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Vegan, ton univers impitoyable

Hué, conspué, adulé, décrié, plébiscité, le concept vegan fait passer son public par tous les états émotionnels. Comment s’y retrouver au milieu de toutes ces opinions radicales ? Comment s’informer, faire ses choix seul·e, et entrer dans la nébuleuse vegan ?

Tout commence par presque rien ; un avertissement du médecin sur vos risques cardio-vasculaires, un ami convaincu cherchant à être convaincant, un documentaire douteux visionné sur Netflix lors d’une nuit d’insomnie. Puis la question hante l’esprit pendant plusieurs heures, plusieurs jours, plusieurs semaines, jusqu’à se muer en doute fondamental sur vos habitudes. Et pourquoi pas ? Pourquoi ne pas devenir vegan ?

Magma d’infos

Tout esprit rationnel, avant d’opérer un changement aussi radical, tentera d’abord de s’informer. Et là, c’est le drame. Internet pullule d’opinions divergentes et d’études scientifiques censées vous apporter la réponse à toutes vos questions. A côté de cela, des détracteurs indépendants ou financés s’épanchent sur des pages entières pour vous prouver que vous vous apprêtez à commettre la pire erreur de votre vie. Au milieu de tout cela, il y a une personne innocente, peut-être naïve, assurément déterminée à tirer au clair ces disputes qui semblent animer les dimanches pluvieux d’internautes venant du monde entier. Il est temps de pousser la porte du côté obscur d’internet, celui où l’on admet ses failles et où l’on veut se prouver que l’on peut être une meilleure personne, adaptée à la communauté.

Nier la mode, c’est nier la vérité

Commençons par poser deux constats. D’une part, il est impossible de nier que le mot « vegan » soit entré dans le langage quotidien par le biais d’internet. Certes, d’autres modes d’information (notamment la littérature et les médias) traitent du sujet. Mais il serait hypocrite de dire que l’on ne s’est pas d’abord perdu dans les méandres du web, à la recherche d’un sens quelconque à un style de vie en perdition. D’autre part, il faut admettre que dans beaucoup de cas (pas tous, mais une bonne partie tout de même), l’intérêt pour le véganisme a été déclenché par un compte Instagram accrocheur, un Youtubeyr particulièrement habile des mots, ou un tableau Pinterest alléchant.

© Denis Karpenkov

 

Ajoutons à cela que cet article n’est pas classé dans la rubrique « Style » par hasard. C’est bien parce que le véganisme est un mode de vie, englobant toutes les sphères de l’existence, qu’il convient de le traiter comme tel.

Tout est dans le vocabulaire

Néophytes, cet avertissement est fait pour vous : il existe plusieurs mots a priori similaires mais renvoyant à des réalités bien différentes. On connaît le végétarien, qui ne consomme pas de viande (ni de viande rouge, ni de volaille, ni de poisson). On connaît le pescétarien, qui ne consomme que des chaires pêchées en mer. Puis il y a les plus complexes, comme le végétalien, qui lui ne se nourrit d’aucun produit issu des animaux. Exit donc la viande rouge, la volaille, le poisson, les œufs, les produits laitiers. Enfin vient la tête brûlée, le radical des radicaux, qui s’accroche mordicus à ses convictions et refuse toute consommation animale. Cela va donc plus loin que l’alimentation, il ne porte pas de laine, ni de cuir, encore moins de cosmétiques testés sur les animaux, bref, il porte dans son cœur le bien-être animal au point de le placer dans le top 3 de ses priorités quotidiennes.

Allez viens, on est bien

Quiconque tentera de glaner des informations, des conseils ou des avis sur le véganisme sera confronté à deux problèmes. Premièrement, celui des soldats omnivores, dépités par la dérive hérétique de ceux qui ne veulent plus manger de bonne chair fraîche bien virile. Avec plus ou moins de véhémence, ils tenteront de vous expliquer que vous prenez des risques incommensurables pour votre santé, que les carences sont légion et que les protéines indispensables au corps humain ne se trouvent nulle part ailleurs que dans une entrecôte braisée.

Le second problème, peut-être le plus mortifiant des deux, se situe au cœur de la communauté végane. De l’extérieur, les vegans apparaissent soudés, unis par les liens sacrés de l’anti-spécisme jusqu’à ce qu’un carniste les sépare. Pourtant, derrière cette façade chatoyante se cache un univers strict, psychorigide et parfois excessif.

Certains vegans – que l’on peut qualifier d’influencers dans leur domaine – ont su s’imposer en flirtant avec les extrêmes. Il y a ceux qui se sont plongés dans un mode de vie à 300 % vegan et qui montent au front dès qu’un membre de leur communauté fait un quart de pas de côté. C’est le cas des détracteurs de Didi Chandouidoui, youtubeur banni de la communauté végane par des ultras du mouvement, parce qu’il a eu l’audace impardonnable de laisser son chat chasser dans son jardin.

 

Il y a aussi ceux qui poussent leur public dans une alimentation extrême, très dangereuse pour la santé, sans une once de culpabilité. On parle ici des frugivores, crudivores, anti-compléments alimentaires, comme FullyRaw Kristina qui placarde sur son blog que cuire ses aliments provoque le cancer. A titre informatif, il faut savoir que les frugivores et crudivores témoignent tous de perte de cheveux, de fatigue extrême et d’impossibilité de manger à cause de maux de ventre terribles. Ce sont autant de signes de malnutrition qui auraient dû les alerter sur la folie du régime qu’ils pratiquaient.

Enfin, on peut parler de ceux qui desservent la cause, parfois malgré eux. YouTube regorge de vidéos, majoritairement anglo-saxonnes, où les vidéastes racontent avec de grands sourires comment ils ont arrêté d’être vegan car ils en avaient marre, ou parce que la viande leur manquait trop, ou parce qu’ils en avaient assez de prendre le temps de cuisiner des plats sans viande. Ces gens ne rendent pas service à la majorité silencieuse profondément attachée à des valeurs de protection de la planète, de respect des animaux et d’impératifs de santé humaine. Ils vulgarisent et ridiculisent une cause déjà mal vue à cause de positions extrêmes massivement relayées sur les réseaux sociaux pour tourner en ridicule ce « mode vie de timbrés ».

Directrice de la communication, tout droit venue de Belgique pour vous servir. Passionnée de lecture, d'écriture, de photographie et de musique classique.

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