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Cannes 2018 – Un Certain Regard : un grand prix éprouvant pour « Border »

À bien des égards, la cérémonie un Certain Regard a souhaité remettre ses récompenses à des films portant un message politique, militants pour plus de progressisme et de tolérance. En effet, le prix d’interprétation est revenu au jeune acteur de Girl, Victor Polster, jouant une jeune fille trans souhaitant faire du ballet. The Dead and The others couronné du prix spécial du jury sensibilise à la déforestation en Amazonie et aux conséquences sur les territoires indigènes. Meryem Benm’barek a quant à elle reçu le prix du meilleur scénario pour Sofia, abordant la question de la condition féminine dans la société marocaine. Sergei Loznitsa a obtenu le prix pour la mise en scène de Donbass, rappelant dans son discours la détention en russie de Sentsov, réalisateur ukrainien actuellement en grève de la faim.

Mais s’il y a un film sur lequel on attendait pas le Jury présidé par Benicio del Toro, c’est avec le lauréat du Grand Prix, Border (Gräns) d’Ali Abbasi.
On y suit le quotidien de Tina agente douanière au physique particulier qui dispose d’une incroyable capacité à sentir les émotions des gens. Elle passe donc ses journées à arrêter des personnes traversant la frontière, à se faire insulter pour ses différences et passe ses soirées avec un homme profitant de sa maison, plus intéressé par ses chiens que par elle. Ce quotidien linéaire et dur à vivre bascule lorsqu’elle se retrouve face à Vore, personnage qui échappe à son flair et qui exerce sur elle un pouvoir d’attraction qu’elle ne comprend pas.
Sur fond d’enquête criminelle visant à démanteler un réseau pédophile, une histoire d’amour hors norme ase profile au cours de laquelle Tina flirt plus avec les frontières identitaires qu’avec celles terrestres que lui imposent son métier. Vite le film se transforme en une quête d’émancipation qui brouille les limites du genre et prône l’acceptation, grâce à la nature fantastique des deux protagonistes.
Si le scénario est particulièrement bien écrit, Border rebute. Le film est éprouvant à regarder. La beauté dans la laideur est pourtant recherchée et atteinte dans une sublime scène de libération en forme de course dans les bois qui apporte la seule légèreté à ce Thriller difficile à regarder. L’exécution, les costumes, le maquillage sont pourtant de qualité, mais l’image déplaît. Le propos final semble confus, l’espoir d’acceptation laisse place à la déception sous forme d’actes ignobles. Même les propos de Tina, opposée à la violence, n’arrive pas à couper le degout ressenti pour les autres personnages. L’impressionnante transformation et le remarquable jeu d’Eva Melander ne suffisent pas non plus à contrebalancer le sentiment de rejet général.

Border, est un film qui a su convaincre son jury par des qualités non négligeables, mais qui a laissé dubitatif ses spectateurs par son sujet.

En amour avec la diversité artistique, immergée dans les images et les sonorités, en quête d'une fameuse culture hybride, à la croisée des idées. Sur la route et sur les rails, entre la France et les festivals.

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