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Cannes 2017 – « Rodin », puissance de l’artiste, faiblesse du film

Pour cette 70ème édition du Festival de Cannes, Jacques Doillon présente Rodin avec Vincent Lindon et Izia Higelin, qui interprète Camille Claudel. Le cinéaste a choisi de recentrer le film sur l’artiste et la création, un bon choix pour se dégager du genre du biopic. Malheureusement, malgré les bonnes intentions de Jacques Doillon et la présence forte de Vincent Lindon, Rodin est beaucoup trop fragile et frôle parfois le ridicule.

Le film avait pourtant bien commencé : Jacques Doillon nous fait pénétrer à l’intérieur de l’atelier du maître qui commence à réaliser sa première commande de l’État, la Porte de l’Enfer. Nous suivons alors le sculpteur dans sa création et sa passion artistique jusqu’à sa recherche du parfait Hugo puis du parfait Balzac. Le parti-pris d’un Auguste Rodin au travail était une bonne idée du cinéaste, une manière alléchante de dévier des codes du biopic. D’ailleurs le film est sauvé uniquement par sa mise en scène et la façon dont le réalisateur filme les corps en fait un film très organique assimilé ainsi à la conception de Rodin de la sculpture. Malgré ces belles compositions de plans, Rodin traîne sur la longueur jusqu’à s’éteindre, le personnage assommer d’ennui le spectateur sous son poids lourd. Il tend même vers le ridicule en faisant en sorte que Rodin croise Hugo, Monet, Cézanne et Mirabeau, ce qui offre des scènes absolument mièvres et inutiles au scénario.

Du plastique au vide

Camille Claudel est filmée à travers les yeux de Rodin et la passion qu’il éprouve pour elle mais le personnage que Jaques Doillon nous montre n’a rien à voir avec la personne qu’elle était. Dans Rodin, elle apparait comme odieuse et hystérique. Alors bien sûr, il y avait de l’hystérie et une folie artistique chez Camille Claudel, mais la fausseté du jeu d’Izia Higelin la rend ridicule et insupportable et c’est dommage de ne pas avoir réellement approfondi la complexité du personnage tout en restant focalisé sur Rodin. Quant au sculpteur lui-même, il apparait comme une énorme masse organique à l’image de ses œuvres, un point de vue fascinant. Mais même si visuellement Vincent Lindon est impressionnant et plutôt juste contrairement à sa partenaire, le Rodin qu’il campe est vraiment trop fade. D’autant plus qu’il marmonne dans sa grosse barbe et que l’on ne comprend pas toujours ce qu’il raconte. Heureusement qu’il y a les sous-titres en anglais dans les salles cannoises…

Rodin est visuellement un film sympathique à regarder mais néanmoins une grosse déception qui reste beaucoup trop faible, parmi les autres films sélectionnés à Cannes.

J'entretiens une relation de polygamie culturelle avec le cinéma, le théâtre et la littérature classique.

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