CINÉMA

Afrique du Nord et Moyen-Orient : 10 femmes, 10 films

Getty Images

Du Maroc à la Palestine, en passant par l’Arabie Saoudite et le Liban, tour d’horizon des meilleures œuvres cinématographiques réalisées par des cinéastes d’origine arabe ou maghrébine, qui partagent toutes le désir de faire changer les choses par leur art.

Après la diffusion sur Arte le 1er avril dernier de Wadjda, le tout premier film à avoir été réalisé par une femme saoudienne (disponible en replay sur leur site jusqu’au 29 juin prochain), la nécessité de compiler les plus belles réalisations de femmes moyen-orientales ou maghrébines se faisait pressante. D’autant plus que ces femmes engagées osent se munir de leur caméra et aborder des sujets sensibles dans leur société d’origine, dans une industrie du cinéma qui demeure particulièrement masculine.

1. Papicha de Mounia Meddour (2019)

Algérie, décennie noire, les informations relaient des nouvelles sombres  : une guerre civile s’annonce, entre l’armée d’un côté, et les islamistes d’un autre. Nous sommes au début des années 90 et Nedjma, une jeune étudiante universitaire d’Alger passionnée par le stylisme, entend bien résister. La réalisatrice nous emmène dans la vie d’une papicha assoiffée de liberté et bien décidée à organiser un défilé de mode, quoi qu’il en coûte.

« Mon héroïne n’est pas une militante mais ce qu’elle fait est un acte de résistance »

Mounia Meddour, Cine-Woman

2. A peine j’ouvre les yeux de Leyla Bouzid (2015)

Quelques mois avant que la Tunisie ne soit embrasée par la fougue révolutionnaire, Farah, 18 ans, se heurte au conservatisme liberticide de la société. Elle aime, fait la fête et surtout, chante dans un groupe de rock aux mélodies engagées, au grand dam de sa famille, qui la rêve médecin. Dans ce premier long-métrage signé Leyla Bouzid, on vibre au son de la voix envoûtante de Farah, on assiste à son passage à l’âge adulte et on s’insurge de l’état policier mis en place par Ben Ali.

«  J’ai voulu revenir sur la sensation d’étouffement, la peur continue qu’on ressentait alors  »

Leyla Bouzid, GeopolotisFTV

3. Divines de Houda Benyamina (2016)

Ce film, emmené par la réalisatrice française d’origine marocaine Houda Benyamina, a décroché la Caméra d’Or au Festival de Cannes 2016. Disponible sur Netflix, c’est l’histoire de Dounia, une lycéenne avide de pouvoir et de succès, que l’on suit. Un désir de revanche l’anime, elle qui toute sa vie a connu la précarité. Conjointement avec sa meilleure amie, Maimouna, elle décide de se mettre au service d’une dealeuse respectée dans le quartier.

«  Mon besoin de créer vient toujours d’un sentiment d’injustice »

Houda Benyamina, Allociné

4. Capharnaüm de Nadine Labaki (2018)

Nadine Labaki a ému tout le monde avec son chef-d’œuvre Capharnaüm. Elle y conte l’histoire de Zain, un jeune garçon de 12 ans, un sans-papiers pauvre des quartiers pauvres de Beyrouth, qui survit comme il le peut au jour le jour. Le film s’ouvre sur une scène forte  : Zain décide de poursuivre ses parents en justice. Le chef d’accusation  ? Ils lui ont donné la vie, une vie faite de misère et de souffrance.  La réalisatrice décrit ainsi une réalité inhumaine, bien trop banale, dont les acteurs eux-mêmes ont fait les frais.

«  On ne peut plus tourner le dos à ces enfants qui se débattent comme ils peuvent dans ce capharnaüm qu’est devenu le monde.  »

Nadine Labaki, discours Festival de Cannes 2018

5. À mon âge, je me cache encore pour fumer de Rayhana (2016)

Avec pour toile de fond un hammam, les Algéroises se confient, se querellent, pleurent et rient. Immersion intimiste dans les différentes strates de la société algérienne des années de plomb, entre femmes attachées aux traditions, femmes aux pensées subversives et femmes aux pensées extrémistes. Mais dans la folie islamiste qui s’est emparée du pays, cet endroit autrefois havre de paix féminin va lui aussi devenir le théâtre d’une tragédie…

« Dans ma société, le hammam est un des rares lieux où une femme peut aller sans réprimande.  »

Rayhana, Allociné

6. Pour Sama de Waad Al-Kateab (2019)

Waad Al-Kateab se saisit pour la première fois de sa caméra en 2011, pour garder une trace de la contestation qui embrase son pays, la Syrie, dans la foulée des ‘Printemps arabes’. Aurait-elle pu imaginer que Pour Sama deviendrait l’une des rares archives de l’horreur vécue sous les bombes du régime dans sa ville chérie et assiégée d’Alep  ? Récompensé de l’Oscar du meilleur documentaire, voir ce film, c’est accomplir un devoir de mémoire absolument nécessaire.

«  J’apportais la vie là où seule la mort était semée.  »

Waad Al-Kateab, Madame Le Figaro

7. Wadjda de Haifaa al-Mansour (2012)

L’un des premiers films tournés en Arabie Saoudite, et le tout premier dirigé par une saoudienne. A l’image de la réalisatrice, Wadjda a du courage, du courage pour remettre en cause l’interdiction pour les filles de son pays à faire du vélo. A l’âge de 12 ans, manquant des fonds nécessaires à l’acquisition de l’objet qui la fait tant rêver, elle décide alors de participer à un concours de psalmodie du Coran.

«  Pendant le tournage de certaines scènes de rue dans les faubourgs de Riyad, il a parfois fallu que je dirige les acteurs depuis l’intérieur d’un van, via un talkie walkie.  »

Haifaa al-Mansour, Telerama

8. Mustang de Deniz Gamze Ergüven (2015)

Début de l’été, cinq sœurs s’adonnent à des jeux insouciants sur la plage qui borde leur village turc. Ce qu’elles ignorent, c’est que monter sur les épaules d’individus de sexe masculin est contraire à la morale et leurs amusements adolescents déclenchent un scandale. Leur existence va peu à peu se transformer, et de la relative liberté dont elles jouissaient, il ne reste plus rien. Captives de la maison familiale, les sœurs essaient d’échapper au joug patriarcal qui les étouffe.

«  On ne fait pas un film comme un discours politique, (…) le film exprime les choses de manière beaucoup plus sensible et puissante que je ne pourrais le faire.  »

Deniz Gamze Erguven, Allociné

9. Je danserai si je veux de Maysaloun Hamoud (2016)

Trois Palestiniennes partagent un appartement à Tel Aviv, où, loin du carcan familial, elles tentent de vivre comme elles l’entendent. La cinéaste nous livre une plongée intimiste dans l’existence de ces femmes qui aspirent à être libres et aimées pour ce qu’elles sont. Un hymne à la solidarité féminine.

«  Mon film est né d’un désir de révolution.  »

Maysaloun Hamoud, Marie Claire

10. Adam de Maryam Touzani (2019)

Samia erre dans la médina de Casablanca, à la recherche d’un boulot qui pourra assurer sa subsistance et celle de son futur enfant. En effet, Samia est enceinte, mais elle n’est pas mariée, synonyme de crime et de déshonneur. C’est à un drame malheureusement banal auquel la cinéaste marocaine s’intéresse, dans un pays où l’avortement et les relations sexuelles hors-mariages sont illégaux.

«  J’avais envie de parler des traditions dans le film : de celles qu’on perpétue, […] mais aussi de celles qu’on devrait pouvoir remettre en question.  »

Maryam Touzani, Le quotidien du cinéma
Community Manager Instagram, rédactrice dans les rubriques Actu, Musique, Littérature et Cinéma, passionnée par la région MENA, les femmes et les luttes sociales

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