CINÉMALITTÉRATURE

“Hommage à Isao Takahata”, un livre beau comme un rêve

Les éditions Ynnis rendent aujourd’hui un hommage vibrant à un géant du cinéma d’animation japonais : Isao Takahata.

Il y a tout juste un an disparaissait le cinéaste Isao Takahata, cofondateur du studio Ghibli avec Hayao Miyazaki (Mon Voisin Totoro, Princesse Mononoke, Le Voyage de Chihiro) et réalisateur du bouleversant Tombeau des lucioles. Si l’on connait bien souvent son film phare et quelques autres productions remarquées (Pompoko, Le Conte de la princesse Kaguya), nous en savons généralement un peu moins sur le parcours et l’éventail des contributions sur lesquelles s’est penché Takahata tout au long de sa carrière, à commencer par la série Heidi, série d’animation culte réalisée en 1974 et fruit d’un partenariat hors du commun entre le Japon, la Suisse et les États-Unis.

Omoide Poroporo – Souvenirs goutte à goutte, oeuvre méconnue d’Isao Takahata (1991)
© Studio Ghibli

Lever le voile sur le personnage qui se cache derrière ces œuvres, c’est justement le défi que s’est donné Stéphanie Chaptal en réunissant, dans un superbe ouvrage paru le 3 avril dernier, une sélection d’articles, de témoignages et d’analyses sur la vie et l’oeuvre de ce génial créateur sous le titre Hommage à Isao Takahata : de Heidi à Ghibli.

Un portrait exceptionnel

Dès le début de l’ouvrage et de ses 160 pages richement illustrées, on découvre l’ampleur du travail de Takahata, auteur d’une dizaine de long-métrage et touche-à-tout notoire, apparaissant dans un nombre important de série et de courts-métrages en tant que réalisateur, animateur, scénariste ou producteur. De ses débuts dans les studios Tôei Animation (Le Serpent Blanc, Goldorak, Dragon Ball) à l’aube des années 60 jusqu’à son dernier film remarqué Les Contes de la princesse Kaguya en passant par son rôle de consultant et producteur artistique sur l’oscarisé La Tortue Rouge, on découvre peu à peu le travail et les préoccupations uniques d’un artiste hors du commun, prolifique et engagé.

Le réalisateur, sur une photo réalisée à son domicile.
© Martin Holtkamp

En plus d’apartés purement biographiques, le livre présente, dans un format de 4 pages pour chacun, l’intégral des films du réalisateur, introduisant au lecteur son univers et des débuts de réflexion concernant les thématiques, angles et sujets abordés. Rebondissant sur ses productions, de beaux articles accompagnent la réflexion et l’analyse qui découle de ses films, à travers des axes souvent pertinents (l’enfance, la représentation du quotidien, l’influence occidental, son héritage). Au delà de ces lectures extérieures de son univers, plusieurs pans sont développés et des détails sur son approche artistique dévoilés : on y apprend par exemple que la vision du film de Paul Grimault et Jacques Prévert Le Roi et l’Oiseau fût pour lui comme pour son complice un véritable déclic, qu’il n’animait pas lui même ses propres films (préférant confier cette tâche à des talents plus qualifié selon le type de dessin souhaité) ou encore que la littérature a toujours été le socle fondateur de ses projets. Une vraie mine d’or.

Des témoignages rares

Conviant les récits et témoignages d’une dizaine d’artistes, collaborateurs ou admirateurs de renom, l’ouvrage est également l’occasion idéale de mesurer à la fois l’influence et l’impact de l’oeuvre de Takahata sur le petit monde du cinéma, et bien au delà.

Le Conte de la princesse Kaguya, dernier film du réalisateur (2013).
© Studio Ghibli

On y retrouve notamment les témoignages touchants de Michel Ocelot (réalisateur de Kirikou), Michaël Dudok de Wit (réalisateur de La Tortue Rouge), Tomm Moore (réalisateur de Brendan et le secret de Kells), Yoshiki Sakurai (co-scénariste du Conte de la princesse Kaguya), Catherine Cadou (traductrice française de la majeure partie de ses films), Kelly Marot (doubleuse française de Setsuko dans Le Tombeau des Lucioles), Claire Baradat (doubleuse française de la princesse Kaguya) Guillaume Orsat (doubleur français sur Pompoko) et enfin une interview du principal intéressé en guise de conclusion : autant dire que nous n’avons jamais été en possession d’un ouvrage si riche et complet sur le sujet.

Présenté sous une couverture sublime et brillante, cet Hommage à Isao Takahata est le donc le livre-testament que l’on n’espérait plus : celui d’un réalisateur qui aura marqué des générations entières d’artistes à travers le monde, et dont l’héritage n’est pas prêt de s’éteindre.

Hommage à Isao Takahata, de Heidi à Ghibli de Stéphanie Chaptal
Ynnis Éditions – 160 pages – 14,50 €
Disponible dès maintenant.
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