SOCIÉTÉ

A quoi pourrait ressembler le service national version Macron ?

Emmanuel Macron l’a confirmé le 13 février dernier : le service national promis pendant la campagne présidentielle sera universel, et obligatoire. Mais difficile pour l’instant d’en cerner les véritables contours.

Le président de la République veut mettre les jeunes Français·e·s au garde-à-vous. En tous cas, c’est ce qui figurait dans le programme présidentiel du candidat Macron.

« Nous créerons un service militaire obligatoire et universel d’un mois.

Il s’adressera aux jeunes femmes et hommes aptes de toute une classe d’âge et devra intervenir dans les 3 ans suivant leur dix-huitième anniversaire. L’accès aux métiers de la défense en tant que militaire d’active ou dans la Garde Nationale en sera facilité. Cela permettra aussi de disposer, en cas de crise, d’un réservoir mobilisable, complémentaire de la Garde Nationale. » – Extrait du programme présidentiel d’Emmanuel Macron

Obligatoire ou pas ?

Mais cette promesse claire et précise exprimée pendant la campagne a depuis beaucoup évolué. Les ministres des Armées, Florence Parly, et de l’Intérieur, Gérard Collomb ne disant pas la même chose pendant un temps, la première affirmant que le service national ne serait pas obligatoire, et le second de la contredire quelques jours plus tard. Finalement le Président a tranché, enfin, à moitié, en parlant d’un service national avec « une partie obligatoire ». C’est ce qu’il a affirmé lors d’une rencontre sans micros ni caméras avec les journalistes de l’Association de la presse présidentielle le 13 février. Une « partie obligatoire » sur un mois de service national ? Compliqué.

Quelle durée ?

D’un mois dans la proposition initiale, Emmanuel Macron, toujours au cours de sa rencontre avec les journalistes de la presse présidentielle, a plaidé pour un service de « trois à six mois ». Ce qui n’aurait évidemment pas le même impact en terme de coût pour cette mesure, évaluée déjà à environ trois milliards d’euros pour un mois de service obligatoire. Alors question : parle-t-on vraiment d’un service militaire, en caserne, comme avant ?

Combien ça coûte ?

Selon plusieurs estimations, un service national militaire obligatoire d’un mois pour toute une classe d’âge coûterait aux alentours de trois milliards d’euros à l’Etat, ce qui n’est pas rien lorsque l’on sait que le gouvernement veut absolument rentrer dans les clous des engagements européens en terme de budget. Le budget de la Défense doit atteindre selon les promesses du président de la République 2 % du PIB d’ici à 2025. De 34 milliards d’euros en 2018, il va pour sûr augmenter d’1,7 milliard chaque année jusqu’en 2022. Pas assez pour financer le service national, d’autant que les armées ont d’autres priorités, mais pour le moment, aucune date n’a été fixée pour la mise en place de ce service.

Militaire, civil… ou les deux ?

Dans la proposition de campagne, on lit bien : « un service militaire obligatoire ». Et bien d’après le Président désormais, il n’en est rien. « Ce service n’est pas un service militaire, même si j’ai souhaité qu’on puisse y prévoir l’ouverture à la chose militaire, c’est pour cela qu’il est national », a-t-il expliqué, cité par Le Figaro, toujours au cours de sa rencontre avec les journalistes du 13 février. Emmanuel Macron a donc précisé que ce service national pourrait aussi être civique, et que le caractère militaire, lui, ne serait pas obligatoire. Le service national pourrait donc se faire dans d’autres services de l’Etat, ou bien dans des associations.

En 2016, 6 ans après sa mise en place, 130.000 jeunes avaient effectué un service civique. © Gouvernement

Mais alors, quid du service civique ? Mis en place par Martin Hirsch sous la présidence de Nicolas Sarkozy en 2010, il permet à un jeune entre 16 et 25 ans de réaliser une mission d’intérêt général dans une association, un service de l’Etat ou une collectivité, à condition que celle-ci ne soit pas la substitution d’un poste salarié, et qu’elle s’effectue contre une rémunération d’environ 600€. Les missions de service civique peuvent durer entre 3 et 12 mois. Et surtout, le service civique repose sur le volontariat, une notion beaucoup mise en avant dans le monde associatif, plutôt contre le principe d’un service national obligatoire, mais qui plaide pour un développement accru du service civique.

Un rapport parlementaire qui dérange

C’est aussi un peu le sens du rapport cosigné par les députées Marianne Dubois (Les Républicains) et Emilie Guerel (La République en Marche), qui plaident pour un service national facultatif. Elles plaident en fait pour « un parcours citoyen », tout au long de la scolarité, composé de plusieurs phases, dont certaines obligatoires, notamment un « rite de passage républicain » : à 16 ans, chaque Français·e aurait une semaine consacrée à la défense et à la citoyenneté (contre une journée actuellement), et se verrait à la fin remettre un passeport citoyen. Les rapporteures évoquent deux hypothèses : une semaine en internat avec un programme commun à tous, pour « se faire rencontrer les jeunesses de France » ; ou une semaine dans une association ou dans un service public.

Le fait est que ce rapport met l’accent sur l’aspect citoyen, plutôt que sur le militaire, et insiste aussi sur l’incitation à l’engagement, plutôt que d’obliger. Le rapport propose « d’accompagner la montée en puissance des dispositifs d’engagement existants », comprenez développer le service civique, le service volontaire européen, l’engagement associatif, les sapeurs-pompiers volontaires…

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