München – Haus der Kunst © Carla Wosniak (CC BY 2.0)
On se fait un musée ? Maze vous embarque pour une visite guidée de musée, qu’il soit mythique comme le MET, insolite comme le Musée de la chasse et de la nature, à couper le souffle comme le Louvre Abu Dhabi ou qu’il demande encore à être connu… Épisode 4 : la Haus der Kunst de Munich – que l’on traduit comme Maison de l’art – dont l’architecture totalitaire témoigne du passé trouble de l’ouvrage.
Située en bordure du plus grand parc de Munich, la Haus der Kunst impressionne par ses dimensions : 175 mètres de long sur 75 mètres de large et 30 mètres de hauteur. Typique de l’architecture du IIIe Reich, l’édifice est érigé sur les plans de l’architecte Paul Troost à partir de 1933 faisant suite à un incendie qui détruisait le Palais des Glaces – à l’époque le plus grand espace d’exposition de Munich – deux ans plus tôt.
Une architecture imposante
Construit à partir d’une symétrie stricte, le musée en impose aussi par ses matériaux, entièrement constitué de béton armé, de pierre et de marbre. Sur ses façades, du côté de la rue et du jardin sont ainsi disposées vingt colonnes et deux piliers aux extrémités ajoutant encore au gigantisme de l’édifice. Le musée étant tourné vers la ville, c’est depuis la rue que l’on accède aux espaces d’exposition de la Haus der Kunst et déjà depuis l’entrée, on se figure la hauteur de l’ouvrage.
Les espaces d’exposition se divisent en plusieurs salles moyennes, équipées d’un éclairage adapté, de vidéos projecteurs et autres outils numériques, qui chacune donnent sur une grande pièce centrale bénéficiant d’une lumière zénithale grâce à une large verrière de toit – anciennement surnommée Ehrenhalle, trad. salle de représentation. Sous le régime nazi, c’est là que se sont tenus de nombreux discours.
Un passé lourd de sens
Si l’architecture du bâtiment témoigne en effet de son passé totalitaire, il a aussi été l’un des lieux où s’est exercé le pouvoir de propagande du régime nazi. En témoigne l’exposition inaugurale du musée, organisée en grandes pompes au mois de mars 1937, qui avait pour titre « Grande exposition d’art allemand » – trad. Große Deutsche Kunstausstellung – et qui visait à condamner l’art moderne dit « dégénéré ».
Deux ans plus tard, c’est à l’occasion de la « Journée de l’art allemand », monumentale célébration de « 2000 ans de culture germanique » qu’est présentée un Parteiadler – autrement dit l’aigle du parti, emblème du régime nazi – de 5 mètres de hauteur, événement pour lequel seront notamment présents Adolf Hitler, Hermann Göring, Joseph Goebbels ou encore Heinrich Himmler.
La suite de l’histoire
Occupé un temps par les américains au sortir de la Seconde Guerre mondiale, ce n’est qu’à partir de 1946 que le musée retrouve sa fonction, notamment pour l’organisation de salons et expositions temporaires. Jusqu’en 2002, la Haus der Kunst abrite la Collection nationale d’art moderne et art contemporain, désormais déplacée dans la Pinakothek der Moderne.
Si le musée ne dispose toujours pas, à ce jour de collection permanente, il renouvelle régulièrement ses expositions temporaires et itinérantes. On peut également s’y rendre pour découvrir le P1 Club – discothèque surnommée ainsi en référence à son adresse – ou encore son café Le Golden Bar rénové depuis 2010 et dont les représentations murales rappellent la fonction initiale de l’édifice. Un clin d’œil symbolique bienvenu dans ce lieu chargé d’histoire.
Aujourd’hui en discussion, des travaux de rénovation de l’édifice font d’ailleurs polémiques. Les habitants et élus de la ville craignent un « retour en arrière » si l’intervention architecturale sur le bâtiment venait à révéler encore davantage son esthétique nazie.