CINÉMA

« L’amant d’un jour », romances modernes

Fresque sublime de destins amoureux, L’Amant d’un jour, le nouveau film de Philippe Garrel primé à la Quinzaine des Réalisateurs lors du dernier festival de Cannes, est percutant de vérité.

D’abord ils sont deux amants : Gilles et Ariane. Lui est professeur de philosophie. Elle, son élève.  De deux, ils passent rapidement à trois et c’est Jeanne, la fille de Gilles, qui vient perturber cet équilibre nouvellement acquis. Fraîchement séparé de son fiancé Mattéo, elle n’a d’autres choix que de retourner vivre chez son père.

Très vite, les jeunes femmes s’apprivoisent et leur amitié devient l’élément central de l’intrigue.  C’est à travers elles que se dessinent deux conceptions de l’amour qu’on devine diamétralement opposées, même si l’une et l’autre ne se jugent jamais et finissent quelquefois par trouver un terrain d’entente. Car si Jeanne ne conçoit l’amour que comme une passion dévorante dont la rupture provoque le sentiment d’être « écorchée vivante », Ariane détient une toute vérité.  Plus charnelle, plus instinctive, elle est convaincue que les romances ne durent qu’un  temps. Pourtant  elle aime Gilles, peut-être parce qu’elle dissocie plus facilement le plaisir avec l’amour, plaisir qu’elle retire de ses histoires éphémères.

© Arte France Cinéma

 

C’est sûrement là que réside la force de L’Amant d’un jour : le film questionne, donne matière à réfléchir mais jamais n’impose. L’amour se découvre sous milles visages et aucune opinion ne vaut mieux qu’une autre.  Les deux femmes puisent dans leur union une force commune : celle qui leur permet de résister aux chagrins et aux déconvenues.

Amours infidèles

Un des mots qui revient très certainement le plus souvent dans le film est certainement celui de fidélité. Elle est au cœur des échanges entre les personnages, notamment quand Jeanne demande à son père ce qu’il entend par être fidèle, mais pas seulement ! C’est une notion qui finit par entrer de façon concrète dans la vie de Gilles quand il est confronté aux infidélités d’Ariane.  En théorie, lui qui séparait si bien fidélité physique et fidélité affective est mis face à ses contradictions quand il apprend les aventures extraconjugales de sa compagne.

© Arte France Cinéma

 

Mais qu’est-ce que la fidélité ? N’avoir qu’un unique amour ou qu’un unique amant ? Pourquoi ne parle-t-on que de fidélité amoureuse ? La fidélité tient aussi l’allégeance à ses convictions personnelles. Jeanne le dit elle-même : le couple est ce grand manteau confortable qui nous protège du froid mais qui jamais ne nous fait affronter l’hiver. La solitude peut être un fardeau mais elle a au moins le mérite de nous confronter à la personne que l’on est.

Ariane, malgré ses tromperies, est peut-être la plus fidèle. Fidèle à ce qu’elle est et à ce qu’elle défend, le plaisir qu’elle brandit comme une arme pour posséder son corps entièrement. En refusant la notion traditionnelle du couple, elle laisse libre cours à ses envies. C’est en cela que L’Amant d’un jour nous émeut et résonne en nous car, non content d’interroger l’amour, il interroge le rapport que nous entretenons avec nous-même.

 

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