SOCIÉTÉ

Umoja, le village Kenyan sans hommes

Entre les années 1970 et 2003, durant la colonisation britannique au Kenya, de nombreuses femmes ont été violées par des soldats notamment au nord du pays. Cela a été considéré comme une honte envers leur communauté. Leurs maris respectifs les ont battues et répudiées pour les punir de cette injure.



Des femmes déshonorées par leurs maris              

Dans la communauté Samburu, au nord du Kenya, les femmes travaillent d’arrache-pied de trois heures à vingt-trois heures chaque jour. Les maris passent leur temps à dormir ou à jouer. Lorsqu’ils daignent se réveiller, ils demandent à leurs épouses de leur amener de la nourriture sous les arbres qui les abritent pour leur sieste journalière. Leur seule activité se résume à sortir et ramener le bétail de l’enclos. En plus de travailler avec beaucoup d’effort, ces femmes subissent des violences physiques de la part de leurs maris. Cette situation abominable n’est plus supportable pour celles-ci, désespérées par leur vie actuelle et leurs droits oubliés. Le village Umoja créé en 1990 par plusieurs femmes au Kenya renverse les règles liées au patriarcat dans cette société.

Umoja ou le village des femmes

Grâce à certaines femmes, dont la fondatrice Rebecca Lolosoli, le projet de créer un village interdit aux hommes voit le jour. Situé à 380 kilomètres de la capitale Nairobi, cette communauté appelée Umoja a pour principe de respecter les droits de la femme jusqu’alors bâclés. Elles vivent dans des huttes, sans eau potable. En 2003, il comptait quarante femmes et une centaine d’enfants. Elles sont facilement reconnaissables par la quantité de bijoux qui habillent leurs bustes, oreilles ou cheveux.

Le village accueille de nombreuses épouses du clan Samburu. Ces femmes marquées physiquement comme psychologiquement par les violences de leurs maris y trouvent un refuge, une famille. Les femmes élèvent seules les enfants, des deux sexes, qu’elles gardent avec elles. Les relations sexuelles sont acceptées mais doivent se dérouler en dehors du village.

Le principe du village va au-delà de protéger les femmes. Une éducation leur est apportée. Les enfants apprennent dès le plus jeune âge à écrire, lire, compter… Il est essentiel pour la communauté que leurs enfants acquièrent cette aisance pour quitter le village lorsqu’ils seront adultes. Ils pourront ainsi se marier et trouver un travail pour une vie meilleure.

Ces femmes sont plus communément appelées les Tumaï qui signifie « espoir de vie ». Le village comprend désormais une aire de camping et un centre culturel. La cause qui anime ses habitantes attire de nombreuses personnes venant de l’extérieur. Il est devenu un réel lieu d’hébergement touristique malgré sa méconnaissance au Kenya.

Une communauté représentée

Les tumaï jouent un rôle important dans la course pour les droits de la femme. 58 des membres de la communauté représentent le conseil fondateur des femmes. Prendre des décisions pour le village en termes d’éducation ou de dépenses de manière démocratique montre leur détermination à rendre leur vie plus juste. Elles se réunissent dans une hutte. Après avoir débattu sur les sujets essentiels à leur bien-être dans la communauté, un vote à main levée est effectué.

Leur économie est prospère. Entre fortifications ou troupeaux, leur objectif est de protéger le clan. Les touristes contribuent à cette prospérité et à la paix investissant dans l’artisanat local.

Une jalousie attisée

Le succès d’Umoja ne plaît pas aux hommes qui attaquent régulièrement le village. Pour cela, il existe des Gardiens du village. Ce sont les seuls hommes acceptés. Leur but est de protéger les femmes des hommes saouls ou violents s’introduisant sur les terres d’Umoja. Leur méthode est radicale, ils n’hésitent pas à les tuer. Malgré les fortifications établies aux alentours du territoire, les hommes continuent leurs attaques sans relâche. Ils jugent le village en opposition aux traditions locales et donc immoral. Malheureusement, les gardiens du village ne parviennent pas à empêcher tous les individus d’entrer. En 2005, une femme du village Umoja est tuée.

Malgré le danger qui les entoure, les tumaï continuent leur lutte pour une égalité des droits, des sexes et une vie meilleure en espérant retrouver un jour une prospérité au sein de leur population entière.

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