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Cannes 2018 – « Un couteau dans le cœur » : désir mortel

Un baiser sur fond blanc. Le vert d’une forêt luxuriante. Une chambre balayée de rouge. C’est avec le souvenir de couleurs qu’on ressort d’Un couteau dans le cœur, dernier film en date de Yann Gonzalez, en compétitione officielle au Festival de Cannes, édition 2018. Cela peut sembler curieux pour un long-métrage qui s’aventure la plupart du temps la nuit et pourtant c’est de cette plongée nocturne que naissent les nuances les plus belles.

Un film d’abord esthétique donc, dont on scrute les moindres plans, parfois à l’allure presque photographique ou même picturale : beaucoup de spectateurs ont souligné la dimension baroque de l’œuvre, son exagération tapageuse, avec laquelle le réalisateur joue beaucoup. Il reprend les codes de séries B où les décors font volontairement faux aussi bien que les flaques de sang. Pourtant l’intrigue fonctionne : celle d’un serial-killer homophobe tuant les acteurs pornos d’une troupe menée par Anne Parèze (Vanessa Paradis). Si certains regrettent, lors du visionnage, un jeu qu’ils considèrent comme surjoué, c’est justement cet aspect qui donne un ton drôle et léger au film qui agit comme un véritable vent de fraîcheur dans une sélection officielle parfois axée sur des sujets plus lourds. Mention spéciale pour Archibald (Nicolas Maury) dont chaque réplique prononcée illumine même les meurtres les plus glauques.

La musique participe aussi pour beaucoup à la réussite du film. Elle rythme parfaitement chaque plan, les rendant encore un peu plus intenses, un peu plus forts. Pour la deuxième fois, Yann Gonzalez s’est entouré de M83, qui avait déjà composé la bande-son de son premier film Les rencontres d’après minuit (2013) il y a quelques années.

Ce sont toutes ces choses qui nous font oublier les quelques failles présentes dans le scénario, notamment un manque notable d’alchimie entre Anne et Loïs, un couple joué respectivement par Vanessa Paradis et Kate Moran. Mais ce petit défaut est un détail infime face à la création de cet univers si singulier, à mi-chemin entre l’onirique et le trash, bien reconnaissable du réalisateur.

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