©Jean-Pierre Pierrot
Deux mois après leur concert à la Cigale en mai dernier, on a rencontré Armand, moitié du duo indie-pop Papooz. L’occasion pour nous d’aborder avec lui l’évolution du live, leur dernier album Night Sketches et le pouvoir créateur de la nuit.
C’était convenu d’avance, il y aura Armand mais pas Ulysse pour notre entrevue avec Papooz. Ce n’est pas si grave, un Papooz sur deux, c’est un Papooz quand même. Après un première Cigale pleine à craquer et un deuxième album adulé, nous retrouvons Armand dans un café du dix-huitième arrondissement. Sous la canicule parisienne de fin juin, on commande un diabolo grenadine, Armand prend la même chose. Salopette estivale et pailles à la bouche, l’ambiance Papooz est bel et bien là, l’été aussi.
Votre dernier album Night Sketch est sorti en mars dernier, comment tu le vois maintenant que vous avez eu l’occasion de le faire vivre sur scène ?
Armand : Je t’avoue que je ne l’ai pas vraiment réécouté depuis qu’il est sorti. Je fais souvent ça avec les disques, je réécoute peu les morceaux. Mais en tout cas, en sortant du mix, quand on a eu l’objet dans les mains, on était ravis et on sentait qu’on avait accompli ce qu’on désirait. Je n’ai pas vraiment de recul sur cet album. Parce que tu vois, quand on joue les chansons en live, on mélange tous les albums, c’est un peu plus conceptuel.
La première fois que je vous ai vu jouer, c’était en 2016 à l’Epicerie Moderne à Lyon, depuis le temps a coulé, qu’est-ce qui a changé au niveau du live depuis cette époque ?
A : En soit, le live n’a pas beaucoup changé. On a rajouté quelques claviers sur scène et des percussions mais ça reste la même chose qu’au début. L’approche qu’on de la scène est assez rock, on ne joue pas avec des bandes alors qu’on pourrait, en particulier sur le dernier album.
J’ai eu l’occasion vous voir jouer à votre première Cigale en mai dernier, j’en garde un souvenir brûlant, un pur moment de groove. Et toi quel souvenir gardes-tu de cette soirée ?
A : C’était merveilleux. On était très émus, c’était l’un de nos meilleurs concerts. Pour le premier disque, on avait joué au Trianon qui était complet aussi mais vu qu’on avait pas l’habitude des grandes scènes, on était moins à l’aise. A la Cigale, c’était fantastique, tu le sens quand une salle est vraiment contente et quand tout le monde est en communion. En plus, il y avait tous nos copains et nos copines sur les côtés de la scène, il y avait une sorte de fête annexe.
En première partie du concert, j’ai découvert Oracle Sisters, j’ai trouvé qu’ils se rapprochaient de vous artistiquement, que ce soit dans la folie ou dans légèreté. Comment s’est fait votre rencontre ?
A : Le seul clip qu’ils ont sorti, c’est moi qui l’ai réalisé avec ma copine alors c’est peut-être pour ça que nos univers peuvent se rapprocher. J’ai rencontré les garçons à un jour de l’an, ils sont arrivés à Paris en se disant qu’ils allaient reprendre le cabaret d’un mec mais il a fermé au bout de deux semaines alors ils se sont retrouvés les mains vides, du coup ils se sont dit “on fait un groupe”. Donc, on les a rencontré à cette soirée et on est devenus amis.
Votre dernier album Night Sketches est un récit divisé en douze scènes qui nous conte le voyage au bout de la nuit d’un homme qui va rencontrer toutes sortes d’émotions au cours de son périple, de quoi vous êtes-vous inspirés pour le composer ?
A : En fait, c’est un faux album concept, on s’est rendu compte qu’il y avait un thème nocturne qui reliait tous les morceaux et après esthétiquement on s’est dit en l’enregistrant avec Adrien Durand qui a produit le disque qu’on voulait retrouver un truc un peu sexy, night club, slow disco dans la manière de traiter les synthétiseurs, les guitares, les batteries et même les voix. On s’est inspirés des tubes slow disco qu’on écoute comme Love For the Sake of Love de Claudja Barry, des tubes de chanteuses américaines de la fin des années 70.
On vous l’a souvent fait remarqué et vous l’avez vous même affirmé, Night Sketches est un album plutôt nocturne contrairement à Green Juice qui lui, avait des airs plus solaires, alors j’aime bien poser cette question, quel rapport vous entretenez avec la nuit ?
A : La nuit, c’est le moment où tu te caches. C’est le moment où les gens sont un peu plus eux mêmes ou au contraire le moment où ils portent un masque encore plus grand. Quand la nuit tombe et que je suis seul, je suis plus apte à me créer une sorte de cocon pour pouvoir composer. Et il se passe un truc. Il y a un manteau qui t’enveloppe et un contact plus facile.
Qu’est-ce que ce serait la bande son idéale de ta nuit ?
Il y a un très beau titre que j’adore écouter la nuit c’est Beau Saxo de Léo Ferré. Dès qu’il y a des trompettes ou des saxophones pour moi ça m’évoque la nuit. Vienna de Billy Joel aussi, elle est vraiment nocturne. I Go to Sleep des Kinks. Puis sinon, un morceau cool de disco comme Love Of The Sake Of Love de Claudja Barry, c’est très sexy. Et sinon, un morceau qu’on aime tous les deux Amarsi Un Po’ de Lucio Battisti, ça fait très nuit italienne.
Récemment, j’ai vu que vous aviez fait beaucoup de dates à l’étranger, à Berlin, Beyrouth entre autres, comment vous appréhendez la scène quand vous jouez ailleurs ?
Déjà, on chante en anglais donc c’est plus accessible au niveau des paroles pour le public, les gens comprennent mieux, ils chantent plus nos chansons. A Berlin, la moitié chantait les tubes. Quand tu voyages, tu vois aussi les différentes vibe des personnes, un concert c’est révélateur de comment les gens se comportent. Par exemple, les allemands sont plus libérés, ils se lâchent plus qu’en France. Ici, tu as l’impression les gens payent juste pour voir, dans les pays anglos saxons, quand tu payes tu dois t’amuser.
Pour préparer l’interview, j’ai réécouté votre tout premier EP Papooz, celui qui vous a fait éclore et je me suis surprise à être nostalgique de ces morceaux assez lo-fi et naïfs, je me demandais si c’est quelque chose vers lequel vous aimeriez revenir ?
Je pense que la moitié du disque qu’on vient de faire, il y a quelques morceaux qu’on aurait pu faire en guitare-voix sur garage band et cette méthode, je la trouvais très drôle parce qu’on a réussi malgré tout à avoir une esthétique musicale assez forte avec très peu de choses, un ordinateur et un ukulélé. Mais en fait, plus tu évolues dans ton parcours, plus tu as envie d’utiliser des compresseurs mais après il faut pas que ça vienne au détriment du morceau. Les morceaux du premiers EP sont nus, sans arrangements, elles dégagent une émotion un peu magique. Par contre, ce qui pourrait arriver c’est qu’on ressorte les titres qu’on a écris à cette époque sur un vinyle.
Vous avez des projets pour la suite ?
Là, on vient tout juste de finir le disque, il faut compter à peu près un an et demi, deux ans pour faire composer un album. Mais on aimerait bien enregistrer quelque chose au printemps prochain. Mais sinon on fait une petite tournée en automne.
Night Sketches (Half Awake Record) est disponible sur toutes les plateformes.
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