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60 heures à Zagreb

“Stare slave djedovino, Da bi vazda sretna bila ! ” au rythme de l’hymne national croate, il est temps de partir à la découverte de la capitale la plus atypique des Balkans.

Ce n’est pas un hasard que Zagreb soit une destination de plus en plus en vogue. Les prix sur place sont abordables, les activités foisonnent et l’ambiance générale de la ville n’a pas d’équivalent ailleurs en Europe. Pour tous les petits porte-monnaie comme pour tous les amateurs d’art et d’architecture, la capitale croate tend à s’imposer comme le city trip européen à ne pas manquer. Avant de partir à l’aventure et de cocher cette case dans votre bucket list, nous vous proposons un avant-goût de ce qui vous attend et de ce que l’on peut espérer de La Petite Vienne.

 

Haussmann n’a qu’à bien se tenir

Zagreb ne s’est pas construite en un jour. Elle porte en elle la marque de toutes les conquêtes qui ont traversé ses plaines, des influences dans la langue à l’inclusion d’éléments culinaires venant d’un peu partout dans le monde. Outre les domaines culturels classiques, la capitale croate porte aussi en étendard les styles architecturaux qui ont successivement été à la mode dans nos régions. Les églises suivent les mouvements traditionnels que l’on connait, il n’y a qu’un pas du Roman au Gothique. Pour les immeubles, c’est une toute autre histoire, bien plus riche et haute en couleur.

Théâtre National, Zagreb

 

Fanas d’architectures ou simples curieux, il vous serait impossible de visiter Zagreb sans marquer quelques temps d’arrêts lors de vos déambulations dans les rues de la ville. L’appréciation d’un tel art millénaire, dont la force survit malgré l’écoulement du temps mérite que l’on prenne quelques minutes pour apprécier la finition et le détails de certaines constructions. L’art néo-baroque et néo-classique reste certes le plus tape à l’œil. À tout le moins, les réactions les plus vives se font toujours ressentir devant le théâtre national. Mais ne négligeons pas les autres styles. Il est tout aussi appréciable de retrouver la folie créatrice d’un Horta au détour d’une rue qui sent bon l’Art Nouveau.

 

Originalité picturale et culturelle

Un Routard dans la main et une bonne paire de chaussures de marche vissée aux pieds, tout touriste qui se respecte tiendra à visiter au moins un musée dans la ville où il a posé ses valises. Zagreb propose plusieurs temples artistiques pour le moins atypiques. Dans la plus pure tradition picturale, il est bien sûr possible de visiter le musée national de Croatie où l’on trouvera les expressions traditionnelles de tous les courants artistiques ayant bercé l’Europe au fil des siècles. Mais en creusant un peu plus profond, au détour d’une rue piétonne de la haute-ville, il vous est possible de passer les portes du Musée Croate de l’Art Naïf.

Engouffrez-vous dans cet endroit si l’envie vous prend de vivre, le temps d’un instant, la vie d’un héros de dessin animé. Tout y est hors du temps et hors des limites réalistes. Les émotions des personnages (dé)peints sont exacerbées, les couleurs utilisées n’ont rien en commun avec la vraie vie. L’art naïf, peu connu en Europe de l’Ouest bien que porté par des peintres majeurs comme Henri Rousseau, a connu la pérennité et le succès dans le monde intriguant des Balkans. Il était tout à fait naturel d’y consacrer un musée entier à Zagreb, ville qui a hébergé plusieurs têtes d’affiche du mouvement comme Drago Jurak ou Martin Mehkek.

 

(c) Sofia Touhami

Paris, Sainte Chapelle de Emerik Feješ – Musée d’Art Naïf, Zagreb

 

Du thème original à l’attrape nigaud, il n’y a qu’un pas. Un musée peut très rapidement tomber dans le cliché ou devenir un piège à touriste si son âme n’est pas préservée. Zagreb abrite en son for deux lieux qui ont relevé le défi de ne pas devenir des caricatures d’eux-mêmes, tout en diversifiant l’offre culturelle de la ville. D’un côté, il y a le musée des illusions, dans lequel on peut passer des heures à tenter de résoudre puis à comprendre les illusions d’optique qui ont fait les belles heures de nos enfances.

 

Musée des illusions, Zagreb

 

De l’autre côté, à quelques minutes de marche à peine, un bâtiment entier met à l’honneur les ruptures, pour la plupart amoureuse. À l’origine de cet étrange projet, il y a un ex-couple d’artistes basés à Zagreb. En mettant fin à leur romance, le duo a voulu, simplement pour rigoler, réunir tous les objets marquant de leur relation dans une exposition. Quelques années plus tard, la petite galerie itinérante est devenue un musée permanent, jouissant même d’une antenne à Los Angeles. Le principe du Musée des Relations Brisées est très simple : toute personne qui visite le musée peut y déposer un objet d’une de ses anciennes relations, accompagné d’un mot d’explication. La collection évolue sans cesse, tantôt alimentée par des récits tragiques, tantôt par des histoires à s’écrouler de rire. Ce serait un euphémisme de décrire ce musée comme simplement poignant ou intéressant. Il peut réellement faire passer ses visiteurs du rire aux larmes en moins de temps qu’il n’en faut pour dire “c’est fini entre nous”.

 

Musée des relations brisées, Zagreb

Manger, bouger, respirer local

Au risque d’en décevoir certains, on ne peut ni vivre d’amour et d’eau fraîche, ni de culture et de balades interminables en centre-ville. Au fil de vos déambulations touristiques typiques en plein Zagreb, vous remarquerez que les locaux ont une tendance à rechercher une alimentation raisonnée, locale, et bio. Il est plus compliqué de trouver une grande enseigne de supermarché qu’un primeur bio ou une épicerie spécialisée dans le circuit-court. Pour vivre la vie de touristes, les indéfectibles grandes chaînes de fast-food sauront comment vous sustenter. Si vous souhaitez en revanche vous imprégner de la culture locale résolument orientée vers le développement durable, passez la porte de n’importe quelle épicerie garantie 100 % sans déchet plastique, ou d’un café éco-responsable. Il ne faut pas plus de 300 mètres de marche pour en repérer deux ou trois.

Aux petits budgets comme aux gros portefeuilles, aux amateurs de classicisme comme aux adeptes de contre-culture ; à tous s’adresse l’appel de la capitale la plus innovante des Balkans. Il suffit d’un peu de détermination et d’une heure et demi d’avion pour sauter le pas et faire le grand saut dans l’avenir du tourisme. La Croatie a de beaux jours devant elle, tâchons de ne pas en faire une destination où l’authenticité plie sous le poids du tourisme de masse. Ce qui fait le charme de ce jeune pays européen, c’est avant tout la sincérité avec laquelle il s’offre à tout qui foule son sol.

 

Directrice de la communication, tout droit venue de Belgique pour vous servir. Passionnée de lecture, d'écriture, de photographie et de musique classique.

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