On entend aujourd’hui beaucoup parler d’actions humanitaires ou de missions de solidarité, dans les médias ou par ses relations. De nombreuses personnes se disent prêtes à tenter l’aventure, mais ne savent pas forcément où, quand, ni comment se lancer. Certain·e·s l’ont fait, d’autres préparent le départ des volontaires en amont. Ils/elles ont choisi de vous parler de leur expérience.
La différence entre mission humanitaire et mission de solidarité :
A ne pas confondre donc avec …
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Abigael a trente ans. Diplômée en aménagement intérieur, elle travaille à Hyères, près de Toulon, où elle s’est installée juste après son retour de mission. Elle a accepté de répondre à nos questions et de raconter ce qu’elle a vécu là-bas, et surtout ce qu’elle en retire aujourd’hui.
Une mission
Pays de destination, le Cambodge, Phnom Penh plus précisément. C’est par l’association Project Abroad, qui se présente comme une organisation internationale de volontariat laïque et entièrement indépendante, qu’elle a pu travailler de manière bénévole dans un Kindergarten (jardin d’enfants) le long du Tonlé Sap, dans un quartier marginalisé et très pauvre de la ville. Jeux avec les enfants, cours d’anglais à ces derniers et aux institutrices et notions d’hygiène ont rythmé son séjour. L’objectif final de cette mission : prendre le relais sur l’éducation de ces enfants et les armer jusqu’à ce qu’ils soient suffisamment âgés pour se rendre à l’école située à plusieurs kilomètres du quartier.
(Phnom Penh – Cambodge)
Une expérience
Comment avais-tu trouvé l’association avec laquelle tu es partie, project abroad ?
J’avais cherché sur internet, comme je suis une fille seule je voulais partir dans un cadre sécurisé. J’ai contacté alors des amis autour de moi qui étaient partis avec eux (project abroad ndlr). Ils m’ont dit que je pouvais y aller sereinement, alors j’ai commencé à y penser plus sérieusement et à me préparer. Fin 2014 j’avais sauté le pas, mon sac était prêt et je m’envolais pour le Cambodge.
Comment se sont déroulés les préparatifs avant ton départ ?
J’ai dû préparer mon voyage plusieurs mois en amont. Evidemment, le billet d’avion est à la charge du volontaire, lequel travaille de surcroît bénévolement sur place. J’ai dû payer un forfait global pour les assurances et le logement là-bas, aux alentours de 1000€. L’argent allait aux salaires des gens sur place qui s’occupaient de nous. Finalement cela fait donc un certain coût, qu’il est nécessaire d’anticiper. Mais il faut également préparer son retour, c’est un rêve qui ne dure pas toute la vie et il faut bien atterrir un jour, même si ce n’est pas toujours facile.
« En occident, beaucoup de nos problèmes ne sont pas insurmontables mais on les fait passer pour. On doit réapprendre à relativiser certaines choses qui doivent l’être, à dédramatiser. »
Qu’est ce qui t’a poussée à faire ça ?
C’est un désir qui remonte à longtemps et qui prend sa source à plusieurs endroits… J’adorais les voyages et je voulais découvrir l’Asie notamment. Je voulais donner de mon temps et faire une action humanitaire, ou une mission d’aide au développement.
J’ai eu plusieurs étapes dans mon parcours où j’aurais pu le faire, mais par manque de temps ou d’argent, j’ai dû plusieurs fois repousser. L’opportunité de me lancer est arrivée au moment où j’ai quitté mon travail et mon appartement pour changer de région. J’en ai profité pour accomplir ce désir.
Qu’est ce que tu en retires ?
Ce que j’en retire de très important, c’est du recul sur pas mal de choses, notamment sur les problèmes des gens. En Occident, beaucoup de nos problèmes ne sont pas insurmontables mais on les fait passer pour. On doit réapprendre à relativiser certaines choses qui doivent l’être, à dédramatiser. Et je suis revenue bien plus ouverte d’esprit sur des personnes venant de pays, de cultures et de religions différentes. Là-bas on combat cette peur de la différence que beaucoup connaissent.
Quel est ton regard maintenant sur les missions d’aide au développement ?
Je pense que c’est quelque chose de bien qu’on devrait faire dans sa vie. Ça m’a appris sur moi-même parce qu’on se retrouve sans aucun repère, et je pense que je serai fière de l’avoir fait toute ma vie. Néanmoins je garderai en tête une chose qui est aussi typiquement occidentale : en partant là-bas on s’imagine presque trouver des gens désespérés, qui ne sauraient rien faire sans nous. Mais quand on arrive là bas, la réalité est toute autre. On arrive dans un endroit où les gens vivent clairement sans nous, ce qui implique beaucoup de respect quand on s’adresse à eux et beaucoup d’humilité. L’erreur à ne surtout pas commettre est de tomber dans l’infantilisation, j’ai déjà vu ça c’est d’un irrespect total. Les personnes qui n’ont pas su s’adapter sont d’ailleurs rarement restées jusqu’à la fin.
« Je me suis rendu compte que tous les enfants se ressemblent, quelle que soit leur couleur ou leur origine. J’ai compris qu’ils sont très heureux là bas, et ça m’a fait me poser beaucoup de questions sur la quête du bonheur à l’occidental et notre matérialisme à outrance. »
As-tu eu des épisodes plus difficiles que d’autres ?
Evidemment il y a eu des moments plus compliqués. Il y a des moments où on se rend compte que notre pouvoir d’action est limité. J’ai notamment en tête l’histoire d’un enfant de 6 ans, Khân. Il ne pouvait plus bénéficier de nos soins et ne pouvait pas non plus continuer ses études parce que l’école était trop loin. Il venait toujours nous voir. Son petit frère était toujours avec nous mais Khân restait seul dans la rue en nous regardant, sans pouvoir rejoindre son frère. C’était dur de voir ça, d’être impuissante face à des situations de ce type. Mais il faut également savoir accepter qu’on ne peut pas régler tous les problèmes, trouver des solutions à tout. Les familles étaient très heureuses qu’on soit là malgré tout, on a apporté notre petite contribution à leur vie quotidienne.
Penses-tu que n’importe qui puisse se lancer dans une mission comme la tienne ?
Je pense qu’énormément de personnes pourraient faire ça. Mais il faut faire l’effort de parler anglais, tout en réussissant à s’extraire de ses carcans. Il y en a certes qui supportent mal le climat ou la nourriture, mais pour ce qui est de la mission n’importe quelle personne un peu construite et majeure peut le faire. Je me suis rendu compte avec cette expérience que tous les enfants se ressemblent, quelle que soit leur couleur ou leur origine. J’ai compris qu’ils sont très heureux là bas, et ça m’a fait me poser beaucoup de questions sur la quêtes du bonheur à l’occidental et notre matérialisme à outrance.
Lien pour l’association « Project Abroad » : https://www.projects-abroad.fr/s-inscrire/