CINÉMA

La relève du cinéma : diptyque d’adolescentes

Deux jeunes comédiennes, deux films, deux scénarios qui ne se ressemblent en rien, deux pays mais un seul thème. Les complexités de l’adolescence et de la puberté attirent les jeunes cinéastes.

En quelques mois, les films qui s’emparent de ce sujet intemporel s’enchaînent. Après Grave de Julia Ducournau (lire notre critique), la rédaction a été séduite par deux d’entre eux : Fantastic Birthday de Rosemary Myers (Australie) et Mate me por favor d’Anita Rocha da Silveira. L’avenir est assuré.

Depuis toujours, le passage du monde de l’enfance au monde adulte fascine les artistes. Si ces deux héroïnes perdent leur naïveté de petite fille, ce n’est pas le seul élément qui réunit ces deux films. Ce sont des premiers films et de petites productions originaires de pays qui ne dominent pas l’industrie du cinéma. On va être honnête, c’est un soulagement de savoir qu’il existe de jeunes réalisateurs qui peuvent faire des films avec peu de moyen. Toutes deux ont une parfaite maîtrise des plans et de la direction des jeunes comédiens. Ils font preuve d’une inventivité scénaristique et technique qui saute aux yeux du spectateur.

Fantastic Birthday : l’enchantement onirique

Copyright UFO Distribution

Fantastic Birthday est un teen movie burlesque dont l’esthétique et l’humour absurde semblent mêler l’univers de Wes Anderson, un soupçon de celui de Michel Gondry et un poil d’Alice aux pays des merveilles ou de The Daydreamer de Ian McEwan. Des influences cinématographiques flagrantes à première vue, cependant le projet de départ est une pièce de théâtre autour de l’adolescence et ça se ressent visuellement dans la direction des acteurs et les placements dans l’espace.

Quant à l’histoire, elle se concentre sur Greta Driscoll (Bethany Withmore), une jeune fille introvertie perdue dans cet univers excentrique. À l’aube de ses 15 ans, ses parents prennent la décision d’organiser une grande fête en invitent tous ses camarades du collège. Son lapin blanc ? Une boîte de musique qu’elle ouvre pour se réfugier dans son enfance qu’elle ne veut pas quitter. Son terrier ? Un univers parallèle qui prend la forme d’une forêt – thème cher aux contes – peuplée de personnages étranges qui vont lui permettre de s’émanciper.

Si le scénario parait un peu classique, il n’en est rien car la création narrative et esthétique du film prennent totalement le dessus. Rosemary Myers se démarque notamment par sa manière de placer la caméra qui donne lieu à des plans fascinants comme cette scène de repas de famille. La caméra est alors placée au centre de la table et filme le personnage qui prend la parole comme un jeu de ping-pong. Une réalisatrice à suivre de très près.

Fantastic Birthday de Rosemary Myers (sorti le 22 mars 2017)

Mate me por favor : Death, sex and faith

Copyright Wayna Pitch

Dans Mate me por favor, ce n’est pas la peur du monde adulte qui est mise en lumière chez cette bande d’adolescents mais plutôt un désir de grandir trop vite. Anita Rocha da Silveira présente un premier film à la fois noir pour l’histoire mais aux couleurs pop pour le visuel. Ce film brésilien fait disparaitre les adultes qu’on ne voit jamais pour se centrer sur des jeunes troublés par trois problématiques essentielles : la mort, le sexe et la religion.

Alors qu’une vague de meurtres déciment certains d’entre eux, l’héroïne et sa bande d’ami(e)s se cherchent dans la découverte de leurs corps. Ce premier film est étonnant par sa forme et ses plans aux couleurs criardes. La réalisatrice maîtrise le suspens par des plans frontaux tandis que le sang coule à flot sur l’écran. C’est une génération de teenagers perdus qui se réfugie dans les couleurs fluo, les clips pop et les paroles d’une prêtresse aux allures de chanteuse R’n’B. Ce petit ovni brésilien annonce un avenir radieux pour sa réalisatrice très talentueuse.

Mate me por favor d’Anita Rocha da Silveira (sorti le 15 mars 2017)

J'entretiens une relation de polygamie culturelle avec le cinéma, le théâtre et la littérature classique.

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