On a attendu le retour de Frànçois and the Atlas Mountains dès la fin de la tournée du fantomal Piano Ombre, sorti en 2014. Trois ans plus tard, le groupe revient avec Solide Mirage, écrit et enregistré à Bruxelles, et nous offre de quoi nous délecter d’un contentement multiple. L’album assure la continuité des opus précédents de par ses sonorités vivifiantes et ses arrangements eurythmiques qui subliment la poésie rétive de François Marry, meneur du projet.
L’album s’ouvre sur Grand Dérèglement, premier extrait de l’opus, dévoilé en janvier dernier. On y décèle très rapidement des influences empruntées au blues touareg. Le tout finit rapidement par muter en une déflagration de notes de guitare acérées comme si le chanteur contenait sa véhémence depuis bien trop longtemps.
Il nous dévoile ce sentiment d’inquiétude fébrile qui s’est emparé de lui à la suite des événements qui ont frappé l’Europe et le reste du monde ces derniers temps. Le dépit lié au fait d’assister impuissant à ces épisodes anxiogènes se mêle à l’angoisse et à la lassitude provoquées par la toxicité croissante des débats actuels. François Marry fait d’ailleurs directement allusion à ceux qui sont à l’origine de son tourment :
« Je veux voir la France débarrassée de tous les irascibles, de tous ceux qui lorsqu’ils parlent médisent (…) tant la rumeur qu’ils grossissent leur fait peur »
dit-il dans Apocalypse à Ipsos qui retentit comme une ode à l’espérance (« Je veux voir mon frère, ma soeur, d’un autre pays »). La chanson a des allures de manifeste, il y prône un programme d’ouverture à l’autre et de vivre-ensemble qui fait alors écho au thème abordé en introduction : la condition des migrants et leur détresse.
Sa poésie orne une parole que l’on écoute avec l’attention que l’on porterait à un discours engagé bien que la teneur du terme dérange un artiste qui assume malgré tout son côté « chanteur naïf de gauche ».
Les tons fracassants de Bête Morcelée viennent renforcer l’atmosphère mutine de l’album, clin d’oeil à la jeunesse du chanteur qui s’est imprégné du baume des groupes grunge avant de s’installer à Bristol en 2003.
L’album comporte une pincée de morceaux plus apaisés et plus proches de ce que le groupe a pu nous présenter à ses débuts, on pense par exemple à Tendre est l’Âme, au souchonesque (c’est un compliment) 1982 ou encore au “balladesque” Perpétuel Été.
François et les Mountains sont venus défendre leur opus les 22, 23 et 24 mars à la Maroquinerie. Les trois concerts ont allié séquences de danse, morceaux d’improvisation et interventions récurrentes des trois artistes et groupes bruxellois venus jouer en première partie (Témé Tan, Marc Melia et Le Colisée). Voilà une belle façon d’incarner ce qui semble être le motto du groupe : partage et échange.
Solide Mirage, de Frànçois & The Atlas Moutains, Domino Records, 3 mars 2017.