CINÉMA

« Yesterday » – Sorry dude

© Jonathan Prime – Universal Pictures

Sous ses airs sympathiques de comédie un brin nostalgique des années Beatles, Yesterday est bien loin d’être à la hauteur de son sujet.

Jack (Himesh Patel) est un musicien raté enchaînant les Summer Song dans les bars et les fêtes d’anniversaires. Prêt à abandonner, au grand malheur de sa manageuse et amie Ellie (Lily James), il est victime d’un accident de vélo suite à une panne d’électricité généralisée à l’ensemble du globe. Celui-ci se réveille à l’hôpital dans un monde où les Beatles n’ont jamais existé, un miracle qu’il décide alors d’exploiter pour (re)lancer sa carrière. Si l’on s’attend à ce qu’un film portant sur un tel sujet nous fasse prendre conscience de l’impact des Beatles sur le monde et sur la musique en général, cet aspect n’est que trop peu exploité, là où le scénario préfère se contenter de faire disparaître le Coca, les cigarettes, ou encore Harry Potter, il occulte ici la dimension essentielle de la musique : sa multidimensionnalité. Il s’éparpille continuellement et marque explicitement le manque de développement sur de nombreux pans du film, la focalisation sur la relation amoureuse prend ainsi une place bien trop prédominante.

Cette relation toute écrite dès les premiers instants du film consume éperdument ce qui pouvait être l’idée primaire de Yesterday, nous mettant face au scénario d’une romance bas de gamme, sans intérêt précis. La musique dans ce film de Danny Boyle n’est finalement qu’une simple toile de fond. Bien qu’il soit évidemment plaisant de croiser Michael Kiwanuka au Latitude Festival, des posters de Radiohead ou des Killers, ou encore un t-shirt du groupe Franz Ferdinand, le film ne touche pas sa cible et son but et laisse les mélomanes sur leur faim. Soit ce long-métrage indique un hommage sincère pointant du doigt la ferveur intergénérationnelle et permanente qui entoure les tubes des Beatles. Mais la plupart des morceaux sont bien loin d’être valorisés, Si Yesterday a pour qualité de mettre en exergue la dimension vénale de l’industrie musicale actuelle et son absurdité, les personnages comme ceux d’Ed Sheeran ou de Debra (Kate McKinnon) semblent être des caricatures ridicules.

Yesterday cherche véritablement à exploiter cette ascension véhiculée par les réseaux sociaux, la rapidité des événements, le buzz, des pratiques contemporaines qui demeurent certes intéressantes étant donné que les Beatles ont construit ce succès intemporel bien loin de toutes ces aménités. Ce long-métrage montre ainsi très bien à quel point cette mécanique dépasse les individus comme Jack, mais toujours sans demi-mesure ce qui lui retire une grande part de crédibilité.

Au delà de cela, le scénario est bien trop prévisible (pas la peine d’écrire «  par le scénariste de Love Actually  » (Richard Curtis) en gros dans la bande-annonce, nous avions compris). Entre autre le film se noie dans une masse visuelle indigeste, à l’image du dernier film d’Almodovar, Douleur et Gloire, qui dissimule ici et là des animations criardes, dessinant une palette de couleurs indélicates, qui souligne ainsi un cruel manque de travail sur l’esthétique.

Du cinéma et de la musique - Master Métiers de la Culture

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