer la vie dans toutes ses galères. De prime abord, la série paraît légère, une sitcom comme les autres. Cependant, au fur et à mesure que l’on avance, le sentiment change. Chaque action, chaque péripétie, chaque manie des personnages, on les retrouve un peu en nous. Finalement, tout ce qui leur arrive pourrait arriver à n’importe qui dans notre entourage. Et la manière dont les personnages gèrent leurs problèmes nous redonne confiance. Il est assez jouissif de se reconnaître dans une situation qui, vue à l’écran, nous fait rire. Cela permet de dédramatiser et d’affronter différemment les choses.
Finalement, New Girl ne nous émancipe pas tant que ça de la réflexion profonde. Si la série semble simplette, parfois ridicule – à l’instar de toutes les sitcoms – force est de constater qu’elle ressemble quand même sacrément à la vraie vie. C’est en cela que réside la force de New Girl et de ses protagonistes : elle aide à vivre par la catharsis.
D’un côté, le spectateur prend plaisir à les suivre, les regarder, et finalement vivre avec eux. De l’autre, il se rend compte de la vérité qui se cache derrière chaque sketch, chaque réaction de personnage. De même, les relations humaines présentes sont parfois frustrantes car imparfaites, maladroites, si éloignées de ce que l’on voit habituellement sur écran. Mais c’est parce qu’elles se rapprochent au maximum du réel, et que le réel est ainsi, maladroit et imparfait.
Finalement, New Girl est le genre de série que l’on commence pour se distraire un soir, et que l’on finit par regarder à chaque fois que l’on a un moment de libre.