CINÉMAFestival de Cannes

Cannes 2018 – Le saut de « L’Ange »

Un moment surréaliste. Des instants d’incompréhension, de gêne peut-être, qui poussent une poignée de personnes à quitter la salle, après avoir pourtant fait plusieurs heures de queue sous un soleil de plomb. Présenté dans la section dont le jury est présidé cette année par Benicio del Toro, le nouveau film de l’Argentin Luis Ortega offre Un certain regard sur une histoire vraie, celle du tueur en série Carlos Eduardo Robledo Puch.

Peut-être est-ce le sourire aux lèvres, contagieux, qui ne quitte pas Carlos, dans ses pérégrinations morbides tout au long des deux heures qui composent ce sommet du genre qui peut rebuter. La violence est partout, omniprésente, mais secondaire. Le lycéen tue, vole, avec une simplicité, un détachement tel que même les âmes les plus sensibles y trouveront leur compte.

Pris au jeu, on se sent vite complice des exactions, absurdes, et de leurs conséquences sur la suite des événements. L’absurde s’immisce dans ce film de braquage, qui est aussi un film d’amour à part entière, sans que cette dimension sentimentale et introspective ne prenne le pas sur l’intérêt et la pertinence du récit. La photographie est sublime, le jeu sur les couleurs et les ambiances, qui évoluent radicalement au fil du film, font partie intégrante de la narration et contribuent à cette atmosphère légère qui traverse un film au sujet et aux péripéties pourtant bien pesantes.

Ce long-métrage est de la trempe des films dont on dit qu’il faut les voir dans une salle de cinéma, ne serait-ce que pour observer les réactions du public, mais également pour profiter au mieux des choix musicaux judicieux qui ont été opérés. Le scénario parvient à nous faire rire souvent, et sourire, tout le temps. Au delà de cette interrogation rétroactive, ce semblant de culpabilité induit une réflexion qui se poursuit bien au-delà de la sortie de la salle, et du retour à ce soleil de plomb.

Co-fondateur, directeur de la publication de Maze.fr. Président d'Animafac, le réseau national des associations étudiantes. Je n'occupe plus de rôle opérationnel au sein de la rédaction de Maze.fr depuis septembre 2018.

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