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Route du Rock 2018 – « Quand on a un artiste que l’on aime, on essaye de le refaire jouer sur le festival. »

C’est le rendez-vous parfait ! Chaque année depuis bientôt trente ans, la Route du Rock réunit au Fort St Père près de Saint-Malo, le meilleur de la pop et du rock. Du 16 au 19 août prochain, la programmation de cette vingt-huitième Collection été ne dérogera évidemment pas à la règle. Une trentaine d’artistes et de groupes, de toutes horizons, seront attendus et le festival fera autant la part belle au rock psyché qu’à la pop ou à l’électro.

Maze sera une nouvelle fois de la partie et vous fera vivre le festival. Après vous avoir dévoilé quelques-unes de nos attentes, nous avons interviewé le programmateur du festival, Alban Coutoux.

Lauranne Wintersheim – Maze

Un des évènements de cette édition, c’est la venue d’Etienne Daho. Comment avez-vous réussi à le faire venir cette année ?

La question s’était posée il y a trois ans sur sa dernière tournée, le Diskönoir Tour. Il avait fait déjà tout une longue tournée en salles, et on arrivait à la fin. On ne trouvait pas ça forcément opportun d’arriver à ce moment-là, après la bataille. A l’inverse sur cette tournée, il débute avec les festivals, donc on a la primeur de son nouveau live, quelques mois après la sortie de l’album Blitz. Cet album est d’ailleurs un de ses plus rock. Toutes les conditions étaient donc réunies pour pouvoir l’accueillir, lui qui est originaire de Rennes en plus. On est ravi de l’avoir, et il semble l’être aussi de venir.

Paradoxalement, tous les artistes qu’il soutient sont déjà passé par la Route du Rock, de Calypso Valois l’an dernier à Yan Wagner, en passant par Lescop ou Flavien Berger. Il manquait donc plus que le parrain de cette scène française.

Avez-vous d’ailleurs pensé, comme certains l’espérer, à réunir le même soir Etienne Daho et Marquis de Sade qui s’est reformé récemment pour quelques concerts ?

La question ne s’est pas posée pour Marquis de Sade. On savait dès le début que Art Rock [à Saint Brieuc] était dessus et que Marquis de Sade voulait faire très peu de dates.

Pour accompagner la venue d’Etienne Daho, vous proposez un extrait de l’exposition “Daho l’aime pop”, présentée cet hiver à la Philharmonie de Paris. Pourquoi cette envie ?

On reprend la dernière partie de cette super exposition, ce qui s’appelait le “Daholab”, c’est-à-dire les photos prises par Etienne Daho de la nouvelle scène française.

Depuis quatre ans, on essaye de proposer des expositions photos sur le festival. Les trois dernières années, c’était un parcours à l’entrée du Fort et l’on trouvait ça frustrant de mettre tout en place pour seulement trois jours, sachant que les conditions d’exposition n’étaient pas optimales. Cette fois, il y aura un mois d’exposition, du 21 juillet au 19 août, sur les remparts de Saint Malo, à La Tour Bidouane, dans un lieu fait pour ça.

Vous accueillez également Patti Smith, l’autre tête d’affiche du festival. Comment cela s’est fait ?

Ça fait des années que l’on essaye de la faire venir. On travaille avec son agent depuis longtemps et on regardait chaque année son planning pour voir où elle jouait. Cette année elle revient mi-août en Europe pour quelques dates, en Scandinavie et en France. On était donc pile-poil dans le bon timing. Elle n’a pas joué en France depuis longtemps, donc elle est particulièrement attendue. Ce qui est intéressant en plus, c’est qu’elle est maintenant autant reconnue comme écrivaine avec les gros succès de Just Kids et M Train. C’est une artiste vraiment complète.

La samedi 18 août sera d’ailleurs la journée Patti Smith puisque l’on aura l’exclusivité nationale du documentaire Horses : Patti Smith and Her Band, réalisé par Steven Sebring. On lui devait déjà, il y a dix ans, le magnifique documentaire Dream of Life, qui revenait sur le moment où Patti Smith s’est mise en retrait de la scène musicale. On voulait d’abord montrer Dream of Life, et puis le festival de cinéma de Tribeca, fin avril dernier à New York, a montré Horses. Autant montrer celui-ci alors. Patti Smith viendra présenter le film à la Grande Passerelle de Saint-Malo et Christophe Brault fera ensuite sa traditionnelle conférence sur les jeunes années de la chanteuse new-yorkaise.

Comment avez-vous composé chacune des soirées du festival, entre un vendredi très psyché, un samedi rassemblant musiques électroniques et ovnis musicaux, et un dimanche plus pop.

On n’a pas vraiment eu le choix en fait. C’est un heureux hasard du fait des modifications progressives des tournées de chacun. On voulait tout de même réunir le même soir The Limiñanas et Anton Newcombe, le leader de The Brian Jonestown Massacre, puisque les deux groupes sont très proches, Anton Newcombe ayant même produit le dernier album des Catalans. Charlotte Gainsbourg et Phoenix, eux, voulaient jouer le même soir. Quant à Patti Smith et à Jungle, ça s’est très vite calé, le samedi pour la première, le dimanche pour les seconds.

The Limiñanas reviennent un an et demi après leur premier passage à la Route du Rock hiver. Mais ils ont déjà failli jouer au Fort lors de la Collection été il y a deux ans, il me semble ?

En effet, il y a deux ans, ils ont failli venir, mais leur bassiste avait un mariage. Du coup on s’était rattrapé l’hiver suivant. C’est un groupe vraiment à part et d’une grande classe. Leur dernier album, Shadow People, est probablement leur meilleur, saisissant la quintessence de leur musique, entre les ambiance moriconnienne, l’influence de Gainsbourg et les grosses guitares très garage psyché.

C’est aussi surprenant que ce soit la première fois que The Brian Jonestown Massacre viennent jouer à la Route du rock. Comment cela se fait-il ?

Depuis que Anton Newcombe vit à Berlin, alors que les autres membres sont aux Etats-Unis, ça complique la réunion du groupe au complet pour des concerts. Ils tournent en Europe sur des très courtes périodes à chaque fois. Cette fois-ci, cela a pu enfin se faire, et le groupe est en pleine forme, puisqu’ils sortent deux albums cette année.

Vous accueillez cette année de nombreux groupes qui ont largement changé de dimension depuis leur précédent passage à la Route du Rock, comme Phoenix, Grizzly Bear, Protomartyr ou Nils Frahm.

On essaye d’être fidèle. Quand on a un artiste que l’on aime, on essaye de le refaire jouer sur le festival. Après, il faut que ce soit pertinent et justifié pour ne pas tomber dans le déjà-vu sur la programmation. Ça dépend donc de l’actualité, de la qualité des albums, et, en effet, quand le groupe change de statut.

Que répondez-vous à certaines critiques reprochant à Phoenix ou Charlotte Gainsbourg de ne pas avoir leur place à la Route du Rock ?

Je trouve que c’est un débat assez absurde. Phoenix est venu à la Route du Rock il y a quatorze ans et je trouve qu’ils ont gardé leur patte. Ce n’est pas parce qu’ils sont devenus des stars planétaires que leur musique n’est plus intéressante. On a toujours continué à les suivre et d’ailleurs on a essayé de les avoir plusieurs fois au fur de leurs tournées, sans réussir.

Pour Charlotte Gainsbourg, c’est pareil, on suit sa carrière depuis ses débuts, d’autant qu’elle a pu travailler avec des artistes que l’on a reçu comme Air, Sébastian, ou Emile Sornin de Forever Pavot qui jouera d’ailleurs cette année à la plage le 19 août. Le dernier album de Charlotte Gainsbourg, Rest, est chouette et j’ai hâte de la voir.

La programmation de cette année est une des plus française que vous ayez faite. Est-ce une preuve de la bonne santé de la scène française ?

Il n’y avait rien de volontaire, on ne s’impose aucune contrainte sur la programmation, mais c’est vrai que la scène française est vivace. Le travail fait notamment par la Souterraine, que l’on avait reçu il y a deux ans sur la Plage, a permis de mettre un coup de projecteurs sur des dizaine d’artiste français super talentueux mais inconnus.

La programmation de la deuxième scène du Fort, la Scène des Remparts, accueille, cette année encore, de nombreux groupes jamais venu au festival mais d’importances et de genres très différents. Comment avez-vous composé la programmation de cette scène et comment se trouve l’équilibre ?

On ne fait pas de distinction entre les deux scènes et on va tendre à diminuer les différences au profit d’un vrai enchainement le long de la soirée sur les deux scènes. The Black Angels joueront par exemple sur la scène des Remparts parce qu’ils ne pouvaient que ce soir-là et que l’on avait plus de place sur la grande scène. Cette scène ne sera donc plus si petite et va grossir un peu pour pouvoir accueillir des groupes comme Black Angels ou même Shame, que l’on est content de revoir, après leur venu l’année dernière à la Collection hiver.

Parlons aussi de la traditionnelle soirée d’ouverture le jeudi 16 août à La Nouvelle Vague. Comment, là-encore, l’avez-vous composé ?

Ça sera une soirée un peu plus intimiste, avec Marlon Williams que l’on a beaucoup écouté, un crooner en lévitation entre Elvis Presley et Roy Orbison, c’est très beau. L’Américain Ezra Furman est un véritable ovni. Il est fan de Lou Reed et ça se sent. Quant à The KVB, ils font leur retour avec Only Now Forever, un bel album qui sortira à la rentrée et qui amorce un virage un peu plus lumineux et synthétique.


 

La Route du Rock, 28e Collection été, du 16 au 19 août 2018 au Fort St Père et à Saint-Malo. Plus d’informations :  http://www.laroutedurock.com/

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