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Après la démission de Theresa May le 7 juin, la course au poste de Premier ministre a débuté au Royaume-Uni pour les membres du Conservative Party au pouvoir. Sept hommes et deux femmes prétendent aujourd’hui à la succession de Theresa May. Parmi eux, une figure bien connue Outre-Manche, l’ancien maire de Londres, Boris Johnson.
Première ministre britannique depuis juillet 2016, Theresa May a récemment annoncé sa démission fin mai, après l’échec des négociations du Brexit. Dans un discours de sept minutes, la future ex-Première Ministre appelle à l’union des Britanniques et à la recherche d’un compromis dans le cadre des négociations du Brexit avec le Parlement européen.
Suite à sa démission, entrée en vigueur ce 7 juin, la campagne pour le 10 Downing Street a commencée chez les conservateurs. Dans le système parlementaire britannique, c’est le chef du parti majoritaire qui devient premier ministre. Celui ou celle qui sera élu à la tête des tories deviendra donc automatiquement Premier Ministre britannique. Parmi les dix candidats, les avis divergents sur la question du Brexit qui, justement, a mené la dernière Première Ministre en date à démissionner. Certains sont pour un « no deal » tandis que d’autres sont contre. Et même au sein des pro-no deal la question se pose : quand et comment doit-on sortir de l’UE ? Immédiatement, le 31 octobre comme prévu initialement début 2019 ou bien doit-on demander un report du Brexit afin de poursuivre les négociations. Autant de divergences sur la question de la sortie de l’UE au sein d’un seul et même parti politique qui laisse imaginer un mandat compliqué pour le futur Premier Ministre.
L’ancien maire de Londres favori
Parmi les visages composant la mosaïque des potentiels successeurs, l’un d’entre eux semble particulièrement familier. Et pour cause, c’est celui de Boris Johnson, maire de Londres de 2008 à 2016. Personnage sulfureux, Boris Johnson est désigné comme le favori de cette élection mais pour Florence Faucher, professeure de Sciences politiques et directrice du Centre d’études européennes et de politique comparée (CEE), il est « le favori des adhérents mais pas forcément celui des députés conservateurs ». Pour Florence Faucher sa personnalité poserait problème aux députés censés le pré-selectionné pour les élections finales. Elle souligne ainsi que « nombre d’entre eux craignent que certains facettes de la personnalité de Johnson ne soient problématiques pour la position convoitée de Premier ministre. » On se rappelle en effet la personnalité excentrique de l’ancien-maire de Londres et certaines de ses répliques sont encore aujourd’hui dans nos mémoires. En 2015 il affirmait par exemple au sujet des djihadistes : « [ce sont] des branleurs qui pratiquent la masturbation intensive ». En 2012, des images de Boris Johnson accroché et bloqué à une tyrolienne installée à l’occasion des JO de 2012 dans le parc Victoria circulaient largement sur internet consacrant officiellement le maire londonien personnage loufoque.
Mais au-delà des situations parfois ridicules dans lesquelles l’ancien maire londonien se retrouve, c’est sa vision de la politique qui semble poser concrètement problème. Selon Florence Faucher, « Johnson a souvent préféré les bons mots et la provocation à des prises de positions mesurées, diplomatiques et avec une visée politique de long terme ». Sa vision de la politique n’est pas sans rappeler la politique mise en place par Donald Trump depuis son élection en janvier 2017. Il semblerait que les deux hommes politiques aient plus qu’une simple mèche blonde en commun.
Boris Johnson, le Donald Trump britannique ?
Au-delà de la fameuse mèche blonde et des propos parfois insensés tenus communément par les deux hommes, c’est bien sûr en termes de politique que la comparaison reste la plus pertinente. Pour Florence Faucher, la politique de Boris Johnson « pourrait sous certains aspects être comparée à celle de Trump même si la Grande-Bretagne n’a pas la puissance économique des États-Unis. »
Là où Donald Trump demandait au gouvernement mexicain de financer le mur anti-migrant censé protéger les États-Unis à la frontière sud, Boris Johnson affirme, lui, qu’il refusera de payer la facture du Brexit – soit environ 40 milliards d’euros – si l’Union Européenne n’accepte pas des négociations plus avantageuses pour le Royaume-Uni. Dans une interview accordée au Sun, Donald Trump affirmait « bien connaître les différents candidats » avant d’ajouter :
« Je pense que Boris ferait du très bon travail. Il serait excellent. »
Donald Trump dans une interview accordée au tabloïd The Sun
Suite à cette déclaration, le président américain aurait proposé à l’ancien-maire londonien de se rencontrer en tête à tête. Boris Johnson a refusé, prétextant un emploi du temps chargé dans cette course au poste de Premier ministre. Selon les membres du bureau de Boris Johnson, interviewé par Robert Peston d’ITV News, Boris Johnnson aurait affirmé qu’il était impatient de le rencontrer ultérieurement. L’ancien maire londonien affiche une politique beaucoup plus tournée vers les États-Unis et suite à son élection on pourrait potentiellement assistait à un rapprochement avec la puissance outre-Atlantique.
Des négociations difficiles avec l’UE
Selon Florence Faucher, les propos tenus récemment par l’ancien maire londonien « ne laissent pas nécessairement imaginer des relations très faciles avec l’Union Européenne ». La chercheuse rappelle que Johnson « menace de ne pas respecter les engagements internationaux pris par la Grande-Bretagne et qu’il semble déterminé à adopter une posture de négociation du Brexit ». Même s’il est probable que « ses propos soient essentiellement des provocations destinées à plaire à son électorat potentiel interne au parti », ajoute Florence Faucher.
Jusqu’à l’élection de son successeur ou de sa successeuse, Theresa May restera à la tête du pays et du parti conservateur. Boris Johnson est annoncé comme étant le favori de cette élection mais il était déjà pressenti comme le meilleur successeur de David Cameron au début de la campagne électorale de 2016. Avant de devenir officiellement candidat pour les adhérents du parti conservateur, Boris Johnson devra d’abord convaincre les députés britanniques qu’il est un candidat sérieux au poste de Premier ministre.