MUSIQUE

The XX : Amour aux pluriels

Une conversation avortée, un appel téléphone composant dans le vide, des souvenirs figés dans l’espace-temps, The XX dévoile le clip On Hold, signé par le photographe de mode, Alasdair McLellan.

Novembre 2016 sonne enfin le grand retour du groupe britannique The XX. Après quatre ans d’absence depuis leur second album Coexist, le trio a orchestré son come-back étape par étape. D’abord, de manière progressive sur les réseaux sociaux, puis, en publiant régulièrement des titres qu’ils écoutaient durant leur séjour en studio d’enregistrement. Passant de Frank Ocean, The Beach Boys à The Cure, cette playlist d’inspiration pour le moins éclectique semble annoncer une renaissance. Quelques jours après nous avoir révélé un mystérieux extrait de cinquante-cinq secondes anonyme et sans titre sur la dite playiste, le groupe dévoile On Hold, premier morceau de leur prochain album I See you, qui sortira le 13 janvier 2017, avant de parcourir le monde pour une tournée (dont figurent quatre dates en France).

La genèse xx

The XX est né à Londres en 2005, sous l’initiation d’Oliver Sim au chant et à la basse, et de Romy Madley-Croft au chant et à la guitare. Alors tous deux âgés de 15 ans, ils fondent le duo. Plus tard, ils sont rejoints par la guitariste Baria Qureshi et Jamie Smith qui arrive en dernier, aux commandes des boîtes à rythme et des synthétiseurs.

A l’été 2009, ils font leur début retentissant avec l’album iconique homonyme publié sous le label indépendant anglais Young Turks. Produit dans la promiscuité et la pénombre d’un petit garage, souvent de nuit, cet album annonce une ligne claire à la fois musicale, esthétique et artistique. A l’image de leur pochette, cet album inaugural est un manifeste du minimalisme, de la perception, et du sensible. Entre nappes éthérées, lignes de basses atmosphériques et chants murmurés, au-delà de la musique, c’est une vision de l’art et du monde que le groupe propose. Pendant que les titres s’enchaînent, quelque part en territoire sublime et irréel, représentant la nécessité du rythme et de la mélodie, on frôle une pureté rarement atteinte. Grâce à l’économie de moyens et au génie de la composition, tout y est léger et aérien pour que nos émotions se transcendent vers l’immatériel. Faussement simples et monotones, les morceaux sont au contraire riches et complexes. Puisque la chose la plus compliquée au monde demeure la simplicité, puisqu’il n’y a rien de plus difficile que d’exprimer l’ineffable et puisque The XX se qualifie comme un objet non identifié qui refuse tout diktat du genre (musicale ou sexuelle), il convient à croire que l’existence de ce groupe n’est pas loin du miracle.

Jamie Smith, Romy Madley-Croft, Oliver Sim ©The XX

Après le départ de Baria Qureshi et une tournée mondiale, à la rentrée 2012, le trio sort le deuxième opus sobrement et magnifiquement nommé Coexist. Très bien reçu par la critique et le public, c’est le prolongement encore plus intimiste et personnel dans leurs thématiques de prédilections qui sont des variations autour de la solitude et de l’amour. Si l’album est toujours publié sous le même label, il a été cette fois produit par Jamie Smith. Plus connu sous le nom de Jamie xx et parallèlement à son activité dans le trio, ce dernier se lance dans une carrière solo et sort son premier album In Colour en juin 2015 qui connaîtra un large succès.

Le renouveau xx

Depuis 2012, l’attente du prochain album de The XX se faisait longue et périlleuse, tellement, qu’on n’osait presque plus espérer. Et puis, à l’écoute de On Hold, on se dit finalement qu’ils se sont absentés pour mieux revenir, le groupe maîtrisant parfaitement l’art de nous faire languir et la dialectique du désir. A travers ce clip tourné à Marfa, au Texas – où ils ont enregistré une partie de leur nouvel opus -, on sent une volonté de renouvellement, notamment à travers de nouvelles influences, pour proposer une nouvelle vision, comme évoquent les paroles :

When I lie awake staring in space

I see a different view

Au rythme des refrains entêtants et dansants, remixés à partir d’un tube des eighties de Daryl Hall & John Oates, I Can’t Go For That (No Can Do), Alasdair McLellan compose à l’image un tableau fantasmagorique aux accents mythiques de la jeunesse américaine, le tout à travers quelques motifs les plus évidents (suburbs américains, pom-pom girl, football américain, dinner etc.). Ce clip, baigné dans une atmosphère lumineuse et solaire évoque une joyeuse mélancolie, celui d’un bonheur enfoui dans les méandres de la mémoire. Les levers et les couchers de soleils font office de métaphores pour un temps précieux et déjà révolu, celui de l’enfance et l’adolescence. En se remémorant la fin d’une ère et le début d’une autre, on revient à l’idée de la pureté, celle d’une innocence du regard et des ressentis.

Ode à la jeunesse, ode à l’Amour aux pluriels, ode aux premières fois ; bien que I See you sera leur troisième album, on croise les doigts espérant que le groupe aura préservé sa virginité de création, la pureté étant la chose la plus précieuse au monde.

Pochette de I See you -©The XX

Pochette de I See you ©The XX

"Ethique est esthétique." Paul Vecchiali

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