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Talking about trees de Suhaib Gasmelbari raconte l’histoire de quatre réalisateurs octogénaires qui tentent de redonner une place au cinéma dans la société soudanaise.
Ce film a la limite du documentaire rend un magnifique hommage au cinéma soudanais et africain, très mal connu en Europe. L’intrigue est très resserrée autour de l’ enjeu dramatique : quatre cinéphiles, Ibrahim, Suleiman, Manar et Altayeb, se mettent à rêver d’organiser une grande projection publique dans la capitale Khartoum et de rénover une salle de cinéma à l’abandon. En effet, la ville ne propose pas de salles de spectacle, ni d’offre culturelle. Les rassemblements sont prohibés à l’exception des rassemblements religieux. Les productions culturelles sont censurées. S’ensuit alors, pour les quatre hommes, une longue procédure administrative qui n’aboutira pas.
Beauté brute
Le film présente régulièrement des extraits de la production passée et contemporaine des quatre protagonistes. On retiendra notamment les propositions d’Ibrahim. La délicatesses de ces hommes, magnifiques peu ambitieux mais simplement désireux de faire connaitre les beautés du septième art est touchante. Leurs échanges sont remplis d’une simplicité et d’un éclat d’une beauté brute. Pour un public restreint, il parviennent à projeter Le Dictateur de Chaplin dans l’amphithéâtre en plein air. Les mimiques et déboires du héros américain font rire aux éclats le public.
Une tentation vaine ?
Les quatre hommes tentent de se battre, en vain peut-être, contre le totalitarisme de la pensée et de faire entrer d’autres images qui viennent d’autres pays et d’autres conceptions du monde pour enrichir la population. Le film est à la fois une ode aux temps de la liberté des années 70, avant les dictatures, le coup d’état du 6 avril 1885 et la prise de pouvoir par le Front national islamique. C’est aussi un plaidoyer pour le futur, futur du cinéma, futur du pays. Il appelle à un renouveau culturel du Soudan, au droit de faire des films, de parler, d’écrire, d’exposer …
Talking about trees est une production discrète, une chanson douce et triste mais qui donne espoir et qui rappelle qu’il est important de pouvoir « parler des arbres » même en tant de guerre. Le titre, peut-être en référence à Talking about révolution, une musique de Tracy Chapman, rappelle qu’il est aussi nécessaire d’accorder de l’importance aux arbres et par extension à tout ce que l’on finit par omettre dans les temps durs qu’aux révolutions. La liberté réside dans le pas de côté que l’on peut ou ne peut pas faire par rapport à l’actualité.