SOCIÉTÉ

Didier Guillaume, un ministre au service des agriculteurs ?

Il a remplacé Stéphane Travert lors du dernier remaniement, et il est déjà sur tous les fronts, face au désespoir des agriculteurs : mais qui est Didier Guillaume ?

A peine nommé en octobre dernier, Didier Guillaume, nouveau Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, a maintes fois revendiqué son souhait d’être le « ministre des transitions  ». Ancien président du Conseil général de la Drôme, élu premier département bio pendant plus de dix ans, il est « très apprécié du monde agricole et connu pour être un bosseur », salue une source proche du ministre.

Un nouveau transfuge au gouvernement

Didier Guillaume a notamment présidé le groupe socialiste au Sénat de 2014 à début 2018. Ainsi, lorsqu’à la surprise générale, il annonce officiellement son retrait de la vie politique en janvier 2018 et est pressenti pour présider le comité d’organisation de la Coupe du monde de rugby qui se déroulera en France en 2023, personne ne l’imagine débarquer au gouvernement dix mois plus tard.

Comme ce fut le cas pour de nombreux anciens socialistes passés dans le camp macronien, sa décision a été vivement critiquée et qualifiée « d’opportuniste » par plusieurs de ses pairs. De même, au niveau local, certains se demandent : « il arrête la politique, il était socialiste et maintenant il soutient Macron ? ».

Cependant, si l’on y réfléchit a posteriori, cette nomination semble somme toute assez logique pour l’ancien vallsiste qui n’a jamais caché son désir d’occuper un poste ministériel, en particulier celui rue de Varenne.

La lutte contre la sécheresse comme priorité

Désireux de réconcilier, pour de bon, paysans et citadins, Didier Guillaume s’est déjà mis au travail. Après avoir suspendu l’utilisation pendant 3 mois des pesticides contenant du métam-sodium, il s’attaque désormais à la sécheresse avec le « plan de calamité agricole ».

L’objectif de ce plan ? Venir en aide aux agriculteurs et aux éleveurs en difficulté. L’eau faisant défaut, ils ont déjà commencé à utiliser leur fourrage d’hiver pour nourrir leurs bêtes. Une situation alarmante qui n’échappe pas au gouvernement. Au 23 octobre, 61 départements français sont touchés par des restrictions d’eau. Selon Christiane Lambert, présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), interviewée sur France Inter, « c’est le Grand Est qui en souffre le plus. »

C’est une mission qui s’annonce longue et délicate. Les préfets de chaque département doivent d’abord faire remonter au ministère leur situation ; puis, en décembre, le Comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA) se réunira pour examiner les dossiers de reconnaissance de calamité agricole. Deux autres réunions se tiendront en janvier et en février. Une fois la reconnaissance accordée par le Comité, les agriculteurs des zones concernées pourront déclarer individuellement leurs pertes et demander des indemnisations. L’Etat débloque une enveloppe de quinze millions d’euros depuis octobre pour permettre à la Mutualité sociale agricole (MSA) d’accorder des allègements de cotisation sociale. En attendant, des mesures concrètes ont déjà été prises comme des aides de la Politique Agricole Commune (PAC) versées en avance ou encore l’exonération de la taxe sur le foncier non bâti.

©DR

Un chantre du bio pas si écolo

Le nouveau ministre a annoncé sur France Inter lundi 29 octobre une politique assumée : améliorer la qualité de l’alimentation en n’oubliant ni les agriculteurs ni les consommateurs. Manger bio tout en mangeant des produits à un prix accessible : c’est possible, mais il ne souhaite pas pour autant opposer les consommateurs et les agriculteurs. Selon lui, ce sont les industriels et la distribution qui devront payer la hausse des prix à l’achat des produits agricoles et non les consommateurs. Didier Guillaume se veut très axé sur les relations entre les agriculteurs et les riverains. « Un dialogue entre eux pourra faire évoluer les façons de cultiver et l’agriculture de façon générale », déclare-t-il.

Les productions biologiques, l’utilisation des pesticides, les pratiques culturales et le prix des produits agricoles seront d’ailleurs les principales préoccupations de notre nouveau ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation. Si dans son agenda, certaines propositions peuvent paraître novatrices, le changement ce n’est cependant pas pour maintenant, surtout sur la question du glyphosate, un sujet délicat qui inquiète les agriculteurs. En effet, lorsqu’il était sénateur, Didier Guillaume avait voté contre son interdiction.

Les interrogations se multiplient alors à ce propos. Va-t-il faire preuve de pragmatisme plutôt que d’idéologie à ce sujet, en argumentant sur le fait que les agriculteurs souffrent déjà assez de la concurrence mondiale sans que l’on vienne leur rajouter des difficultés supplémentaires ? Même s’il confirme dans ses premiers discours la fin du glyphosate dans ce quinquennat, il parle aussi de reporter de plusieurs mois l’échéance de 2020 fixé par le président Macron.

Enfin, un autre sujet s’ajoute à la pile de dossiers qui attendent le ministre Didier Guillaume pour le début de son mandat : la mise en application de la loi Agriculture et Alimentation. « Les décrets d’application seront signés dans les six mois qui viennent », a-t-il annoncé. Pour lui, l’objectif premier est donc que les agriculteurs aient un vrai revenu, afin de renforcer l’attractivité de ce métier.

Alors que ses positions sur le glyphosate se trouvent quelque peu en contradiction avec son discours sur l’agriculture biologique, le nouveau ministre s’attaque à plusieurs chantiers où agriculteurs et consommateurs l’attendent au tournant. Didier Guillaume aura donc du pain sur la planche dans les mois à venir s’il souhaite parvenir à gagner la confiance et l’adhésion des citoyens.

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