Photo : © Giulio Macaione
L’éclectisme est au rendez-vous dans notre sélection des sorties BD.
Étoile de mer de Giulio Macaione
Qui n’a jamais été convaincu de l’existence des sirènes ? Et si ces dernières étaient à l’origine de nos déboires amoureux ? Des vides immenses de certains cœurs ?
En Sicile, Stefano est un jeune homme déjà las de vivre. Il passe la totalité de son temps à attendre l’instant précis de l’été où celle qu’il aime doit revenir. Malheureusement, il s’agit d’un amour à sens unique puisque ce dernier est en fait sous l’emprise envoutante d’une sirène. Dans son village, ce sujet est tabou mais Stefano ne semble pas être le seul à avoir été piégé par l’une de ces créatures…
Dés les premières cases, Giulio Macaione nous plonge dans une fable poétique à laquelle on ne peut qu’adhérer immédiatement. De prime abord, le sujet de l’album semble léger et à l’unique vocation de nous faire rêver, mais les thèmes traités sont beaucoup plus conséquents : la folie, l’abandon, la mort… Tous sont abordés de façon subtile et pudique par le biais de personnages extrêmement attachants. Il est alors difficile de réprimer ses émotions.
Comment ne pas être envoutés à notre tour par ces nuances de jaunes ocres et de bleus gris ? Par ce coup de crayon fin et expressif ?
Étoile de mer de Giulio Macaione, Éditions du Long Bec, sortie le 19 Juin 2019 – 22 euros
De mémoire de Corbeyran et Winoc
À l’âge de trois ans, Nick Powell est victime d’une crise d’épilepsie qui lui laisse une séquelle hors du commun : l’hypermnésie. Nick mémorise tout, ce qu’il a entendu, ce qu’il a vu, ce qu’il a lu, il y a une semaine ou il y a des années. Obligé de vivre dans un appartement totalement aseptisé de bibelots, de photos, de livres, pour ne pas stimuler encore plus sa mémoire, le don de Nick au quotidien se révèle autant être un super pouvoir qu’un handicap. Alors qu’il enchaîne les petits boulots et est incapable de vivre une relation amoureuse normale, Nick subi une tentative de kidnapping…
Grâce à une collaboration inédite, Corbeyran et Winoc nous précipitent dans un one-shot haletant aux allures de thriller psychologique. Par un habile jeu de flashback et un contact presque intimiste avec le personnage principal, les auteurs de cet album ont tout mis en œuvre pour que le dénouement soit attendu avec impatience certaine.
Malgré une fin satisfaisante et plutôt inattendue, la carte du retournement de situation percutant voire explosif propre au thriller n’a pas été abattue.
De mémoire de Corbeyran et Winoc, Collection Grand Angle aux Éditions Bamboo, sortie le 5 Juin 2019 – 14,90 euros
Bootblack Tome 1 de Mikaël
1945. Sur le front allemand. Al, un jeune soldat américain, ultime survivant de son unité, enterre ses camarades. Pour tenter d’échapper à ces horreurs, il se replonge dans ses souvenirs : son enfance, ses parents, sa vie new-yorkaise… Né aux États-Unis et fils d’immigrés allemands, Al n’est encore qu’un enfant quand une nuit, il perd ses parents dans l’incendie de leur foyer. Le jeune garçon n’a alors plus d’autres choix que de vivre dans la rue. Pour survivre, lui et son ami Shiny deviennent cireur de chaussures qu’on appelle à New-York les Bootblack. De 1935 à 1938, nous suivons le quotidien de Al : sa rencontre avec Buster puis avec Diddle Joe, ses sentiments naissants pour Maggie… Mais Al se rend bien vite compte que New-York n’offre aucun avenir au plus miséreux. Il est donc bien décidé à gagner plus d’argent, quels qu’en soient les moyens. Mais il n’imagine pas, alors, la guerre qui menace.
Après son précédant diptyque Giant sorti en 2017, Mikaël revient avec une nouvelle série en deux épisodes. Il réutilise pour cela tout ce qui fait la force d’un album puissant et propre à son style : New-York, les immigrés, la pauvreté, l’histoire d’amour en filigrane, de magnifiques illustrations dans les tons sépia et un scénario rondement mené.
Une série à suivre de près et dont le deuxième tome est à paraître courant 2020.
Bootblack Tome 1 de Mikaël, Dargaud Éditions, sortie le 7 Juin 2019 – 14 euros